Urs Fischer « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles

Vue de l’installation Melodrama, 2016 Collection Maja Hoffmann / LUMA Foundation Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich
Vue de l’installation Melodrama, 2016 Collection Maja Hoffmann / LUMA Foundation Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich

Du 1er octobre 2016 au 29 janvier 2017, la Fondation Vincent van Gogh Arles propose de découvrir le monde étonnant et cocasse de l’artiste suisse Urs Fischer.
Avec « Mon cher… », Fischer dispose d’une carte blanche pour investir tout l’espace d’exposition de la Fondation.

Monumentales, généreuses, ironiques, les œuvres de Urs Fischer surprennent, déstabilisent et interrogent le visiteur.

Son occupation de l’espace et la manière dont elle implique le spectateur font de « Mon cher… » une expérience insolite et atypique.

Une fois encore la Fondation Vincent Van Gogh Arles surprend par l’audace et l’originalité de sa programmation et son approche toujours inattendue pour confronter la création contemporaine à l’univers plastique de Van Gogh.

Last Supper : une invitation au partage

Représentation de la Cène, longue de plus de sept mètres, avec des personnages grandeur nature, Last Supper, 2014 accueille les visiteurs dans la cour d’entrée de la Fondation.

Urs Fischer, last supper, 2014 Bronze moulé, armature en acier inoxydable, 144,8 × 767,1 × 147,3 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Gagosian Gallery. © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich
Urs Fischer, last supper, 2014 Bronze moulé, armature en acier inoxydable, 144,8 × 767,1 × 147,3 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Gagosian Gallery. © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich

En apparence, cette sculpture imposante semble être en argile… Elle donne le sentiment d’un « work in progress ». L’envers est marqué par des traces de doigts et de baskets… des blocs de glaise intacts sont empilés les uns sur les autres.
En réalité, l’œuvre est en bronze. La fonte a été exécutée à partir d’une des sculptures modelées collectivement par les 1 500 participants d’un happening organisé par Urs Fischer, au Geffen Contemporary. Ces 25 jours de travail collaboratif, avec comme seule consigne « Tout est permis, à l’exception d’interventions sur les murs », préparaient l’exposition « Yes » au MoCA, Museum of Contemporary Art de Los Angeles, en 2013.

Grossièrement ébauchés, les personnages semblent ordinaires. Leurs positions et leurs attitudes évoquent évidemment la Cène de Léonard de Vinci pour le réfectoire de Santa Maria delle Grazie à Milan. Sur la table, au milieu des paquets de frites de chez McDo, des canettes de bière et de joints abandonnés, quelques souris profitent des restes.

Bice Curiger, directrice artistique de la Fondation Vincent van Gogh Arles, commissaire de l'exposition
Bice Curiger, directrice artistique de la Fondation Vincent van Gogh Arles, commissaire de l’exposition

Pour Bice Curiger, directrice artistique de la Fondation et commissaire de l’exposition « La sculpture se présente comme une œuvre réalisée par une multitude de personnes, voire par nous tous. Jaillie de notre tête et de notre corps à tous : une concrétisation de l’imaginaire populaire. La Sainte Cène déploie ici toute sa force programmatique dans une sorte d’appel à l’institution en tant qu’hôte au service de la culture. Nous connaissons le contexte familial chrétien de Van Gogh, fils de pasteur, qui souhaitait lui-même devenir prédicateur. Vincent représenterait-il ici le Christ ? Nous connaissons également le rôle de martyr qu’endosse l’artiste, modèle de souffrances, et qu’incarne Vincent plus qu’aucun autre. Vincent van Gogh lui-même fait partie de la “masse populaire” (…)
La vie simple se trouvait au cœur de l’art de Van Gogh. Chez Urs Fischer, c’est le quotidien, voire la bassesse des choses simples – qu’il nomme “la beauté déchaînée du prosaïque” –, la normalité et la façon dont celles-ci se fondent avec les éléments de la pureté propre à l’art ». Extrait de « Rêveries émancipées », catalogue de l’exposition.

Melodrama : installation sentimentale et larmoyante avec des morceaux de femmes nues et une carotte…

L’installation occupe 400 m², pratiquement toute la surface d’exposition du premier étage, dégagé de toute cimaise. L’effet produit par Melodrama est spectaculaire. Le visiteur pénètre dans une pluie de gouttes de plâtre colorées qui trouble sa perception. À chaque mouvement, les perspectives et la lumière changent. On a l’impression d’avancer dans l’œuvre, d’entrer dans sa matérialité…

Vue de l’installation Melodrama, 2016 Collection Maja Hoffmann / LUMA Foundation Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich
Vue de l’installation Melodrama, 2016 Collection Maja Hoffmann / LUMA Foundation Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich

Au milieu de ces 3 000 gouttes qui se répandent dans tout l’espace, on découvre six sculptures dispersées dans la salle : des nus féminins, allongés… Leurs modelages inachevés semblent abandonnés. Des blocs d’argile sont éparpillés autour des ébauches. Les femmes toujours dépourvues de tête sont amputées ici d’une jambe, là d’un bras… plus loin, le corps est absent.

Tout paraît encore frais, la terre est parfois à peine travaillée. Des essais de couleur ou de dorure illuminent l’argile humide… Dans un monde irréel, on a l’impression de traverser un atelier de sculpture abandonné par les artistes et leurs modèles.

Dans le texte « Rêveries émancipées » qui accompagne le catalogue, Bice Curiger écrit à propos de cette installation :

« Les gouttes, le “mélodrame”, les larmes : l’érotisme est ici évoqué tel le fameux wet dream (“rêve mouillé”), avec toutes ses aspirations sublimes et ses implications émotionnelles déterminées par le contexte culturel. Or, la matière modelée n’est pas réelle mais coulée dans le bronze et couverte d’une patine imitant l’argile. Nous comprenons alors que c’est davantage “l’art”, “l’acte artistique” qui constitue le thème plutôt que la femme en soi.
(…) Une présence proprement physique réside dans les couleurs et le traitement de surface des sculptures. Le plaisir de faire, d’essayer et d’observer se communique au visiteur. »

La toile de Van Gogh, Sous-bois (1889), prêt annuel du musée Van Gogh d’Amsterdam a laissé sa place, dans l’ancien bureau du directeur de la Banque de France, à une carotte démesurée, allongée sur un divan. Faut-il voir, dans cette espièglerie, l’image d’une figure masculine comme le suggère la commissaire de l’exposition ?

Urs Fischer, 8, 2014 Bronze moulé, peinture à l’huile, feuille d’or, bol d’Arménie, apprêt acrylique, enduit à base de craie, colle de peau de lapin 78,7 × 215,9 × 199,4 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres
Urs Fischer, 8, 2014 Bronze moulé, peinture à l’huile, feuille d’or, bol d’Arménie, apprêt acrylique, enduit à base de craie, colle de peau de lapin 78,7 × 215,9 × 199,4 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres

Le tableau de Vincent, peint à Saint-Rémy, est accroché sur une cimaise couverte d’un rouge pompéien dans le couloir qui conduit à l’étage… Quelques gouttes de Melodrama semblent y accompagner le visiteur.

Chaises, squelette, autoportrait et oreille…
« Mon cher… », une lettre d’Urs à Vincent ?

Vers le deuxième étage, la suite du parcours ménage encore quelques très belles surprises. Mais l’enchantement se dissipe, l’atmosphère onirique s’efface peu à peu… La mise à distance et l’ironie réapparaissent…

Urs Fischer brouille les notions de genre et les frontières entre les pratiques. Peinture, photographie, sérigraphie, impression numérique, fonte de métal s’hybrident au point où il est parfois difficile d’en apprécier les limites.
Dans sa conversation avec Jordan Wolfson, à l’atelier de la mécanique, le jour du vernissage, il confiait avoir un regard très particulier sur l’histoire de l’art…

Pour cette exposition, le choix des œuvres, l’accrochage et leur mise en espace renvoient régulièrement aux motifs et au legs de Vincent van Gogh. Dans un entretien avec William Massey pour Officiel Art, Fischer avoue une certaine fascination pour le peintre. Et comme le souligne très justement la directrice artistique de la Fondation : « l’héritage de Van Gogh est si fort que, quoi que l’on mette dans sa “maison”, un dialogue se crée nécessairement ».

Urs Fischer, Forget-me-not, 2015 Panneau fraisé en aluminium, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l’acrylique, peinture acrylique 203,2 × 152,4 × 2,5 cm Édition unique. Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et Urs Fischer, Untitled ,2014-2016 Aluminium moulé, peinture à l’huile, verre. 74 x 45,7 x 76,8 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste de Sadie Coles HQ, Londres et © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich
Urs Fischer, Forget-me-not, 2015 Panneau fraisé en aluminium, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l’acrylique, peinture acrylique 203,2 × 152,4 × 2,5 cm Édition unique. Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et Urs Fischer, Untitled ,2014-2016 Aluminium moulé, peinture à l’huile, verre. 74 x 45,7 x 76,8 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste de Sadie Coles HQ, Londres et © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich

La chaise est ainsi très présente dans le parcours de l’exposition. On découvre la première avec l’installation Sans titre de 2014-2016. Un des pieds s’appuie sur une bouteille d’eau d’Évian. Placée au milieu de la salle, son équilibre inquiète les visiteurs…

Urs Fischer, Invisible Mother, 2015 Laiton moulé, émail, peinture émail en bombe, poussière, poussière de bronze, poussière de cuivre, époxy, laque en bombe, tuyau en acier inoxydable, bassin en acier inoxydable, tube en cuivre, pompe électrique, tuyau en caoutchouc 132,1 × 160 × 170,2 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA. Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Gagosian Gallery © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich
Urs Fischer, Invisible Mother, 2015 Laiton moulé, émail, peinture émail en bombe, poussière, poussière de bronze, poussière de cuivre, époxy, laque en bombe, tuyau en acier inoxydable, bassin en acier inoxydable, tube en cuivre, pompe électrique, tuyau en caoutchouc 132,1 × 160 × 170,2 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA. Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Gagosian Gallery © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich

Dans l’enfilade des appartements historiques, la sculpture-fontaine Invisible Mother (2015), installe un squelette, renversé sur une chaise aspergée par un jet d’eau… Pour Bice Curiger, ce squelette évoque le mannequin de bois articulé et rappelle aussi le facétieux Crâne de squelette fumant une cigarette, peint par Van Gogh, en 1886.

Urs Fischer, Untitled, 2015 - « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles. Chaise trouvée en bois, corde, vis, silicone, pigments, colle silicone / Found wooden chair, string, screws, silicone, pigments, silicone adhesive Collection privée / Private collection
Urs Fischer, Untitled, 2015 – « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles. Chaise trouvée en bois, corde, vis, silicone, pigments, colle silicone / Found wooden chair, string, screws, silicone, pigments, silicone adhesive Collection privée / Private collection

Dans la salle suivante, une chaise récupérée offre à Urs Fischer l’opportunité d’une installation énigmatique avec ses deux mains en silicone, appuyées sur le dossier (Sans titre, 2015).

Urs Fischer, Cat on a Chair, 2016 Bronze moulé, cire, apprêt acrylique, enduit, peinture à l’huile 31,1 × 18,4 × 13,3 cm EA 2 d’une édition de 2 & 2 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste ; Gagosian Gallery ; Sadie Coles HQ, Londres © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich
Urs Fischer, Cat on a Chair, 2016 Bronze moulé, cire, apprêt acrylique, enduit, peinture à l’huile 31,1 × 18,4 × 13,3 cm EA 2 d’une édition de 2 & 2 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste ; Gagosian Gallery ; Sadie Coles HQ, Londres © Urs Fischer Photo: Stefan Altenburger Photography Zürich

Le dernier salon de l’enfilade présente plusieurs sculpteures récentes de petite taille. Parmi celles qui sont posées au sol, on remarque Cat on a Chair, 2016, un petit bronze moulé où la queue du chat joue avec les bois courbés d’une chaise Thonet… Placées devant la fenêtre, la queue de l’animal, la courbure du bois et la volute du décor en fer forgé du balcon se répondent avec bonheur.

Dans cette pièce, face à la cheminée, un inquiétant autoportrait, Drained, 2016, peut faire écho aux multiples autoportraits de Van Gogh… mais aussi avec ceux de tout autre peintre.

Urs Fischer, Drained, 2016 - « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles. Panneau d’aluminium, structure alvéolaire en aramide, colle polyuréthane à deux composants, apprêt époxy à deux composants, rivets en acier galvanisé, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l'acrylique, peinture acrylique, huile
Urs Fischer, Drained, 2016 – « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles. Panneau d’aluminium, structure alvéolaire en aramide, colle polyuréthane à deux composants, apprêt époxy à deux composants, rivets en acier galvanisé, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l’acrylique, peinture acrylique, huile

Dans ce « collage » étrange et peut-être moqueur, l’artiste suisse hybride les techniques numériques et artisanales et mélange les matières. La lecture du cartel donne le vertige : Panneau d’aluminium, structure alvéolaire en aramide, colle polyuréthane à deux composants, apprêt époxy à deux composants, rivets en acier galvanisé, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l’acrylique, peinture acrylique, huile !

L’effet produit est réellement surprenant. On avait pu l’éprouver, juste avant la montée d’escalier, avec un énigmatique tableau, Forget-me-not, 2015. Mais c’est surtout dans la salle qui regroupe trois panneaux ( Iodine, 2016, Barium, 2016 et Cerium, 2016) que l’effet est le plus saisissant.

Dans ces trois « autoportraits », l’épaisseur de la matière picturale et attire accroche le regard… Dès que l’on s’approche, l’effet de trompe-l’œil se dissipe et laisse le visiteur stupéfait. Bien entendu, on pourra voir dans Iodine, 2016 un écho à célébrissime Autoportrait à l’oreille bandée (ou L’Homme à la pipe), peint par Vincent à Arles en janvier 1889.

Papier peint et petits cochons…

La fin du parcours reprend largement l’exposition « Urs Fischer: Misunderstandings in the Quest for the Universal », présentée à la Gagosian Gallery, New York en mars et avril 2016.

Urs Fischer - « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles
Urs Fischer – « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles

Très joliment, Bice Curigier écrite dans le texte qu’elle signe pour le catalogue : « Le gris des murs, dans les salles historiques de la Fondation [laissé par la très belle exposition de Glenn Brown, cet été], se détache soudain en milliers de coups de pinceau explorant minutieusement la teinte. Peu après, ces traits explosent à leur tour pour devenir multicolores, recréant un ravissement digne d’une chambre d’enfant. Sur ces murs parsemés de traces de mains colorées apparaissent en frise de joyeux personnages de dessins animés comme dans lineofpigs (rangée de cochons) de 2016 ».

Cette dernière partie de l’exposition nous a moins convaincue… L’effet visuel du papier peint (Mixing Palette #1 et #2, 2016 ; Grayscale Mixing Palette #1 et #2, 2016) s’évanouit très rapidement. Les personnages assez anecdotiques s’y perdent un peu… Faut-il comprendre la présence du micro-onde et du bacon (Change your mind, 2015) comme une illustration de l’avenir qui attend les petits cochons ou comme une invitation à partager The Last Supper ?

Les souris et le fromage de mousecheesecircle, 2016 sont-ils un clin d’œil à la gastronomie suisse où une réflexion sur les limites floues entre numérique et analogique ? À moins que ces « Malentendus dans la quête de l’universel » expriment plus simplement le désir d’Urs Fischer de renouer avec l’innocence de l’enfance ?

Bice Curiger connaît l’artiste suisse depuis 1997. Elle a collaboré avec lui pour son exposition au New Museum de New York, en 2009, puis lors de la Biennale de Venise, en 2011 et pour l’exposition collective « Defting Barock », à Zurich, en 2012.
Avec pertinence, elle définit son exposition à la Fondation Vincent van Gogh comme « un “all-over” spatial, une sensation de papillotement qui nous saisit lorsqu’on pénètre ces palpitants espaces conçus par Urs Fischer ».
Évidemment, une visite de « Mon cher… » s’impose avant la fin janvier 2017.

Urs Fischer - Urs Fischer - « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles
Urs Fischer – Urs Fischer – « Mon cher… » à la Fondation Vincent van Gogh Arles

En savoir plus :
Sur le site de la Fondation Vincent van Gogh Arles
Sur la page Facebook de la Fondation Vincent van Gogh Arles
Sur le site d’Urs Fischer
Urs Fischer sur le site de la galerie Gagosian

À propos de « Mon cher… ». Présentation par la Fondation Vincent van Gogh Arles

« Mon cher… » se tiendra à la Fondation Vincent van Gogh Arles pendant quatre mois et entend offrir un panorama des productions d’Urs Fischer postérieures à 2013 : sculptures monumentales et de format plus intime, peintures sur aluminium et papiers peints, le tout à travers un parcours dynamique impliquant le mouvement du visiteur.

Urs Fischer, Melodrama 2013, Plâtre, apprêt à l’huile, acier inoxydable, fil de nylon Dimensions variables : 3000 gouttes de pluie, chacune jusque 16,5 x 5,7 x 6 cm Maja Hoffmann / LUMA Foundation Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres Crédit photo : Mats Nordman
Urs Fischer, Melodrama 2013, Plâtre, apprêt à l’huile, acier inoxydable, fil de nylon Dimensions variables : 3000 gouttes de pluie, chacune jusque 16,5 x 5,7 x 6 cm Maja Hoffmann / LUMA Foundation Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres Crédit photo : Mats Nordman

Au-delà de la puissance d’organisation de l’espace, que démontre entre autres le déluge de gouttes d’eau colorées et surdimensionnées de l’installation Melodrama (2013) sur plus de 400 m2, la singularité de cette exposition tient au simple fait que la totalité des espaces du musée sont consacrés à ce seul artiste. Généreuses, ironiques et suscitant l’empathie, ses œuvres ponctuent un parcours qui se propage jusqu’aux salles les plus atypiques, tels la cour extérieure ou un cabinet orné de boiseries. Parmi elles figure aussi Sous-bois (1889) de Vincent van Gogh, le prêt annuel en provenance du musée Van Gogh d’Amsterdam.

Le travail d’Urs Fischer est marqué par une extraordinaire tension entre, d’une part, les notions d’individualité et de collectif, et, d’autre part, l’évocation de formats sculpturaux traditionnels et la production d’œuvres en deux dimensions à l’ère postdigitale. Cette oscillation entre deux pôles entraîne parfois leur imbrication, si bien que le simulacre visuel, normalement associé à la photographie, affecte aussi le médium de la sculpture.

Urs Fischer, Untitled 2015 Chaise trouvée en bois, corde, vis, silicone, pigments, colle silicone 104,8 × 56,5 × 71,1 cm Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste Crédit photo : Mats Nordman
Urs Fischer, Untitled 2015 Chaise trouvée en bois, corde, vis, silicone, pigments, colle silicone 104,8 × 56,5 × 71,1 cm Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste Crédit photo : Mats Nordman

Devant last supper (2014), le doute s’installe quant au matériau utilisé. L’aspect de cette sculpture de plus de sept mètres de long est propre au modelage de l’argile ; il révèle l’effort collectif sollicité pour façonner l’œuvre initiale, présentée au musée d’Art contemporain de Los Angeles (MOCA) en 2013. L’argile est devenue bronze dans un processus d’anoblissement qui a cependant gardé les traces de la genèse de la sculpture et les empreintes de chaque participant.

Urs Fischer, 2 2014 Bronze moulé, peinture à l’huile, feuilles de palladium, bol d’Arménie, apprêt acrylique, enduit à base de craie, colle de peau de lapin 71,1 × 198,1 × 144,8 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres Crédit photo : Mats Nordman
Urs Fischer, 2 2014 Bronze moulé, peinture à l’huile, feuilles de palladium, bol d’Arménie, apprêt acrylique, enduit à base de craie, colle de peau de lapin 71,1 × 198,1 × 144,8 cm EA d’une édition de 2 & 1 EA Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de Sadie Coles HQ, Londres Crédit photo : Mats Nordman

Les mêmes glissements semblent s’opérer pour les huit sculptures en bronze moulé de femmes allongées. Ne convoquent-elles pas l’idée d’un atelier collectif de modelage d’une académie des beaux-arts qu’auraient délaissé modèles et étudiants ? De vivant, il ne resterait alors que la production qui semble s’éprouver encore, le non finito d’œuvres ancrées dans le passé et tournées vers un devenir. Face à la « subjectivité collective » insufflée dans ces sculptures marquées par une matérialité sensuelle et archaïque, répondent des images placées sous les signes de l’hyperréalité et de l’autoportrait.

Urs Fischer, Barium 2016 Panneau d’aluminium, structure alvéolaire en aramide, colle polyuréthane à deux composants, apprêt époxy à deux composants, rivets en acier galvanisé, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium acrylique pour sérigraphie, peinture acrylique, huile 203,2 × 152,4 × 2,2 cm Édition unique Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste Crédit photo : Mats Nordman
Urs Fischer, Barium 2016 Panneau d’aluminium, structure alvéolaire en aramide, colle polyuréthane à deux composants, apprêt époxy à deux composants, rivets en acier galvanisé, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium acrylique pour sérigraphie, peinture acrylique, huile 203,2 × 152,4 × 2,2 cm Édition unique Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste Crédit photo : Mats Nordman

Ces tableaux sur aluminium, dont Barium (2016), représentent une partie du corps de l’artiste (oreille ou œil) encerclée par des couches de peinture de couleur sérigraphiées à l’effet trompeur d’empâtement.

La référence à Van Gogh se tisse, non seulement à travers le titre de l’exposition, mais aussi au gré des œuvres exposées, convoquant tantôt l’émotion du relief, l’affirmation de la couleur hautement étudiée ou l’ambivalence contenue dans l’autoportrait.

À propos de Urs Fischer

Urs Fischer est un artiste suisse né à Zurich en 1973. Il vit et travaille à New York depuis 2004.

Il a étudié la photographie à Zurich, à la Schule für Gestaltung, puis à Rotterdam ; un apprentissage qui a forgé son « goût pour les images et leur valeur intrinsèque ¹ ».

Selon l’artiste, les images sont regardées pour leur puissance associative, leur charge émotionnelle et leur illusion affirmée, autant de propriétés qui s’appliquent également à ses objets tridimensionnels. Pensant résolument en sculpteur, il alterne photographie, sculpture, peinture et installation. À ce panel de possibilités plastiques se greffent les projets qu’il conduit avec sa maison d’édition Kiito-San.

Urs Fischer, lodine 2016 Panneau d’aluminium, époxy, mousse de polyuréthane renforcée, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l’acrylique, peinture acrylique, huile 215,9 x 172,7 x 2,5 cm Édition unique Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste
Urs Fischer, lodine 2016 Panneau d’aluminium, époxy, mousse de polyuréthane renforcée, apprêt acrylique, enduit, encre acrylique, médium sérigraphique à l’acrylique, peinture acrylique, huile 215,9 x 172,7 x 2,5 cm Édition unique Collection privée Avec l’aimable autorisation de l’artiste

L’espace d’exposition est modelé et appréhendé comme un lieu de production investi de ses recherches formelles expressives oscillant entre le ludique et le dramatique. Loin de faire cavalier seul, l’artiste organise parfois des situations participatives au cœur desquelles les visiteurs sont invités à contribuer à la réalisation de sculptures à partir de blocs d’argile. La dernière production collective en date excède les dimensions des installations précédentes : l’artiste a transformé les espaces extérieurs de l’institution moscovite Garage Museum of Contemporary Art en atelier de poterie géant.

Outre l’utilisation de matériaux naturels facilement dégradables, telle l’argile, Urs Fischer a recours à des techniques innovantes, qui témoignent également de sa soif d’expérimentation. Prolifique, il a su captiver la scène internationale. Il expose dans de nombreux pays, et son travail est présenté dans les plus grandes collections publiques et privées.

1 Michele Robecchi in Madame Fisscher (catalogue d’exposition), 2012.

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