Des sneakers comme Jay-Z – portraits et paroles d’exilés aux Rencontres Arles 2018

Jusqu’au 23 septembre, l’Association du Méjan présente « Des sneakers comme Jay-Z » au Magasin Électrique. Cette exposition rassemble une cinquantaine de portraits d’exilés réalisés « à la chambre » par Frédéric Delangle et Ambroise Tézenas, au centre d’accueil Emmaüs Solidarité de la porte de la Chapelle.

Des sneakers comme Jay-Z - portraits et paroles d’exilés aux Rencontres Arles 2018
Des sneakers comme Jay-Z – portraits et paroles d’exilés aux Rencontres Arles 2018

De toute évidence et à raison, cette exposition fait l’unanimité des visiteurs comme de la presse. On évitera donc de reproduire ici, ce qui a déjà été largement commenté.

Sur les circonstances et les conditions dans lesquelles « Des sneakers comme Jay-Z » a été initié, puis s’est construit, on renvoie à la vidéo que Sylvain Martin a réalisée dans le cadre du projet sur le travail des photographes et des bénévoles.

On regardera également avec intérêt le reportage diffusé par Arte Info.

Et surtout, on ne manquera pas d’écouter l’entretien de Brigitte Patient avec Frédéric Delangle et Ambroise Tézenas, enregistré dans la cour Fanton à Arles pour « Regarder voir » sur France Inter.

Frédéric Delangle et Ambroise Tézenas, dans la cour Fanton à Arles pour « Regarder voir »

 

« Des sneakers comme Jay-Z » ne doit pas être réduit à une exposition photographique. Imaginé et dirigé par Valérie Larrondo, bénévole chez Emmaüs Solidarité, c’est avant tout une série d’échanges avec ces exilés à propos des vêtements qu’ils choisissent et sur ce qu’ils représentent.

Marion Perin, Vanessa François, Sabrina Ponti et Valérie Larrondo
Marion Perin, Vanessa François, Sabrina Ponti et Valérie Larrondo © Delangle-Tézenas

Leurs interviews, pièce maîtresse du projet, ont été conduites par Marion Perin, Vanessa François, Sabrina Ponti et Valérie Larrondo. Ensuite, Frédéric Delangle et Ambroise Tézenas, ont réalisé leurs portraits « à la chambre ».

Frédéric Delangle et Ambroise Tézenas avec Ibrahim © Delangle-Tézenas

La scénographie sobre et efficace a été conçue par l’agence PAM (Valerie-Anne Le Meur et Elizabeth Hy). Les tirages d’excellente qualité sont accrochés sans protection. Ainsi, ils offrent une confrontation directe sans fard et sans reflets du regardeur avec les images « grandeur nature » de ces 46 réfugiés…

Un catalogue de 60 pages au format tabloïd est vendu 10 € au profit d’Emmaüs Solidarité.

Si ces rencontres permettent de « comprendre à quel point le vêtement est tout sauf anecdotique dans leur vie », si elles bousculent une fois de plus notre regard sur ces hommes, elles peuvent aussi nous interroger sur notre propre vestiaire… En sortant de « Des sneakers comme Jay-Z », on pose inévitablement un œil légèrement différent sur le costume des visiteurs que l’on croise aux Ateliers et dans Arles…

« Des sneakers comme Jay-Z » sera présentée à Nantes du 14 septembre au 14 octobre 2018, dans le cadre de la Quinzaine photographique Nantaise.

Ci-dessous, une sélection de portraits et de textes exposés dans « Des sneakers comme Jay-Z ».

En savoir plus :
Sur le site des Rencontres d’Arles
Suivre l’actualité des Rencontres d’Arles sur Facebook, Twitter et InstagramSur le site de l’Association du Méjan
Sur les sites de Frédéric Delangle et Ambroise Tézenas
Suivre l’actualité du projet « Des sneakers comme Jay-Z » sur Facebook et Instagram

Des sneakers comme Jay-Z- Aboubacar ©Delangle-Tézenas
Des sneakers comme Jay-Z- Aboubacar ©Delangle-Tézenas

ABOUBACAR

« J’ai 21 ans. Je viens de Guinée-Conakry.

Je n’ai plus de vêtements, car ce matin, la police a mis du gaz dans ma tente puis l’a lacérée. Je me suis enfui et je n’ai rien retrouvé à mon retour. Là, j’ai choisi un pantalon beige-kaki qui est ma couleur préférée. C’est une couleur unique. Être à la mode, c’est attirer les gens autour de vous et donner une bonne image de vous. La mode traditionnelle en Guinée est très colorée, avec des couleurs électriques dans les motifs. La chemise n’est pas notre culture. Il y a par exemple les sarouels et les tuniques.

Mais la mode traditionnelle en Guinée est plutôt pour les anciens. Faut pas se mentir, je ne suis pas tellement dans les habits traditionnels. Il y a des occasions où il faut porter ça : des fêtes, et ça fait du bien quand même. Mais ici, nous voulons vivre comme tout le monde. Mon idée, ce n’est pas d’offenser quelqu’un, je suis venu pour chercher à être dans la norme, je ne veux pas de problème. C’est pourquoi j’ai dit que j’avais peur des images. »

Des sneakers comme Jay-Z- Ahmad ©Delangle-Tézenas
Des sneakers comme Jay-Z- Ahmad ©Delangle-Tézenas

AHMAD

« J’ai 19 ans. Je viens du Soudan.

J’ai choisi ce tee-shirt, car il est très beau et en plus, c’est ma taille.
Il me va comme si c’était le mien.
Il va bien avec mon turban. Au Soudan, dans ma région, tous les hommes portent un turban sur la tête. Ce n’est pas toujours le cas dans d’autres régions.
Celui-ci, je l’ai eu à Istanbul.
Je peux porter du noir ou du bleu, mais je préfère ne pas porter de rouge, c’est moche. »

Des sneakers comme Jay-Z-Bashir ©Delangle-Tézenas
Des sneakers comme Jay-Z-Bashir ©Delangle-Tézenas

BASHIR

« J’ai 20 ans. Je viens de Somalie.

J’aime ces habits… j’aime m’habiller comme un Américain !
En Somalie, on ne s’habille pas aussi serré, vous savez, on met des habits plus larges.
Ma famille n’aimerait pas trop me voir habillé comme ça.
Ils trouveraient ça trop près du corps.
En France, je suis libre de m’habiller comme je veux. »

Des sneakers comme Jay-Z-Mohammed ©Delangle-Tézenas
Des sneakers comme Jay-Z-Mohammed ©Delangle-Tézenas

MOHAMMED

« J’ai 18 ans et je suis afghan.
J’ai choisi ce sweat car dehors il fait froid. Il y a une capuche pour se protéger.
Et c’est joli aussi. C’est assorti à ma robe, vous voyez.
Ma robe, elle, vient de mon pays. J’ai passé deux ans en Belgique et ma maman a confié cette robe bleue à un ami qui m’a retrouvé en Belgique et me l’a apportée.
J’ai aussi un jean et un pull, mais ils sont sales, là. Je n’ai que deux tenues.
Ma robe et mon jean européen.
Quand je mets cette tenue à Paris, je n’aime pas car on me regarde, tout le monde me regarde, ils pensent que je suis un terroriste.
Je ne veux pas qu’on me regarde.
Une fille, une fois, dans la rue, m’a dit :
“C’est très joli, cette robe.”
Je lui ai dit : “Merci.” »

Des sneakers comme Jay-Z-Mustafa ©Delangle-Tézenas
Des sneakers comme Jay-Z-Mustafa ©Delangle-Tézenas

MUSTAFA

« J’ai 24 ans et je viens du Soudan.
J’aime beaucoup ce sweat-shirt “Romantic”.
Le bleu foncé comme ça est ma couleur préférée.
À Paris, la mode est beaucoup plus belle qu’au Soudan. »

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