Jean-Adrien Arzilier – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Jusqu’au 21 décembre 2019, Vidéochroniques présente une remarquable proposition de Jean-Adrien Arzilier. « Créoles alliées » expose un peu moins d’une vingtaine d’œuvres produites entre 2004 et 2019.

Jean-Adrien Arzilier - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Mise en espace avec élégance et de minutie, « Créoles alliées » montre un ensemble de pièces où Jean-Adrien Arzilier détourne, réinterprète, mélange, associe, métisse et hybride des objets avec poésie et un humour décalé, tendre et subtil. Au fil de la déambulation, on y discerne de multiples références à la littérature (Hergé, Lewis Carrol, Jules Verne, H. P. Lovecraft…), au cinéma (Fitzcarraldo…), à la cartographie, à l’ethnographie, parfois à l’histoire de l’art ou à la publicité et quelques interrogations sur l’exposition et la collection…

Jean-Adrien Arzilier - Diogène le Cinétique, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Diogène le Cinétique, 2019 – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Comme le souligne Édouard Monnet, commissaire de l’exposition et directeur de Vidéochroniques dans son texte de présentation, le titre « Créoles alliées » peut laisser le visiteur « perplexe, si ce n’est démuni »…

Comment deviner qu’il s’agit d’une anagramme de « L’Oreille cassée », un album de Tintin « dont l’artiste garde un souvenir attendri » ?
Les plus astucieux l’auront peut-être deviné après la découverte dans une niche discrète du Boustrophédon, un assemblage des versions française et arabe de bande dessinée d’Hergé…

Jean-Adrien Arzilier - Boustrophédon, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Boustrophédon, 2019 – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Ces « Créoles alliées » ont inspiré au commissaire quelques interprétations où il convoque naturellement Édouard Glissant. On laisse au lecteur le soin de lire ce texte reproduit ci-dessous.
Faisant « l’hypothèse que la pratique de Jean-Adrien s’inscrit manifestement dans une filiation conceptuelle », Édouard Monnet échafaude aussi une éventuelle « lignée réunissant Jean-Adrien Arzilier (en dernier lieu), Rodney Graham et deux autres sources fondatrices ou voisines de la pratique de ce dernier, Bas Jan Ader et Marcel Broodthaers »…

Après « L’horizon des particules », la très belle proposition de Pierre Malphettes il y a quelques mois, Vidéochroniques récidive avec cet incontournable projet de Jean-Adrien Arzilier et l’irréprochable accrochage qu’il a imaginé pour « Créoles alliées ».

Jean-Adrien Arzilier - Montage en cours de Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille. Photo Vidéochroniques
Jean-Adrien Arzilier – Montage en cours de Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille. Photo Vidéochroniques

Merci à Lucie Tournayre pour son accueil chaleureux et les informations riches et précises qu’elle nous a données sur le travail de l’artiste.

À lire, ci-dessous, un compte rendu de visite photographique accompagné de textes de l’artiste extraits du site documentsdartistes.org ou du dossier de presse publié par le Frac Occitanie-Montpellier à l’occasion de l’exposition « Mastic » à Villeneuve lez Avignon, au printemps dernier.
On reproduit également la présentation de « Créoles alliées » que signe Édouard Monnet, commissaire de l’exposition.

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Dans la grande salle, l’accrochage s’articule autour de Diogène le Cinétique, une pièce récente (2019) où trois fûts font du hoola-hoop…

Jean-Adrien Arzilier - Diogène le Cinétique, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Diogène le Cinétique, 2019. Ensemble de trois fûts faisant du hoola-hoop, technique mixte, env. 120 x 90 x 90 cm chacun – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Après la cuve, le fût est l’atelier scellé des fermentations. Ce contenant est en lui seul un outil de dégradation et de transformation chimique, celui qui va élever la forme des breuvages. Ce bidon est le bedon alchimique. Jean-Adrien Arzilier renvoie ces mouvements internes invisibles aux mouvements “ivresques” de la danse du ventre notamment opérée dans la pratique du hoola-hoop. (extrait du dossier de presse de l’exposition « Mastic » à Villeneuve lez Avignon)

À gauche de l’entrée, on découvre Bbbeeettttttyyy, 2013, un collage magistral prêté par le Frac Occitanie-Montpellier… Regard moqueur et décalé sur les services de presse et les expositions.

Parfois, comme c’est le cas pour Bbbeeettttttyyy et Kya/Kaak/Ayk, la manipulation plastique de l’œuvre de Jean-Adrien Arzilier révèle des étrangetés et des coïncidences. Vraisemblablement le service de communication de Gerard Richter pour son exposition au Centre Pompidou de 2012 a fourni le même visuel à tous les magazines d’art pour leurs couvertures. Aussi dans les débits de presse la même image apparaissait démultipliée sur les présentoirs à revues. Le système de diffusion avait alors, sur la peinture intitulée Betty, un puissant impact déformant, tant optiquement que sensationnellement. Jean-Adrien Arzilier, dans le tressage de fines tranches découpées dans les revues du mois de juin tend à renouer avec cette impression tenace. Par une déformation toute analogique, la nouvelle revue réassemblée est développée par trois en sa hauteur. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Ce premier collage est suivi par deux autres assemblages réalisés pour répondre à la demande d’Alexandre Giroux d’exposer sur le toit de sa voiture personnelle, une singulière galerie d’art temporaire mobile… S’ils rejouent la pratique du découpage et du collage utilisée pour le visuel de l’exposition Richter à Pompidou, ici les « dimensions » du projet sont plus ambitieuses pour une exposition qui ne l’était pas moins !

Jean-Adrien Arzilier - Kya-Kaak-Ayk, 2012 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Kya-Kaak-Ayk, 2012. Collage de tirages numériques, 3 éléments, 20 x 20 cm chaque – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier - Kya-Kaak-Ayk, 2012 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Kya-Kaak-Ayk, 2012. Deux kayaks et résine assemblés en trois embarcations, 204 x 47 x 62 cm chacune – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Lorsque le galeriste et plasticien Alexandre Giroux propose à Jean-Adrien Arzilier d’investir le toit de sa voiture personnelle également galerie d’art temporaire mobile, ce dernier, à cette même période, ne parvient pas à se départir d’une impression formelle tenace, laissé par la découverte d’un énorme break Ford blanc transportant trois kayak. Le hasard, d’une congruence merveilleuse, fait que ce modèle de gros véhicule est au centimètre près d’une proportion au tiers plus grande que la petite Fiat Panda. Le sculpteur compose alors pour la surmonter l’assemblage de trois kayaks en résine qu’il produit des tranches débité de deux canots seulement. Il conserve ainsi le même rapport de proportion et restitue le sentiment esthétique initial. La différence tient à ce que cette fois la forme des embarcations est brisées dans leurs lignes aérodynamiques et que cet écrêtage témoigne de l’intervention du sculpteur. L’alternance des pièces décalées des bateaux originaux ne manque pas de rappeler les motifs de tressages amérindiens. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Jean-Adrien Arzilier - Diogène le Cinétique, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Diogène le Cinétique, 2019 – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

En passant avec précaution à l’arrière de Diogène le Cinétique, on rencontre quatre panneaux de plâtre où sont incrustés des bâtons de craie… Concrétion, Série n°1, 2015 est pièce de la collection du Frac Occitanie-Montpellier où Jean-Adrien Arzilier joue avec une certaine espièglerie et un peu d’aléatoire autour de références à Malevitch ou à Van Doesburg…

Jean-Adrien Arzilier - Concrétion, 2015 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Concrétion, 2015. Bâtonnets de craie et plâtre, 40 x 60 cm, série n°1 – 12 pièces numérotées
Collection du Fond régional d’art contemporain Occitanie Montpellier – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Dans sa série Concrétion, Jean-Adrien Arzilier jongle avec les références, les définitions et les matériaux pour interroger la matérialité des images abstraites. C’est au moyen d’éléments et d’outils issus du volume qu’il construit l’image. Des bâtonnés de craies aux couleurs variées sont incrustées de façon aléatoire dans une surface plane de plâtre. Ces deux matériaux sédimentaires, de densité et granulosité identique, se confondent alors que les notes de couleurs dessinent un motif géométrique acidulé et rythmique qui évoque tant les compositions suprématistes de Kasimir Malevitch, les propositions concrètes de Théo van Doesburg que les motifs ornementaux populaires dans les années 80 et 90.

A l’instar des premiers lavis ouvrant à l’abstracion de Victor Hugo et Alexander Cozens, la composition est abandonnée à l’aléatoire. L’expression composition d’ailleurs si usitée en abstraction sera ici remplacée par concrétion. Pour les phénoménologues Sartre et Merleau Ponty le terme de concrétion définit la formation d’une image ou représentation composée par agglomération d’éléments simples. C’est d’ailleurs cet état primordial de l’imagination qui apparait ici : une image indéfinie, exempte de sujet, émergeant à la surface de l’objet, de son hétérogénéité élémentaire. Par déplacement dans le voisinage étymologique des matériaux employés c’est toute la création plastique qui est ici célébrée. On rapprochera volontiers le ciment qu’est le plâtre, concrete et plaster en anglais, aux phénomènes de concrétion et aux questions plastiques, ainsi que la craie, creta en latin désignant aussi une argile, à la création. Tout comme les fossiles du crétacé (âge crayeux) devenus roche dans la roche, qui se révèlent par l’érosion ou la taille, l’image des concrétions se révèle à la surface alors qu’elle est potentiellement multiple dans le corps de l’objet qui la supporte. Alors que Cozens dans ces Blot drawing usait d’un hasard tachiste pour renouveler les formes rocheuses de ces composition paysagiste, ici, Jean-Adrien Arzilier, par un procédé analogue, présente une géologie tout aussi inventive.
(Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

De l’autre côté de cette cimaise, Jean-Adrien Arzilier a choisi d’associer deux pièces assez disparates.

La première est issue d’une résidence de l’artiste dans un lycée professionnel de charpente
marine. Autour du travail des demi-coques, un des premiers exercices demandé aux élèves, de recherches sur internet et de la présentation un peu surannée de ces objets chez les amateurs de bateaux, Jean-Adrien Arzilier présente une étonnante série de carénages de motos…
Au sol, il a installé en équilibre la roue d’une diligence déformée par la vitesse qui évoque quelques images des futuristes italiens…

Jean-Adrien Arzilier - Des Mi-Coques, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Des Mi-Coques, 2019. Série de carénages de motocycles modifiés, 40 x 30 x 4 cm chacun – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

L’origine de cette production est issue de deux rencontres. En premier lieu, la rencontre entre l’artiste et des élèves du lycée professionnel de charpente marine, a révélé à celui-ci l’intérêt du travail des demi-coques. Si les modèles demi-blocs sont aujourd’hui connus comme de désuets éléments décoratifs, ce sont les premiers exercices de ces élèves et de véritables outils de travail. Ces esquisses en volume permettent aux charpentiers et aux architectes de concevoir des bateaux et surtout de présenter aux commanditaires exigeants, une lecture précise des futures carènes et donc d’extrapoler le comportement de l’embarcation en mer. C’est un prototype à destination de projection et d’échange technique. En second lieu, la recherche d’image de documentation sur internet, a provoqué une étonnante rencontre. La désignation demi-coque, mêlait toutes les images de prototypes de carènes navales et aussi les pièces détachées de coques de carénages de motocyclettes. Les analogies se sont présentées comme évidentes. Toutes deux s’inscrivent dans une symétrie longitudinale, et un modelé emprunté aux fluides, travail attentif de l’hydro et de l’aérodynamisme. Si l’une peut glisser, par ces gracieuses formes racées, dans le champ ornemental, pourquoi pas l’autre ? (extrait du dossier de presse de l’exposition « Mastic » à Villeneuve lez Avignon)

Jean-Adrien Arzilier - Diligence, 2011 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Diligence, 2011. Bois de sapin, 143 x 64 x 26 cm – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Avec le désir de s’approprier les rudiments techniques se perdant peu à peu tels que l’ouvrage du charron, Jean-Adrien Arzilier réengage la responsabilité du fait-main. Il résiste à la dynamique de la vitesse, toute puissante et totalitaire en nos temps. Aussi il tend le lien entre le véhicule d’alors et le bolide d’aujourd’hui. La roue de chariot, bâtie avec un souci démesuré d’aérodynamisme, diligence, si elle ne peut plus remplir sa fonction première renvoie aux considérations métaphysique de Gaston de Pawlowsky dans La diligence innombrable, essai de 1912 sur la quatrième dimension, dans lequel il est donné à penser les déformations des corps jusqu’à l’omniprésence, d’un accroissement de la vitesse vers l’infini. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Dans la fosse, on distingue la lumière blafarde d’un anneau lumineux… Arrivé au bas de l’escalier, on découvre le rôle essentiel des deux icônes dans l’alimentation de cette auréole !

Jean-Adrien Arzilier - Sans titre (Icônes), 2005 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Sans titre (Icônes), 2005. Câbles de démarrage, icônes, circline fluorescente, dimensions variables – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Dans toutes les civilisations l’or est attaché à la représentation du spirituel. Dans l’iconographie chrétienne, et en particulier dans l’enluminure (étymologiquement : mise en lumière), la dorure à l’or figure l’esprit divin. Les qualités réfléchissante et inoxydable (propriétés exceptionnelle avant les âges industriels) de ce matériau rare suggèrent l’illumination et l’éternel. De nos jours l’or est utilisé dans l’industrie pour ces qualités inégalées de superconduction. L’électricité circule presque sans perte dans des minceurs microscopique de ce minerais. Aussi est-il utilisé dans les circuits imprimés les plus exigeants.

Dans ces productions in situ, Jean-Adrien Arzilier réfère de ces magies. Il produit de sa main des circuits imprimés macroscopiques, en dorure à la feuille d’or. Ce qui peut alors être perçu comme de simples arabesques d’ornement, s’avère être le chemin électrique de la lumière même. Ces essais l’ont poussé à jouer de la conduction des images préexistantes. Est alors apparu un ready-made inversé ou réciproque sous la forme de deux icônes orthodoxes vecteurs de leur propre mise en lumière. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

À droite de l’entrée, l’image rétroéclairée d’un énigmatique métronome attire le regard… Il évoque évidement lIndestructible objet de Man Ray… Mais quelle version ? Celle du témoin silencieux qui regarde l’artiste dans son atelier ? Celle qui attend le coup de marteau qui détruira l’image de celle qui a été aimée… Peut-être que cet œil observe simplement l’étrange comportement des visiteurs…

Le dernier mur de cette grande salle est couvert de prises d’escalade dans lesquelles Jean-Adrien Arzilier a planté des bonsaïs… Modèle réduit d’une falaise pour des arbres artificiellement nains ?

Jean-Adrien Arzilier - Mont-shan-yama 2008 - 2011 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Mont-shan-yama 2008 – 2011. Prises d’escalade, bonsaïs, dimensions variables – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

La petite salle qui ouvre sur la droite, face à l’accueil, rassemble des œuvres où il est question d’aventures ethnographiques, cartographiques et littéraires…

Jean-Adrien Arzilier - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Tout commence par L’Ondoyant, une étrange pirogue réalisée lors d’une résidence dans un lycée de Sète… et se termine sur le fleuve Badurayal, dans une autre pirogue, en compagnie de Tintin et Milou, accompagnés de Caraco.
Entre temps, le visiteur aura navigué sur le Molly Aïda, l’invraisemblable bateau à vapeur de Fitzcarraldo qui passe des eaux du Pachitéa à celles de l’Uyacali.
Le voyage traversera aussi le lac Pontchartrain, la baie de Chesapeake, la mer orientale de Chine et la baie de Hangzhou… sans oublier le Point Nemo ou pôle maritime d’inaccessibilité, que la géographie place dans le Pacifique sud, endroit le plus éloigné de toute terre émergée et cimetière de matériel astronautique… La première terre habitée est à 2 700 kilomètres… Toutefois, les humains les plus proches du pôle maritime d’inaccessibilité sont régulièrement les occupants de la Station spatiale internationale (entre 330 et 410 km environ)…

Jean-Adrien Arzilier - Sans titre, 2004 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Sans titre, 2004 – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Dans une petite niche, on découvre aussi une Boîte d’allumettes sculptées et peintes par l’artiste en 2004 à l’École Supérieure des Beaux-Arts de Nîmes.

Pour L’Ondoyant, se contraignant à produire une pirogue avec pour seul outil une scie sauteuse, l’artiste s’est doté d’un tronc d’arbre complet après son premier débit en scierie. Il en résulte un volume de bois hybride, oscillant, entre une section de bois brut, un amas de planches et une embarcation tracée à main levée. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Jean-Adrien Arzilier - La boucle de Molly Aïda, 2016 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – La boucle de Molly Aïda, 2016. Tréteaux métalliques, tuyau d’arrosage et cuivre, 370 x 240 x 75 cm – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Molly Aïda est le nom du bateau à vapeur de Fitzcarraldo dans le film éponyme de Werner Herzog. Notre conquistador de l’inutile, ayant pour objectif de financer la construction d’un opéra à Iquitos en forêt amazonienne péruvienne achète une plantation d’Hévéa sur les rives de l’Uyacali. Pour aller exploiter son caoutchouc, il entreprend un incroyable périple par chemin détourné sur l’Amazone, le Pachitéa et l’Uyacali.

Jean-Adrien Arzilier - La Boucle de Molly-Aïda, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – La Boucle de Molly-Aïda, 2019. Aquarelle, 50 x 70 cm – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

L’audacieux aventurier ira jusqu’à contourner les traditionnelles voies fluviales pour faire franchir à son bateau une montagne. S’il est inhabituel d’envisager le fret fluvial de caoutchouc dans un parcours en trois dimension, il est tout aussi surprenant de considérer le dessin d’un tuyau de caoutchouc en élévation topographique. Traçant une ligne dans l’espace, l’œuvre ici présentée figure en volume le voyage de Fitzcarraldo. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Jean-Adrien Arzilier - Roadmaps, 2005- 2013 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Roadmaps, 2005- 2013. Cartes éditées par Unun
Éditions à 5 exemplaires chacune, numérotées et signées – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Les instruments de représentation comme la cartographie fascinent Jean-Adrien Arzilier au plus haut point car ils témoignent des défaillances à figurer le réel de façon satisfaisante en s’en remettant aux doctrines synthétiques de la technique. La topographie est la mise en plan d’une perspective distanciée et céleste. Pourtant ancrées au monde, les cartes offrent des images abstraites qui surpassent largement la lecture que l’on peut en avoir techniquement. La plus absurde carte est aussi, conceptuellement parlant, la plus exacte. L’IGN a édité, en 1969, une carte, figurant une partie du désert de Mauritanie qui ne présente aucun signe cartographique tant l’étendue représentée est désertique. C’est avec amusement que l’on peut constater qu’elle est identique à la carte achetée par le capitaine dans La Chasse au Snark de Lewis Caroll. Les Roadmaps de Jean-Adrien Arzilier invoquent cette volonté de produire des vues qui dépassent le sujet qu’elles schématisent. Il s’agit de cartes routières des plus grands ponts du monde. Le cadrage et l’échelle empruntée à la carte de randonnée fait que les côtes sortent du champ. Le sujet de ces cartes ne se définit alors pas par l’intérêt fonctionnel mais par une projection imagée à l’esthétique minimale. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Jean-Adrien Arzilier - Environs du pôle maritime d’inaccessibilité (points Nemo), 2011 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Environs du pôle maritime d’inaccessibilité (points Nemo), 2011. Bois divers, mappemondes, Ø 24 cm chacun – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

L’ensemble des Environs du pôle maritime d’inaccessibilité constitue une collection réunie par l’artiste de la partie maritime la plus étendue prélevée sur des globes terrestres variés. Sur l’objet, alors qu’il devrait logiquement s’agir d’une zone vide, y est fréquemment imprimé le cartouche techniques et diverses illustrations ornementales. Le cadrage est cela même qui définit les travaux issus de relectures cartographiques de Jean-Adrien Arzilier. Ils livrent des points d’observation sensibles qu’il rend particuliers à la façon de hublots dans un paysage global.

Le point Nemo est le nom donné au pôle maritime d’inaccessibilité, c’est à dire le point de l’océan le plus éloigné de toute terre émergée. Sachant que la station spatiale internationale est en orbite entre 330 et 410 km au-dessus de la surface du globe (distance nettement inférieure à celle entre le point Nemo et la première terre habitée), et que peu de routes maritimes passent par ce secteur du pacifique, les humains qui passent le plus près du pôle maritime d’inaccessibilité sont probablement les astronautes, spationautes cosmonautes et taïkonautes en mission dans l’ISS. Le bloop, nom donné à un son d’ultra-basse fréquence détecté par le NOAA américain à plusieurs reprises durant l’été 1997 et dont l’origine demeure inconnue, trouverait son origine dans la région du point Némo. Dans la littérature, le point Nemo est relativement proche de la ville fictive de R’lyeh imaginée par H. P. Lovecraft, dans sa nouvelle L’Appel de Cthulhu. (Jean-Adrien Arzilier – extrait du dossier de l’artiste sur documentsdartistes.org)

Jean-Adrien Arzilier - Boustrophédon, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Jean-Adrien Arzilier – Boustrophédon, 2019. Collage d’albums de bande dessinée, 22,6 x 30,4 cm – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Jean-Adrien Arzilier - Boustrophédon, 2019 - Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille
Jean-Adrien Arzilier – Boustrophédon, 2019. Collage d’albums de bande dessinée, 22,6 x 30,4 cm – Créoles alliées – Vidéochroniques, Marseille

Nul doute que « créoles alliées », formule retenue pour intituler l’exposition de Jean-Adrien Arzilier, laissera le visiteur perplexe, si ce n’est démuni. Car, bien que la structure de ce syntagme soit parfaitement correcte au plan syntaxique, son interprétation sémantique demeure hasardeuse… au point de nous questionner sur la « compétence » de son « locuteur », pour reprendre les termes employés par Noam Chomsky au sujet de la « grammaire générative ». Cet embarras vient du fait que la méthode employée pour concevoir cet intitulé n’a jamais eu vocation à produire du sens. Il s’agit en effet d’une anagramme, dans le cas présent dérivée du nom donné au cinquième album de la série des Tintin, L’Oreille cassée, dont l’artiste garde un souvenir attendri, en forme d’éveil au voyage, à l’intrigue exotique (pour la première fois non résolue en l’occurrence), au récit d’aventure et – fusse par sa vulgarisation – à l’ethnographie, vestige autrement perpétué dans l’exposition par l’assemblage des versions française et arabe de ladite bande dessinée, réunies sous le titre Boustrophédon. Il l’est encore avec L’Ondoyant, quasi-authentique pirogue monoxyle évoquant l’iconographie amérindienne.

Commencée laborieusement, à la main ou plutôt de tête, puis prolongée à l’aide d’un anagrammeur logiciel, l’opération a d’ailleurs fourni d’autres propositions, au moins aussi douteuses. Mais tandis que « ce sol réel asile », « le socle réalisé », « sarcelle isolée », « l’Asie se recolle » ou « locales reliées », pour ne mentionner que quelques éventualités, ne nous donnaient strictement aucune prise sur le travail de Jean-Adrien Arzilier, le renvoi à la « créolité » ouvrait d’autres perspectives, à tout bien y réfléchir. Édouard Glissant, dont l’autorité en la matière est largement admise, donne la définition suivante du processus qui la génère dans son Traité du Tout-Monde (1997) :

La créolisation est la mise en contact de plusieurs éléments de cultures distinctes, dans un endroit du monde, avec pour résultante une donnée nouvelle, totalement imprévisible par rapport à la somme ou à la simple synthèse de ces éléments.

Autrement dit, la créolisation c’est le métissage avec une valeur ajoutée – disons une valeur tierce – qui est l’imprévisibilité. Ou encore : on peut prévoir ce que donnera un métissage, mais pas une créolisation. Entendue au-delà des contextes spécifiques (historique, identitaire, géographique) qui ont provoqué l’émergence de ce concept et auxquels il est inévitablement associé, le monde lui-même se créolise, selon Glissant toujours. Le fait est que personne n’en sort indemne, ni vous, ni moi, ni l’artiste.

À son échelle en effet, la pratique de Jean-Adrien Arzilier m’apparait se rapporter à cette idée, considérant précisément les caractéristiques analogues qui permettent la qualification de l’une (cette pratique) ou l’autre (cette idée). Primo, si sa démarche procède bien par associations (qu’elles se manifestent sous l’aspect d’assemblages, de combinaisons, de collages, de montages, et quels que soient les degrés de porosité et de perméabilité des éléments réunis), celles-ci induisent des effets sémantiques a posteriori qui débordent amplement les intuitions préalables de l’auteur, des bénéfices inattendus a priori, des dommages collatéraux non prémédités voire présumables en première intention. Secundo et par voie de conséquence, sa démarche témoigne ostensiblement d’une approche holistique – celle-là même qui semble commander Glissant – qui, selon l’inventeur du néologisme (Jan Christiaan Smuts, Holism and Evolution, 1926) tend à considérer un phénomène comme étant une totalité indivisible, que la somme des parties ne suffit pas à définir. Ça voudrait dire ici que le sens des oeuvres commises par l’artiste n’est réductible ni aux éléments qui les constituent, ni à leur mélange ou leur hybridation. Il est probable que cette approche nous éclaire alors sur la dimension « hétéronome » du travail, pour reprendre le terme employé par Vincent Pécoil (préface de Rock/music, Textes, 1999) à propos du changement de direction adopté par Dan Graham au début des années 1980, à l’opposé des « pures » préconisations greenbergienne ou adornienne en faveur d’un art autonome et réflexif, préservé des pollutions. Art, histoire, anthropologie, cinéma, littérature, sciences, techniques, culture populaire et cultures non occidentales constituent en effet dans l’oeuvre de notre artiste un faisceau de discours hétéronomes qui manifestent un ancrage dans le réel et la diversité de ses représentations.

D’ailleurs, la fréquence de son recours à des ressources allogènes (convoquées à des niveaux d’information divers, du plus précis au plus fantaisiste), l’enchevêtrement des régimes à l’oeuvre (plastique, visuel, métaphorique, narratif, etc.), l’hétérogénéité des matériaux, des supports et des médiums employés, comme son inclination à la citation (sans parler de la nature même de ces citations) ne sont pas sans rappeler le canadien Rodney Graham plutôt que son homonyme américain. Il faut bien dire, sur ce point, que la stratégie d’« annexion » pratiquée par son prédécesseur de Vancouver lui va comme un gant. Jean-Adrien l’a fait sienne, peut-être sans le savoir, en ce qu’il conjugue ses propres recherches à celles d’autres auteurs, en ce qu’il les prolonge d’une certaine manière, y adjoignant ses propres idées. En outre, il partage avec lui un penchant avéré pour l’humour et l’ironie, un goût du paradoxe, des formes absurdes et des jeux de langages, dont l’anagramme constituait le premier indice, tandis que les intitulés des pièces en fournissent un deuxième.

Prenons par exemple les cas de Donghaï, Hangzhou, Chesapeake Bay et Lake Pontchartrain. Il s’agit là d’une série de cartes au 1 : 25 000 (soit 1 cm pour 250 m) réalisées entre 2005 et 2013 sur le modèle des cartes routières. Si toutes comportent bien un tracé, qui figure une partie de pont (l’un des plus grands du monde à chaque fois), le cadre et l’échelle en excluent la contextualisation puisque les côtes, notamment, sont absentes de la représentation. Dépourvues de leur fonction, elles ne sont plus que des images absolument abstraites évoquant l’esthétique minimaliste, bref, des traits rouges sur fond bleu. Alors qu’à leur sujet l’artiste fait allusion à la carte éditée en 1969 par l’IGN (centrée sur une partie désertique de la Mauritanie, donc dénuée du moindre signe), la décrivant à la fois comme la plus absurde et, conceptuellement parlant, la plus exacte, il questionne du même coup les défaillances de nos systèmes de représentation et nos vaines velléités à figurer le monde de façon satisfaisante. Il nous renvoie par la même occasion à nos classiques, en la personne de Lewis Carroll (comme le fait Graham d’ailleurs) en première instance, maître du paradoxe et logicien hors pair. Cartographe à ses heures perdues, aussi. C’est, du reste, à la lisière de deux propositions topographiques de l’écrivain anglais qu’on peut situer plus précisément, me semble-t-il, ce projet de l’artiste. La première, qui aurait dû permettre à Carroll d’accéder au panthéon des cartographes tant elle est parfaite et inexploitable (au point d’être reprise tour à tour par des experts tels que Jorge Luis Borges et Umberto Eco), nous provient de Sylvie and Bruno concluded, paru en 1893 :

– Voilà une chose que nous avons apprise de votre pays, dit Mein Herr, faire des cartes. Mais nous l’avons poussé beaucoup plus loin que vous. À votre avis, quelle serait la plus grande échelle de carte utile ?
– Je dirais au cent millième, un centimètre au kilomètre.
– Seulement un centimètre ! s’exclama Mein Herr. Nous avons atteint cela très vite. Puis nous avons tenté dix mètres au kilomètre. Puis vint l’idée grandiose ! Nous avons réellement fabriqué une carte du pays, à l’échelle d’un kilomètre au kilomètre.
– Vous en êtes-vous beaucoup servi ? demandai-je.
– Elle n’a jamais encore été déroulée, dit Mein Herr ; les fermiers ont fait des objections ; ils ont dit que ça couvrirait tout le pays et que ça cacherait le soleil ! Aussi nous utilisons le pays comme sa propre carte, et je vous assure que ça marche aussi bien.

La deuxième, qui est en fait la première par ordre d’apparition, fut énoncée dans La Chasse au Snark (1976) quand, pour son expédition, l’Homme à la Cloche se procure une carte entièrement vierge qui suscite l’enthousiasme de l’équipage. Elle augure à sa façon les travaux de l’Institut, si ce n’est que le désert est là maritime :

Et les marins, ravis, trouvèrent que c’était une carte qu’enfin ils pouvaient tous comprendre.
– De ce vieux Mercator, à quoi bon Pôle Nord, Tropiques, Équateurs, Zones et Méridiens ? Tonnait l’Homme à la Cloche ; et chacun de répondre :
– Ce sont des conventions qui ne riment à rien !
Quel rébus que ces cartes, avec tous ces caps et ces îles ! Remercions le Capitaine de nous avoir, à nous, acheté la meilleure – qui est parfaitement et absolument vierge !

Tandis que le ressort paradoxal truffe le travail de Jean-Adrien à des degrés de complexité divers (il se manifeste plus immédiatement dans Diligence par exemple, qui mêle la figure archaïque de la roue d’un chariot du Far-West passée à la moulinette western à celle d’un bolide dont l’aérodynamisme serait le fruit d’essais en soufflerie, qui associe à l’idée de vitesse son impossibilité), la question topographique n’est par ailleurs abordée que dans La Boucle de Molly- Aïda, malgré le solide intérêt qu’il porte à ce mode de représentation. Cette Boucle, en forme d’installation constituée d’un tuyau d’arrosage disposé sur des tréteaux métalliques, se propose de matérialiser l’improbable parcours du héro d’un film de Werner Herzog, seulement rendu possible par le truchement de la narration cinématographique. L’artiste lui a d’ailleurs agrégé tout récemment une aquarelle à l’intitulé éponyme, dont la réalisation a été déléguée à une entreprise chinoise spécialisée, qui se donne pour objet la reconstitution, dans son entièreté, de la carte correspondant à ce fameux parcours tandis qu’elle n’apparaît chaque fois que partiellement dans le film. Ajoutons que ce mouvement de reprise et d’augmentation, ni vraiment même, ni complètement autre, ou à la fois même et autre, ne s’exerce pas systématiquement par l’annexion d’un matériel étranger au travail mais également parce qu’il puise en lui-même (Bbbeeettttttyyy et les deux versions de Kya/ Kaak/Ayk en sont un exemple évident).

Pour avancer explicitement sur ce que, tout à l’heure, je promettais déjà implicitement par ce rapprochement avec Rodney Graham, j’en arrive à cette hypothèse que la pratique de Jean-Adrien s’inscrit manifestement dans une filiation conceptuelle. Mais pas n’importe laquelle. Elle est là bien éloignée de l’image d’Épinal, largement diffuse chez certains étudiants des Beaux-Arts comme dans le grand public, d’un art aux manifestations arides ou ennuyeuses, pour rester poli. Sol Lewitt, son illustre précurseur et initiateur réfute effectivement, dès le départ, la nécessité d’une stimulation émotionnelle (« emotional kick ») dans Paragraphs on Conceptual Art (1967), mais il nous met en garde dans le même texte contre cette interprétation erronée : « There is no reason to suppose, however, that the conceptual artist is out to bore the viewer ». Pour rappel, l’équivocité de cette tendance est d’ailleurs plus troublante encore dans les « statements » qui composent, deux ans plus tard, les Sentences on Conceptual Art, dont je livre à votre réflexion cette sélection :

1. Conceptual artists are mystics rather than rationalists. They leap to conclusions that logic
cannot reach.
2. Rational judgements repeat rational judgements.
3. Irrational judgements lead to new experience.
5. Irrational thoughts should be followed absolutely and logically.
21. Perception of ideas leads to new ideas.
26. An artist may perceive the art of others better than his own.

Si les trois dernières offrent un outil de plus pour appréhender le travail qui nous occupe ici, Lewitt, avec les premières, nous ouvre une brèche béante laissant entrevoir au moins l’éventualité d’un conceptualisme non orthodoxe. C’est ainsi que nous pourrions échafauder, par exemple, une lignée réunissant Jean- Adrien Arzilier (en dernier lieu), Rodney Graham et deux autres sources fondatrices ou voisines de la pratique de ce dernier, Bas Jan Ader et Marcel Broodthaers. Graham, Broodthaers et Ader sont d’ailleurs régulièrement mentionnés au sujet d’un courant singulier né de l’art conceptuel, et baptisé Romantic Conceptualism par le critique d’art Jörg Heizer. Il sonne comme la promesse d’une conciliation entre rationalité et affectivité, préméditation et empirisme, autorisant la démonstration du lacunaire et du vulnérable dans le champ conceptuel, ou mieux, l’expression en son sein de l’« emotional kick ».

Edouard Monnet, commissaire de l’exposition

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