Jusqu’au 22 mai, la 16° édition des Boutographies, Rencontres Photographiques de Montpellier sont installées à La Panacée. C’est toujours avec beaucoup enthousiasme et avec un professionnalisme affirmé que de l’équipe de l’association Grain d’Image propose cette rencontre avec de nouveaux talents de la photographie européenne.
Les lauréats du prix du Jury, du prix Réponses Photo et du prix Fotoleggendo.
On retrouve dans la sélection de cette année deux photographes primés dans les éditions précédentes : Elis Hoffman , prix du Jury en 2009 et Pierre Liebaert qui remporte le prix du Jury des Boutographies #16 pour «Libre maintenant », après avoir reçu la même distinction, en 2012, pour sa série « Macquenoise ».
Le prix Réponses Photo est attribué à Kamel Moussa pour sa très intéressante série « Équilibre instable » qui témoigne des incertitudes et du temps suspendu dans la Tunisie contemporaine.
Résultat d’un partenariat entre les Boutographies et le festival Fotoleggendo de Rome, le prix Échange était pour le choix montpelliérain connu avant l’ouverture du festival . « Israeli settlements facts on the ground »de Pietro Masturzo avait été choisi à Rome par l’équipe des Boutographies.
À Montpellier, c’est la photographe allemande Ina Schoenenburg qui a été retenue pour ses « Exchanging Glances » qui montrent sans fards les relations à l’intérieur de sa famille. Son travail sera donc exposé à Rome pour la prochaine édition de Fotoleggendo.
En attendant le prix du Public
Ce prix est attribué à la fin du festival, après le dépouillement des votes du public.
Il vous reste jusqu’au 22 mai pour manifester votre choix.
Pour cette édition, la narration de Stefanie Moshammer ( I can be her), l’émouvante histoire de femmes autour de sa grand-mère racontée par Ida Jakobs (La vie devant soi) ou encore les « Études » de Marie Lukasiewicz ont retenu notre attention… Mais comme il faut faire un choix unique, c’est le travail de Kamel Moussa (Équilibre instable) que nous avons retenu.
Les tendances de la 16° édition des Boutographies
Le parcours de l’exposition à La Panacée reflète les tendances qui ont émergé dans les presque 700 dossiers reçus et examiné par le jury.
Les questions relatives à l’intimité, à la famille, au couple ou à la relation amoureuse constituent une part significative des travaux examinés, plus importante que pour les éditions passées. Pour Christian Maccotta, directeur artistique des Boutographies, il s’agit d’une tendance assez révélatrice d’un retour vers la sphère de l’intime, même si cette thématique a toujours été très présente dans la photographie contemporaine.
Le parcours commence donc avec quatre projets qui reflètent cette orientation : Ina Schoenenburg (Exchanging Glances), Stefanie Moshammer ( I can be her), et Ida Jakobs (La vie devant soi) occupent les cimaises de la première grande salle à gauche du patio.
Pierre Liebaert hérite d’un petit espace qui lui permet de montrer dans des conditions privilégiées son projet « Libre maintenant ».
La deuxième tendance qui se dégage des dossiers reçus lie la photographie d’expression au champ scientifique et fait un contrepoint à la précédente. Ici, la mise à distance et la désincarnation s’imposent.
L’accrochage met en relation, dans une même salle, deux projets qui interrogent les domaines scientifiques.
Ulrike Schmitz avec « The missing link » pose un regard inquiet et imaginaire sur un éventuel clone de Neandertal.
Dans sa série « Études », Marie Lukasiewicz documente ses recherches sur des jardins ouvriers proches des grands axes routiers…
Il semble que l’espace très proche ou très lointain interpellent de nombreux photographes aux dépens de la perspective moyenne, intermédiaire, celle de l’espace social et politique, du projet collectif. Christian Maccotta souligne qu’il n’est pas anodin de constater chez ces jeunes photographes un certain désengagement que l’on peut mettre en relation avec les perspectives politiques plutôt obturées aujourd’hui.
Toutefois, le champ documentaire reste encore assez présent. À des degrés divers, la deuxième partie du parcours en est l’illustration.
Dans la coursive, Peter Franck avec « The Kodak Moment » retravaille, parfois avec humour, sur des photographies de scène de la vie quotidienne familiale prises avec la légendaire Kodak Box. Son regard plus distant fait transition entre la sphère de l’intime et le champ du politique et du social.
Les cimaises de la grande salle à droite du patio regroupent les travaux dont l’approche documentaire est assez évidente.
« Mariupol, four seasons in the shadow of war » de Marek M Berezowski évoque le quotidien dans une ville sur le front du conflit Ukrainien.
Kamel Moussa avec « Équilibre instable » revient dans sa région d’origine, le sud-est tunisien, pour comprendre la jeunesse d’aujourd’hui, celui qu’il était quelques années en arrière.
Enfin, « Israeli settlements facts on the ground » de Pietro Masturzo illustre l’atmosphère étrange dans les colonies israéliennes en Palestine.
Les derniers travaux posent des regards à la fois intimes et distants sur des sujets qui abordent des questions sociales.
Kirill Golovchenko avec Otpusk montre la plage de son enfance à travers une bouée et évoque inévitablement Martin Parr et son « Life is a Beach ».
Elis Hoffman , prix du Jury en 2009, revient à Montpellier avec « Fading », une série qui s’inscrit dit-il dans la tradition documentaire et qu’il définit aussi comme très personnel et introspectif. Dans ce travail, il s’intéresse à la fin inéluctable des choses et à la mort.
« The treatment » d’Alexander Krack est un projet sur les stations thermales en Allemagne. Il affirme que son but n’était pas d’avoir un rendu documentaire, mais de construire inconsciemment une narration avec ses images…
Dernière édition à La Panacée ?
L’an dernier, nous n’avions pas caché notre sentiment sur l’installation des Boutographies à La Panacée. Une opinion qui n’a pas changé pour cette édition…
Si les cimaises ne sont plus blanches, c’est parce que le festival Tropisme les a repeintes pour accueillir les installations du Collectif Scale. Si la lumière semble cette année mieux maîtrisée, c’est certainement parce que de nombreuses d’épreuves sont exposées sans être protégées par du verre.
L’organisation des espaces est également un héritage de Tropisme 2016. En conséquence, les séries photographiques bénéficient de conditions très différentes. Certaines sont très favorables, d’autres le sont beaucoup moins.
On avait souligné l’an dernier « les longues cimaises et un jeu de projecteurs qui n’a pas été choisi pour éclairer et mettre en valeur des photographies ». On avait espéré la mise en place « d’ équipements complémentaires (lumière, cimaises additionnelles, dispositifs d’occultation de la lumière naturelle…) ».
Peu d’investissements semblent avoir été réalisés pour offrir aux Boutographies de meilleures conditions d’exposition. Malgré tout, il faut saluer l’engagement des équipes techniques qui ont réussi à jongler avec ces difficultés et ces contraintes pour présenter un accrochage convenable. On peut également signaler l’investissement des photographes qui ont su produire des plans d’accrochages détaillés, utilisant au mieux les espaces qui leur étaient réservés.
La rumeur laisse entendre que les Boutographies devraient retrouver, pour leur édition 2017, le Pavillon Populaire… On ne peut qu’applaudir ! Pour éviter tout mauvais esprit, on n’ergotera pas sur ce qui s’imposait à Franck Bauchard et qui n’existerait plus pour Nicolas Bourriaud…
Soulignons aussi la qualité et la diversité des documents qui accompagnent l’exposition :
- Chaque texte de salle associe une présentation du travail par l’artiste, un commentaire de Christian Maccotta et quelques repères biographiques.
- En complément d’un catalogue bilingue (français / anglais ) au prix très abordable de 7 €, l’équipe des Boutographies propose un journal du festival ( 3 € ) avec un making off et des interviews des photographes exposés.
- Enfin, la chaîne You Tube de l’association rassemble de nombreux reportages réalisés pendant le festival.
En savoir plus :
Sur le site des Boutographies
Sur la page Facebook des Boutographies
Merci de cette « visite guidée » !
Je signale, dans le cadre de ce festival, une soirée de projections dont le programme détaillé a été connu trop tardivement pour être publié dans le livret officiel :
Vendredi 13 mai 2016 à 19h30,
Salle Brassens, allée de la Liberté, 34160 Saint-Drézéry
(une des communes de Montpellier-Métropole, à 19km)
Programme de la soirée :
1)
Restitution des travaux réalisés par 8 photographes locaux, avec l’accompagnement mensuel de l’équipe des « Boutographies » dans le cadre de leur opération « Villages en Photographie » :
– Daniel Bieysse, « Espèces en voie de disparition »
– Marie-Nathalie Carmona, « Clap, clap, clap, Clapiers ! »
– Laurence Cazin, « Le Bar du Football »
– Jean-Philippe Chalvin, « La passion selon Saint-Drézéry »
– Eric Dugois, « De Père en Fils »
– Terry Fabre, « Rien d’autre ne compte… »
– Luc Perrey, « Manœuvres »
– Valérie Vernhet, « Zepetra »
2)
Une partie des photographes européens sélectionnés par le jury des « Boutographies » 2016 pour les projections du festival.
3)
Le photographe Andrea Graziosi, dont la série « Nunc Stans » est exposée à Montpellier dans le cadre du festival, vient présenter son travail et échanger avec le public.
A l’issue des projections, les échanges pourront se poursuivre autour d’un buffet convivial.
Cette soirée est gratuite et ouverte à tous.
Merci pour l’info !