Mare/Mater de Patrick Zachmann au MuCEM

Jusqu’au  28 janvier 2014, le bâtiment « George -Henri Rivière (GHR)», au Fort Saint-Jean, présente Mare/Mater de Patrick Zachmann, dernière exposition du cycle Les choses de ce côté du monde.

L’exposition est bâtie autour de la projection d’un émouvant montage de photographies et de vidéos sur trois écrans.  La scénographie conçue par Struc Archi propose une sorte de claustra qui ménage quelques sièges face à ce large triptyque et délimite un deuxième espace. Un mur de photographies et des documents retracent l’enquête de Patrick Zachmann et offre un contrepoint à l’émotion souvent poignante des images animées.

Membre de Magnum Photos, Patrick Zachmann confronte dans Mare/Mater sa propre histoire à celles des migrants d’aujourd’hui. Il interroge en particulier le rapport à la mer qu’ils traversent et à la mère qu’ils quittent.
Après trois années d’enquêtes de part et d’autre de la Méditerranée, Patrick Zachmann nous offre un journal qui navigue entre l’intime et le document. Il essaye de reconstruire la mémoire de sa famille juive d’Algérie en s’appuyant sur celle, défaillante, de sa mère. En parallèle, il fait le portrait de trois autres fils, migrants, qui ont choisi de « brûler les frontières (hrague)» et raconte l’histoire de leurs mères qui pleurent…

Le propos du photographe servit par la scénographie, accroche à l’évidence l’intérêt du public. Nombreux sont les visiteurs de ces journées de fin d’année qui entrent un peu par hasard dans la salle d’exposition du bâtiment « George -Henri Rivière ». Mais rares sont ceux qui ne restent pas, captivés par la projection du montage Mare/Mater… Les quelques places assises sont vite occupées et les spectateurs debout se figent peu à peu…  On remarque quelques  yeux qui s’embuent …  À la sortie, quelques instants de silence s’imposent avant que des commentaires puissent s’amorcer… Patrick Zachmann frappe fort et juste. Son montage de 52 minutes  est un antidote puissant à l’imbécillité des discours nauséeux qui  animent trop souvent conversations de bistrot et repas de famille…

À voir et à faire voir ! et à ne pas manquer !

Les circonstances ne nous ont pas permis de visiter l’exposition collective inaugurale et les expositions  monographiques d’Antoine d’Agata (Odysseia) et de Kathryn Cook (Memory of Trees) qui ont précédé Mare/Mater. Et on le regrette…

Saluons le commissariat de François Cheval, directeur du musée Nicéphore Niépce, assisté par Audrey Hoareau et Emmanuelle Vieillard.
La scénographie des quatre expositions a été conçue par Struc Archi (Olivier Bedu, architecte, et Juliette Morel, scénographe).

Les éditions Actes Sud ont publié Mare Mater, journal Méditerranéen, de Patrick Zachmann. Préface par François Cheval. Le DVD du film présenté au MuCEM accompagne l’ouvrage.

[youtube=http://www.youtube.com/watch?v=PnygfwA8UHI]
Mare Mater de Patrick Zachmann [Teaser] – Actes Sud

En savoir plus :
Sur le site du MuCEM
Patrick Zachmann sur le site de Magnum (photos extraites de Mare Mater, Journal Méditerranéen)
Page Facebook de Patrick Zachmann

À propos de Patrick Zachmann (extrait du dossier de presse) :
« Patrick Zachmann est membre de Magnum Photos depuis 1990. Depuis quarante ans, Patrick Zachmann n’a de cesse de questionner l’identité culturelle, la mémoire et l’immigration de différentes communautés. Il ne garde du photojournalisme que l’errance, un sens aigu de l’actualité mais surtout une empathie pour ses personnages. Il a ainsi su développer une écriture photographique originale sachant utiliser conjointement tous les supports. »

Patrick Zachmann. Extrait de Mare Mater, Journal Méditerranéen, Éditions Actes Sud 2013 :
« Il s’agit d’un voyage, un voyage de mémoire et un voyage d’exils. C’est aussi un voyage intérieur. La voix qui porte ce voyage est celle de mon journal de bord. C’est elle qui va tisser le fil de toutes ces destinées que je croise, des migrants quittant leur pays de la rive sud de la Méditerranée, fuyant le chômage, la dictature, l’absence d’avenir, des femmes, des mères, qui les laissent partir ou découvrent qu’ils sont partis, et moi, à la recherche des racines de ma mère, celles qu’elle a voulu oublier.
C’est l’histoire de la Méditerranée, l’histoire de la mer, l’histoire des mères. Parfois, les fils ne reviennent pas. Parfois, les fils périssent en mer. Et puis il y a aussi le rêve, le fantasme. Le rêve d’une Europe qui ne sera jamais aussi belle, aussi accueillante, aussi riche que vue de l’autre côté.

J’ai commencé à interroger et filmer ma mère, âgée de 90 ans et qui, atteinte de graves troubles de la mémoire, ne se souvient de pas grand chose et encore moins de détails concernant l’Algérie, mais se souvient à quel point elle voulait oublier. Je n’avais ni photos – un comble pour un photographe -, ni récit de l’histoire familiale du côté de ma mère juive séfarade. Elle voulait oublier l’Algérie, la pauvreté, oublier ses origines.
Aujourd’hui, je fais te voyage à t’envers. Je fais le voyage des origines perdues, de la part manquante, tue, cachée.
 »

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