Raphael Hefti , « On core / Encore » à la Fondation Van Gogh

L’an dernier, la Fondation Vincent van Gogh Arles avait consacré une de ses deux expositions de rentrée « L’affaire tournesols » à Bertrand Lavier, auteur du superbe portail d’entrée de la Fondation.

Cette année, pour accompagner « L’Arrivée du printemps » de David Hockney, la Fondation Vincent van Gogh Arles accueille Raphaël Hefti  à qui elle doit « La maison violette bleue verte jaune orange rouge », l’ installation permanente sur le toit de la librairie, qui « célèbre la lumière arlésienne en la transformant en une cascade de reflets kaléidoscopiques ».

Depuis plusieurs années, Raphael Hefti, ingénieur de formation, s’intéresse aux propriétés des matériaux et aux processus liés à l’industrie. Il développe un travail expérimental et collaboratif, avec des scientifiques et techniciens. Il intervient sur ces processus, manipule et transforme les substances pour créer des images et des objets étonnants, qui tirent leur force créative des « erreurs » et « ratés » de la fabrication…

Au deuxième étage de la Fondation Vincent van Gogh Arles, parmi les œuvres exposées par Raphaël Hefti, on devrait retrouver deux pièces présentées récemment au  Nottingham Contemporary (fin 2014) et au Centre d’Art Contemporain de Genève (début 2015).

Raphael Hefti, Various threaded poles of determinate length potentially altering their determinacy, 2015
Raphael Hefti, Various threaded poles of determinate length potentially altering their determinacy, 2015, Vue de l’installation, Nottingham Contemporary. Aluminium, cuivre, titane et différents types d’acier, diamètre 35mm, dimensions variables. Commande du Nottingham Contemporary. © Raphael Hefti, Nottingham Contemporary, RaebervonStenglin, Zurich, Bruce Haines Mayfair, Londres. Crédit photographique : Gunnar Meier

« Various Threaded Poles of Determinate Length Potentially Determining their Determinacy » est une œuvre coproduite par ces deux institutions.  Elle se compose de centaines de barres d’un mètre fabriquées en acier, aluminium, titane et cuivre, à l’aide de machines utilisées pour la mécanique de précision. Chaque barre a subi différents traitements industriels, notamment thermique, de façon à rechercher les limites physiques propres à chaque matériau. Les tiges de métal se sont colorées en surface d’une variété de teintes irisées.

Raphael Hefti, tiré de la série Lycopodium, 2014
Raphael Hefti, tiré de la série Lycopodium, 2014, Vue de l’installation, Nottingham Contemporary. Photogrammes tirés sur des rouleaux entiers de papier couleur Fuji Crystal Archive grâce aux spores légèrement inflammables de la mousse Lycopodium, triptyque couleur, 700 × 390 cm. © Raphael Hefti, Nottingham Contemporary, RaebervonStenglin, Zurich, Bruce Haines, Mayfair, Londres. Crédit photographique : Gunnar Meier

« Lycopodium, 2015 » utilise du papier photographique et des spores de lycopodium, utilisés depuis la préhistoire en pyrotechnie.  La combustion de ces spores inflammables sur la surface du papier photosensible produit des expositions de couleurs et d’étranges images qui évoquent celles du cosmos. Cette recherche avait été initiée à la White Cube Gallery  , en 2012.

On devrait retrouver également des exemples de son travail  avec les verres antireflet, couramment utilisés par les musées pour protéger les œuvres d’art, et destinés à être invisible. En multipliant ces revêtements anti-réfléchissants, Hefti a réussi à « rendre visible l’invisible ». Chaque verre change d’apparence en fonction de la lumière et de l’endroit où le spectateur est placé…
« La maison violette bleue verte jaune orange rouge » qui surmonte la librairie de la Fondation en est un des plus bel exemple…

Raphael Hefti, Documentation de la performance, Art Basel, Statements, 2015
Raphael Hefti, Documentation de la performance, Art Basel, Statements, 2015 © Raphael Hefti, Nottingham Contemporary, RaebervonStenglin, Zurich, Bruce Haines, Mayfair, Londres. Crédit photographique : Stefan Altenburger

Il est peu probable que l’on puisse voir « Statements », la performance de Raphael Hefti lors de la dernière édition d’Art Basel… Mais sait-on jamais ?
À propos de cette intervention à Bâle, Art Press écrivait en juillet dernier : « S’il est un stand du Hall 2 de cette quarante cinquième édition de la foire de Bâle qui ne désemplit pas, c’est bien celui de la RaebervonStenglin Gallery. Le public est amassé devant un tour à commande numérique de sept tonnes que l’artiste suisse Raphael Hefti y a disposé. La machine usine avec une précision extrême pendant que le spectacle est retransmis en temps réel sur deux écrans plats – dans les années soixante, les artistes investissaient le monde ouvrier alors qu’à Bâle, c’est l’usine qui vient au monde de l’art. Et force est de reconnaître que la précision de la machine fascine autant que les volumes tournés qu’elle exécute, dans tous les sens du terme. Car, à la fin de chaque performance, il ne reste plus que des cylindres semblables en tout point les uns aux autres. De cette œuvre éphémère résolument conceptuelle, on ne peut acquérir que les instructions permettant à réactiver la performance. Des prospectus du constructeur de l’outil sont donc à disposition des possibles acquéreurs, comme sur le stand d’un salon industriel ! ».

La veille du vernissage, le jeudi 8 octobre de 18h à 20h, Raphael Hefti rejouera une de ses performances « Quick Fix Remix », dans le parc des Ateliers à Arles. Dans cette performance, il utilise un appareil portatif de soudage aluminothermique qui sert habituellement à réparer les rails de chemin de fer. Dans un sillon creusé dans du sable, il fait couler du métal en fusion qui se solidifie rapidement, donnant naissance à des formes aux allures de « sculptures ». On peut voir ci-dessous, « Quick Fix Remix », en septembre 2013, à la galerie  Ancient & Modern de Londres.

À lire ci-dessous quelques repères biographiques et une présentation du projet d’exposition extraite du dossier de presse.
Chronique à suivre après le vernissage.
Un deuxième billet est consacré à  l’exposition David Hockney, L’Arrivée du printemps

Exposition du 11 octobre 2015 au 10 janvier 2016

En savoir plus :
Sur le site de la Fondation Vincent van Gogh Arles
Sur la page Facebook de la Fondation Vincent van Gogh Arles
Sur les sites du Nottingham Contemporary, de la White Cube Gallery, du Centre d’Art Contemporain de Genève, de la RaebervonStenglin Gallery et de Ancient & Modern

Repères biographiques :

Raphael Hefti est né en 1978 à Bienne (Suisse), il vit et travaille entre Zurich et Londres. Il est diplômé de l’École Cantonale d‘art de Lausanne (ECAL) ainsi que de la Slade School of Fine Art, Londres.

Expositions récentes :

  • OR OR OR?, Centre d’Art Contemporain de Genève, Genève ; Statements, Art 46 Basel, RaebervonStenglin, 2015
  • Raphael Hefti, Nottingham Contemporary, Nottingham ; Raw Draw, RaebervonStenglin, Zurich ; Prix Manor, Centre Pasquart, Bienne, 2014
  • Nature More, CAPC, Bordeaux ; Quick Fix Remix, Ancient & Modern Gallery, Londres, 2013
  • Inside the White Cube, White Cube Gallery, Londres ; Launching Rockets Never Gets Old, Camden Arts Centre, Londres ; Art:Concept, Paris ; Thermit Welding, SALTS, Bâle, 2012
  • 327 Different Sounds, Coalmine Galerie, Winterthur; Beginning with the first thing that comes to mind, Fluxia, Milan, 2011

RAPHAEL HEFTI : « ON CORE / ENCORE »

Commissaire de l’exposition : Bice Curiger

La recherche du potentiel encore méconnu des matériaux et processus industriels est le point de départ de la pratique du jeune artiste suisse Raphael Hefti ; l’altération – amplifiée et esthétique – d’un métal ou d’une planche de verre en serait le point d’arrivée.

Ainsi l’artiste intervient-il non seulement dans les processus techniques mais également au sein des entreprises de fabrication de matériaux industriels, qui deviennent le laboratoire de ses observations. À l’image de son travail, mené de concert dans ses ateliers situés à Zurich et à Londres, Raphael Hefti articule sa pensée et conduit ses interventions à travers un système collaboratif. Après une discussion approfondie avec les techniciens et les ingénieurs, il incite ceux-ci à pousser un procédé technique jusqu’à obtenir une transformation qui s’opère au coeur de la matière ou en surface.

Parmi les découvertes que l’artiste expose au deuxième étage de la Fondation, l’installation Various threaded poles of determinate length potentially altering their determinacy (2015) – une forêt de structures tubulaires en acier, cuivre, titanium et aluminium, de 35 mm de diamètre – va à l’encontre de l’idée reçue selon laquelle les métaux seraient des matériaux inertes. Chauffées électriquement à différentes températures très élevées, les tiges de métal se colorent en surface, créant une variété de teintes irisées. Les verres de musée aux propriétés antireflet ont quant à eux donné naissance à la série de verres dichroïques qui compose l’installation La Maison violette bleue verte jaune orange rouge (2014), couronnant la verrière de la Fondation.

Le résultat de ces expérimentations artistiques échappant en partie à tout contrôle, il est d’autant plus extraordinaire de découvrir l’esthétique et les effets produits de ces oeuvres qui jouent, pour certaines, avec les contraintes architecturales de la Fondation. Alors que les tubes métalliques de dimensions variables maintenus entre le sol et le plafond créent une tension spatiale, le photogramme Lycopodium (2015) – obtenu par la combustion de spores inflammables sur la surface photosensible du papier photographique – se marie avec la forme oblongue de l’espace d’exposition pour lequel il a été spécialement créé.

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