Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle

La Collection Lambert en Avignon invite POUSH


Jusqu’au 12 mai 2024, la Collection Lambert présente une quarantaine d’artistes résident·e·s à POUSH pour « Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle » à l’Hôtel de Montcalm.

Cette proposition s’ajoute aux multiples initiatives de l’institution avignonnaise qui témoignent de l’actualité de la création contemporaine, depuis le programme « Rêvez ! » jusqu’aux « Rendez-vous, sous-sol », en passant par l’accueil de plusieurs éditions du « Festival ¡ Viva Villa ! »…

En effet, pour les deux commissaires, « Revenir du présent s’envisage comme une une chambre d’écho dans laquelle résonnent les œuvres issues d’une multitude d’artistes et de gestes, témoins de l’art en train de se faire ici – en France – et maintenant ».

Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert - Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

On attendait avec intérêt de découvrir comment Stéphane Ibars et Yvannoé Kruger « se sont attachés à organiser une triangulation entre les nouveaux territoires parisiens, les quartiers de l’agglomération d’Avignon et les projets qu’ils animent ».

Avec une évidente complicité, ils ont conçu un parcours « comme une traversée au long cours » avec la volonté d’« inviter celles et ceux qui en font l’expérience à éprouver une succession de climats où se déploient les représentations possibles de nos rapports au monde. Rituels, chapardages, fables, rêves et autres transformations spatiales s’infiltrent dans les salles de la Collection Lambert pour déjouer par avance la réalité d’un futur forgé dans la noirceur »…

Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert - Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Construit avec beaucoup d’intuition et d’imagination, « Revenir du présent » enchaine quatre séquences qui sont titrées :

À l’orée du bois – Fables, rites et autres souvenirs du présent
Rose is a rose is a rose is a rose
Les choses de la vie
Si ce monde vous déplaît…

L’accrochage à quatre mains que propose Stéphane Ibars et Yvannoé Kruger est d’une étonnante fluidité et il multiplie les moments saisissants, poétiques, inattendus, parfois débridés et tumultueux, quelquefois sombres et angoissants. On ne revient pas de ce sombre présent tout à fait indemne.

« Revenir du présent» est sans aucun doute une des propositions les plus abouties que l’on peut voir dans le midi en ce début d’année 2024. Elle impose un passage par Avignon…

Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert - Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Au-delà de ce que « Revenir du présent » offre aux visiteurs·euses, pour les deux institutions, « l’exposition est le fruit d’une réflexion commune sur le soutien à la création, à la production et sur le soin porté non seulement à la plus juste inscription des œuvres dans leur contexte d’exposition, mais aussi à l’accueil des artistes et aux conseils qui leur sont proposés dans le cadre de leurs réflexions »…

Avec les artistes : Carla Adra, Mathilde Albouy, Estèla Alliaud, Hugo Avigo, Abdelhak Benallou, Djabril Boukhenaissi, Apollinaria Broche, Grégory Chatonsky, Salomé Chatriot, Gaëlle Choisne, Max Coulon, Morgan Courtois, Xolo Cuintle, Marlon De Azambuja, Marie De Villepin, Cyril Debon, Julian Farade, Cledia Fourniau, Laura Garcia Karras, Gerard & Kelly, Célia Gondol, Pascal Hachem, Arash Hanaei, Michel Jocaille, Nika Kutateladze, Anne Le Troter, Matisse Mesnil, Daniel Otero Torres, Margot Pietri, Luca Resta, Edgar Sarin, Ugo Schildge, Laura Sellies, Erwan Sene, Félix Touzalin, Dune Varela, Ittah Yoda.

Commissaires de l’exposition : Stéphane Ibars et Yvannoé Kruger

Gaëlle Choisne - Corps étherique, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert

À lire, ci-dessous, quelques impressions sur le parcours de l’exposition accompagnées des textes de salle et de brèves notes biographiques à propos des artistes extraites du dossier de presse.

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« Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle » : Quelques impressions sur le parcours de l’exposition

Après les deux sculptures en béton de Max Coulon qui attendent les visiteur·euses dans la cour de l’hôtel de Caumont, le parcours débute par les deux salles situées à gauche du hall d’accueil.

Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert - Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

À l’orée du bois
Fables, rites et autres souvenirs du présent

Une installation de Laura Sellies (Soit je suis morte soit je deviens oiseau, 2022) annonce avec poésie aux visiteur·euses qu’ils/elles sont au seuil d’une aventure, au début d’une histoire que proposent les deux commissaires…

Sur trois mobiles en acier qui évoquent des branches d’arbre ou des ailes sont suspendus sept haut-parleurs qui remplissent la salle de chants d’oiseaux, des cris d’enfants, des comptines…

Laura Sellies - Soit je suis morte soit je deviens oiseau, 2022 -  Revenir du présent - La Collection Lambert
Laura Sellies – Soit je suis morte soit je deviens oiseau, 2022. Trois mobiles en acier, sept HP, boucle sonore de 13 min – Revenir du présent à la Collection Lambert

Avant d’atteindre l’orée du bois, il faut traverser l’espace que certains appellent la « chapelle ». Elle abrite une installation permanente de Niele Toroni peinte sur les deux murs de l’abside. Selon la volonté de l’artiste et d’Yvon Lambert, le lieu ne peut accueillir une autre œuvre en même temps. En conséquence, un dispositif de cloisons mobiles masque le travail de Toroni, chaque fois que cela est nécessaire…

Originaire d’Avignon et familière de la Collection Lambert, Estèla Alliaud brise cette règle avec une sculpture créée pour l’exposition. S’inspirant des cloisons amovibles qui masquent occasionnellement l’installation de Toroni, elle choisit d’implanter une fragile cimaise courbe au milieu de l’espace. Ce geste iconoclaste et audacieux est d’une force étonnante.

Estèla Alliaud - Sans titre (huis clos), 2024
Estèla Alliaud – Sans titre (huis clos), 2024. Placoplatre, rails et montants métalliques. Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Avec élégance, Estèla Alliaud oblige les habitué·es de la Collection Lambert à re-regarder avec plus d’attention l’œuvre de Toroni.
On imagine l’effet que produisait Sans titre (huis clos) (2024) quand on arrivait de la salle où étaient accrochés avec les toiles de Brice Marden, Robert Mangold et Robert Rayman lorsque l’exposition « La peinture est morte, vive la peinture ! » était encore en place…

Avec malice, Estèla Alliaud accompagne sa sculpture avec une petite œuvre sur papier (Sans titre [déposé], 2016), passant définitivement outre aux instructions du collectionneur…

Estèla Alliaud - Sans titre (déposé), 2016 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Estèla Alliaud – Sans titre (déposé), 2016. Impression jet d’encre – Revenir du présent à la Collection Lambert

Au-delà, elle nous interroge sur ce que l’on croit voir, sur ce qui est visible et caché, sur ce que l’on ne voit plus à force de l’avoir sous les yeux…

La séquence À l’orée du bois Fables, rites et autres souvenirs du présent ne commence réellement qu’avec la première salle au rez-de-chaussée de l’Hôtel de Montfaucon…

Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert - Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Un texte d’introduction annonce aux visiteur·euses ce qui les attend…

« Les histoires commencent souvent à l’orée de la forêt.
Des mythes ancestraux aux contes pour enfants, la clairière est le lieu où l’on s’arrête un instant pour tenter d’apercevoir, à travers les branches, les êtres qui vivent là et ceux que, tels des mirages, notre esprit s’invente.
En invitant les visiteur·euse·s à franchir une frontière invisible, là où la matière se ritualise pour devenir œuvre et où chaque proposition se pense en rituel, les artistes ouvrent les portes de mondes alternatifs possibles, comme autant de sanctuaires où le tangible côtoie le transcendant.
Ici, chaque œuvre se présente sous une forme initiatique qui embarque avec elle les récits de nos vies présentes et à venir. Comme dans un conte ancestral, l’entrée dans la forêt marque le début d’une quête intérieure. Commence alors une traversée vers des territoires de l’âme où l’œuvre est une fenêtre ouverte sur un monde peuplé d’animaux mythiques qui se dissimulent parmi les ombres et les silhouettes d’arbres 
». (Texte de salle)

Julian Farade - Abyssal Memories, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Julian Farade – Abyssal Memories, 2023. Huile et encre sur velours – Revenir du présent à la Collection Lambert

Sur la droite, une grande œuvre quasi abstraite à l’huile et à l’encre sur velours de Julian Farade (Abyssal Memories, 2023) laisse apparaitre d’étranges et mystérieuses bestioles.

Matisse Mesnil - Le Marais, 2023
Matisse Mesnil – Le Marais, 2023. Acier, soudure sur acier – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

En face, sur un imposant quadriptyque fait de plaques d’acier, Matisse Mesnil (Le Marais, 2023) a dessiné à l’arc électrique un paysage marécageux à la fois naïf et délicat. Une branche, précairement posée sur deux pièces métalliques, paraît avoir été coupée dans cette curieuse roselière…

Max CoulonJoseph, 2023 ; Prey, 2023 ; Strange Priest, 2024 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Sur le sol, trois personnages en béton peint et sculpté de Max Coulon semblent attendre avec malice le moment opportun pour surprendre les visiteur·euses avec quelques farces, pitreries ou blagues. Joseph, Prey et Strange Priest sont sans doute les petits frères de ceux qui assurent l’accueil dans la cour de l’Hôtel de Caumont…

Julian Farade - Based on Alexis, 2021
Julian Farade – Based on Alexis, 2021. Velours et mousse- Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Affalée dans un coin, une curieuse et inquiétante figure en velours de Julian Farade (Based on Alexis, 2021) ne paraît pas vouloir ou pouvoir participer au jeu… En a-t-elle été exclue ? Cela la rend-elle boudeuse ?

Xolo Cuintle - Post Gebrüder Thonet N°7028 Rocking Chair, 2022
Xolo Cuintle – Post Gebrüder Thonet N°7028 Rocking Chair, 2022. Béton, bois et acier – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Sur le grand mur, on remarque plusieurs sculptures en béton du duo Xolo Cuintle que l’on avait découvert lors de la dernière édition d’Art-o-rama. Entre deux bas-reliefs, un rocking-chair dessiné par Thonet, en béton et en kit est « épinglé » comme un papillon. Annonce-t-il une histoire de chaise que l’on entendra plus loin ?…

Plusieurs superbes pièces en bois de Mathilde Albouy occupent également l’espace. Elles évoquent des peignes, des aiguilles ou des accessoires démesurés. Certaines, ornées de mystérieuses sphères hérissées de piquants en argent ou en étain, paraissent à la fois séduisantes et toxiques… Leurs titres, quand ils existent, sont aussi étranges et inquiétants (The liar, What do they want from you?)…

Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Au centre, deux œuvres (Can you hear (me)?, 2024), créées pour l’exposition, descendent délicatement du plafond jusqu’au sol. Est-ce des gouttes de pluie qui traversent la surface d’un étang ou d’une mare ? Les ondes circulaires qui s’y propagent suggèrent-elles que nous sommes immergés ?

Daniel Otero Torres - La Révolución del maíz, 2021 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Daniel Otero Torres – La Révolución del maíz, 2021. Crayon sur aluminium, crayon de couleur sur inox poli miroir, peinture, bambou, plantes de maïs, thé de coca, totumo, matériaux de récuperation, technique mixte – Revenir du présent à la Collection Lambert

Une remarquable œuvre de Daniel Otero Torres (La Révolución del maíz, 2021) apparaît un peu décalée dans cet ensemble. N’aurait-elle pas pu trouver sa place dans une autre séquence de « Revenir du présent» ?

Daniel Otero Torres - La Révolución del maíz, 2021 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Daniel Otero Torres – La Révolución del maíz, 2021. Crayon sur aluminium, crayon de couleur sur inox poli miroir, peinture, bambou, plantes de maïs, thé de coca, totumo, matériaux de récuperation, technique mixte – Revenir du présent à la Collection Lambert

On quitte cet univers grisâtre et un peu dérangeant attiré par une histoire dont on perçoit des bribes et par d’éclatantes couleurs que l’on distingue au fond de l’enfilade des salles…

Dans la petite pièce qui suit, Anne Le Troter présente avec Le corps living room (2023) une des installations les plus troublantes et réussies de l’exposition.

Anne Le Troter - Le corps living room, 2023
Anne Le Troter – Le corps living room, 2023. Installation sonore, 30 min. Parlant·es: Martin Bakero, Eva Barto, Agathe Boulanger, Victoire Le Bars, Anne Le Troter, Simon Nicaise. Enregistrement: Saint-Lô d’Ourville, La Ferté-Loupière, Studio *Duuu / La Vilette. Elen Huynh et Noé Mignard *Duuu. Montage : Anne Le Troter. Mixage : Noé Mignard *Duuu. Mastering : Maxime Maurel / Studio Noir. Production de la pièce sonore : Loraine Baud / *Duuu – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

La proposition d’Anne Le Troter est imaginée à partir de Antic Meet (1958), une chorégraphie majeure de Merce Cunningham. Sur le concerto pour piano et orchestre de John Cage avec crécelles, sifflets et piano « préparé », avec des costumes et décors de Robert Rauschenber, le chorégraphe réglait sans doute ses comptes avec Martha Graham. Il décrivait Antic Meet comme une série de situations absurdes qui n’ont rien à voir les unes avec les autres. Merce Cunningham y portait une chaise attachée à son dos servant de point d’appui à Carolyn Brown.

Anne Le Troter - Le corps living room, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Anne Le Troter – Le corps living room, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Dans Le corps living room, on retrouve les bancs qui sont souvent présents dans l’univers d’Anne Le Troter. Il faut prendre le temps de s’y assoir pour écouter au travers des œuvres graphiques et des sculptures sonorisées les dialogues surréalistes de cinq acteurs qui reprennent les « rôles » très adaptés par Anne Le Troter des danseurs qui ont créé Antic Meet en 1958 avec Merce Cunningham : Carolyn Brown, Viola Farber, Cynthia Stone, Marilyn Wood et Remy Charlip.

Au début de cette pièce sonore, Eva-Remy plante le décor :

« On est là dans la forêt à fumer des clopes. Tu vois moi j’aime lâcher de puissants ronds de fumé qui s’entortillent aux branches. Je m’applique parce que ça me plait d’aromatiser les banches en expulsant la fumée de mes Vogues aux senteurs de menthe poivrée. Tellement je kiffe que j’allume d’autres clopes. Voilà, je poursuis avec des Camel que je teinte de mon rouge à lèvres avant de l’écraser du bout du pied.

Là dans les bosquets, les mégots de mes cigarettes écrasées là, on dirait un… tas de petits tampons périodique, des tampons colorés pour Barbies. Des tampons dans les buissons. Je crache dessus et étouffe le feu dont mes cigarettes se souviennent. Regarde, mes clopes, elles s’entrouvrent. Ils fleurissent mes mégots tout en copiant le style de nos marées noires. À côté des clopes, il y a une chaise. C’est la copie conforme d’une autre qu’on a vu sur YouTube dans “Antic Meet”, une chorégraphie de Merce Cunningham de 1958.

Au début, c’est Robert Rauschenberg qui a eu l’idée de mettre deux sangles au mobilier pour que le chorégraphe puisse s’en faire un sac à dos dans son spectacle. On a fait un double, une copie, qui elle pourra terminer ces jours à l’endroit où elle les a commencés : dans la forêt. On a fait un double de la chaise comme on fait un double des clés, pour pouvoir rentrer dans ce spectacle comme on veut, oui parce que cette chaise c’est un peu le début de notre appartement-forêt.

Voilà, on est dans la forêt parce que c’est la maternité des chaises, c’est de là que toutes les chaises viennent, les originales et les copies. Les bois c’est l’utérus de nos appartements dans lesquels nous dansons ivres devant nos frigos. On danse devant des vidéos de chaton sur YouTube dans nos 30 m2. On danse comme des suricates et c’est mignon et ici va danser “Antic Meet” 
».

Anne Le Troter - Le corps living room, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Anne Le Troter – Le corps living room, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Résumer la suite du propos est un défi inatteignable… Le cartel réussi en quelques mots à en traduire l’esprit en présentant Le corps living room comme « une installation sonore dans laquelle les parlants cherchent à s’extraire de la société et choisissent l’immobilisation comme acte de résistance ».

Anne Le Troter - Le corps living room, 2023 - Revenir du présent à la Collection Lambert
Anne Le Troter – Le corps living room, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Cette pièce justifie à elle seule un passage dans « Revenir du présent»…

Rose is a rose is a rose is a rose

Après la « notion de corps-enceinte, caisse de résonance autant que forteresse assiégée » explorée par Anne Le Troter d’une et la grisaille de la forêt où bruissaient « fables, rites et autres souvenirs du présent », on entre dans l’univers coloré, mais parfois piquant de « Rose is a rose is a rose is a rose»…

Rose is a rose is a rose is a rose
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

« Silencieux, naturels, inanimés, parfois morts, les végétaux, légumes, gibiers, poissons et autres compositions florales ont imprégné les peintures des siècles passés avec la force insidieuse d’un genre mineur. Celle qui avance masquée derrière la banalité du quotidien et qui, embarquée dans l’érudition d’un geste et l’observation acharnée de l’artiste dans son atelier, révèle la complexité abyssale du monde qui nous entoure.
Derrière le kitsch, l’outrance ou le refus d’embrasser les codes imposés par le goût de l’époque, les natures mortes qui peuplent l’exposition ont en commun d’initier un pas de côté et d’engager une conversation ouverte et soutenue sur les rapports que nous entretenons avec des éléments sensibles que nous considérons trop souvent à tort comme inanimés.
On pense ici à la rose dont le nom se répète dans les vers de Gertrude Stein ou la montagne sacrée japonaise dont l’image se renouvelle à travers les cent vues du Mont Fuji du grand Hokusai.
Ici la récurrence de motifs triviaux pourrait ainsi s’énoncer comme une nécessité de réinventer quotidiennement les rapports que nous entretenons — ensemble et un·e par un·e — avec ce qui nous constitue ». (Texte de salle)

Le titre de cette seconde séquence cite un vers de Gertrude Stein dans le poème « Sacred Emily » de 1913, paru dans le recueil Geography and Plays en 1922 et qui fut l’entête de son papier à lettres quand elle habitait au 27 de la rue Fleurus… Parfois interprété comme « les choses sont ce qu’elles sont », ce célèbre vers de Stein est plus souvent compris comme une idée tourne en boucle et se répète…

L’accrochage tapissier, baroque et délirant de la première salle n’est pas sans évoquer celui du mythique salon de Gertrude Stein, rue Fleurus, où voisinaient les Matisse et les Picasso… Mais ici, les toiles sont à priori et pour le moment moins célèbres.

Le genre de la Nature morte y est exclusif et se répète comme un motif qui tourne en boucle sous le regard de quelques chauves-souris en céramique émaillée de Cyril Debon qui se sont suspendues en haut d’une cimaise…

Cyril Debon - série de chauve-souris en céramique émaillée
Cyril Debon – série de chauve-souris en céramique émaillée – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Pour Yvannoé Kruger, la genèse de cette salle remonte à la création de POUSH à Clichy dans une ancienne tour de bureau qui ne permettait pas de produire des œuvres volumineuses et pesantes. La pratique de la peinture y était donc majoritaire et elle correspondait alors à un retour de la peinture figurative. La nature morte était un des genres les plus fréquemment choisis par les artistes pour la simplicité de sa mise en œuvre et ses couts réduits…

Les nombreuses peintures rassemblées dans cette salle montrent la diversité des pratiques depuis les compositions minutieuses aux inspirations classiques d’Abdelhak Benallou, jusqu’au Bouquet (2022) de Djabril Boukhenaïssi ou aux deux toiles de Marie de Villepin, toiles expressives à la frontière de l’abstraction…

Les « pochades » de Cyril Debon (All you can eat, 2023) – portraits de légumes à l’huile sur bois encadrés de céramique – dialoguent à plusieurs occasions avec des petits formats dessinés à l’arc électrique sur acier de Matisse Mesnil (Mazzolin, 2023).

Matisse Mesnil - Mazzolin, 2023 et Cyril Debon - All you can eat, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Matisse Mesnil – Mazzolin, 2023. Série de 10. Acier, soudure sur acier et Cyril Debon – All you can eat, 2023. Série de 30. Huile sur bois, huile sur papier japonais, bois, céramique – Revenir du présent – Revenir du présent à la Collection Lambert

Stéphane Ibars souligne que ce thème de la nature morte doit être aussi perçu comme une interrogation des artistes sur nos rapports au vivant.

Morgan Courtois - Devoring Fantasy, 2023
Morgan Courtois – Devoring Fantasy, 2023. Porcelaine, fleurs – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

En témoigne, au centre de la salle, la sculpture de Morgan Courtois (Devoring Fantasy, 2023). Dans cette installation, les verres brisés et seaux de champagne en porcelaine s’empilent en évoquant les fins de soirées et leur « potentiel de l’excès ». Les petites roses du vernissage finissent d’y faner et de mourir. Déjà figée, la superbe rose en bronze et céramique d’Apollinaria Broche (I’ll Be So Lonely I Could Die, 2023) ne peut être qu’indifférente à leur sort…

Apollinaria Broche - I’ll Be So Lonely I Could Die, 2023
Apollinaria Broche – I’ll Be So Lonely I Could Die, 2023. Bronze, céramique – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Trois superbes tableaux d’Ugo Schildge nous interpellent sur les impacts de l’homme sur la nature, sur nos rapports au temps et la dualité entre le vivant et l’immortel, avec ses motifs de fruits et de fleurs insérés dans le béton et ses engrenages…

Ugo SchildgeL’empreinte, 2023 ; Champs de fleurs, 2024 ; Nature morte mécanique, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Quant aux œuvres de Michel Jocaille, elles affirment haut et fort leur esthétique kitsch et revendiquent, « avec une extravagance théâtrale, une écologie queer égalitaire », si l’on en croit le cartel…

Michel Jocaille - Exotic sweetness a magical time, 2024
Michel Jocaille – Exotic sweetness a magical time, 2024 – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Dans la galerie qui ouvre sur la cour de l’Hôtel de Montfaucon, l’artiste géorgien Nika Kutateladze réactive To protect my house while I’m away, une installation créée en 2018 à partir de branches de citronnier épineux, de meubles et d’objets usagés, ramassés, échangés ou achetés dans les vide-greniers et les brocantes de la région. Il y a ajouté son manteau, deux huiles sur toile et une photographie de footballeur…

Nika KutateladzeTo protect my house while I’m away, 2018 – Revenir du présent à la Collection Lambert

La grande salle à éclairage zénithal a été utilisée comme atelier par Edgar Sarin pour y peindre Post Razzle-Dazzle (2024) une imposante toile à partir de pigments naturels récoltés dans la région et pour y édifier Monument (2024), une construction en torchis et canne de Provence.

Edgar Sarin - Post Razzle-Dazzle, 2024 et monument, 2024
Edgar Sarin – Post Razzle-Dazzle, 2024 et monument, 2024 – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Dans un coin, on remarque une des figures amorphes de Julian Farade (When my fear take over, 2022).

Julian Farade - When my fear take over, 2022
Julian Farade – When my fear take over, 2022 – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Au centre de cet espace, Dust to Dust (2023), une sculpture en béton de Xolo Cuintle, tente d’équilibrer l’ensemble en s’appuyant sur six céramiques de la série Power Outlet (2023) disposées au niveau des plinthes.

Xolo Cuintle - Dust to Dust, 2023 - Edgar Sarin - Post Razzle-Dazzle, 2024 et monument, 2024
Xolo Cuintle – Dust to Dust, 2023 – Edgar Sarin – Post Razzle-Dazzle, 2024 et monument, 2024 – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

La cour accueille un édicule de Matisse Mesnil (Lasciate ogne speranza, voi ch’entrate, 2022). Celles et ceux qui ne se seront pas pris les pieds dans les bloques-portes qui cernent cette petite « chapelle » pourront y entrer après avoir abandonné tout espoir et enjamber un des vers de l’Enfer de Dante qui marquent les seuils. Ils/elles y allumeront sans doute une bougie flottante après avoir laissé quelques piécettes…

Matisse MesnilLasciate ogne speranza, voi ch’entrate, 2022 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Les choses de la vie

Cette troisième séquence se développe à l’étage de l’Hôtel de Montfaucon dans le vaste espace en « L » traversé par la lumière abondante et changeante qui arrive de l’extérieur.

Daniel Otero TorresBailando en la oscuridad, 2023. Crayon, crayon de couleur sur inox poli miroir, bronze, acrylique, technique mixte et Pascal HachemSpoonism, 2013. Cuillères, farine – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

En préambule, sur le palier, une œuvre de Daniel Otero Torres (Bailando en la oscuridad, 2023), couverte de papillons de nuit en trompe-l’œil, dialogue avec une première pièce de Pascal Hachem (Spoonism, 2013) dont les autres œuvres ponctuent avec dérision le parcours de « Les choses de la vie »… Sans doute faut-il attendre un peu avant l’éclosion des œufs d’Ephestia kuehniella dans la cuillère de Pascal Hachem pour voir quelques papillons de farine tenter une impossible rencontre avec ceux dessinés par Daniel Otero Torres.

« En investissant physiquement les espaces d’exposition depuis plus d’un siècle, les choses du quotidien ont nourri de nombreuses révolutions artistiques – cubisme, ready-made, pop art, art conceptuel et minimal, etc – et modifié en profondeur nos rapports à l’oeuvre d’art.
Dans cette salle baignée de lumière, les choses s’accumulent et s’agencent en des installations aussi complexes que poétiques. Les matériaux de construction, structures, outils, téléviseurs, bouteilles, cartons de sauce japonaise, de mozzarella et autres fourchettes de pique-nique constituent autant de trophées d’un monde voué au culte de l’objet de consommation.
Ritualisés et combinés en des formes hybrides qui les détournent de leur utilisation première, ils deviennent les armes sensibles d’une résistance salutaire face à l’insoutenable tourbillon de la consommation béate.
Là s’invite le pouvoir de l’artiste de transformer de simples artefacts en objets merveilleux ; sa capacité à dialoguer en permanence avec le banal et de révéler l’inattendu dans l’ordinaire »
. (Texte de salle)

Marlon de Azambuja - Brutalismo, 2024 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Marlon de Azambuja – Brutalismo, 2024. Briques, tuiles, parpaings, serre-joints – Revenir du présent à la Collection Lambert

La mise en espace dans la première galerie du « L » commence avec une imposante et captivante installation de Marlon de Azambuja (Brutalismo, 2024) que l’on peut comprendre comme une interrogation sur l’architecture et l’urbanisme et plus particulièrement sur le brutalisme. Ce style architectural minimaliste et austère du milieu du siècle dernier a souvent été associé à Le Corbusier. Chaque réitération de cette œuvre assemble avec des serre-joints des matériaux de construction trouvés localement, ici dans une grande enseigne spécialisée dans l’habitat d’Avignon. À chaque réactivation, l’installation est supposée être un « portrait architectural qui révèle la matérialité de chaque ville à partir de sa structure interne »…

Erwan SeneA.U.E 3 (Answering Unlimited Equipment 3), 2023. Aluminium, bois, peinture, speakers, amplificateur et Hunter Balancing Park 3, 2023. Aluminium, mobilier urbain, amplificateur, peinture, plâtre, PVC, résine polyuréthane, vernis – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Autour de cette nouvelle expression de Brutalismo, deux étranges et inquiétantes sculptures d’Erwan Sene (A.U.E 3 (Answering Unlimited Equipment 3), 2023 et Hunter Balancing Park 3, 2023 ) diffusent un environnement sonore parfaitement adapté. On retrouvera dans la dernière séquence de l’exposition une œuvre « jumelle » de celle qui « trône » au centre de cette première galerie et qui fait le lien avec l’installation suivante.

Arash Hanaei - Foggy Memo, 2023
Installation multimédia. Musique de Nima Aghiani. Images extraites de A Wash for Intimate Brain Parts, d’Arash Hanaei. Producteurs : Ag Galerie et Arash Hanei
Arash Hanaei – Foggy Memo, 2023. Installation multimédia. Musique de Nima Aghiani. Images extraites de A Wash for Intimate Brain Parts, d’Arash Hanaei. Producteurs : Ag Galerie et Arash Hanei – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

En effet, au fond de la galerie, la tour d’Arash Hanaei (Foggy Memo, 2023) répond à l’horizontalité de Brutalismo. Dans une musique techno de Nima Aghiani, on y découvre plusieurs images fixes ou animées extraites de A Wash for Intimate Brain Parts, un des chapitres de son triptyque vidéo Cyclothymia of a Land /Free Adaptation : Cityscape qui, pour Morad Montazami, « ressemble à un collage punk de séquences de rue, de cauchemars technologiques et de fantômes commerciaux ». De son côté, le cartel précise : « Avec son installation Foggy Memo, l’artiste se penche sur l’esthétique des périphéries et invite les spectateurs à interpréter les utopies dans le paysage des villes inachevées »…

Autour de Brutalismo et Foggy Memo, les commissaires ont fait le choix d’accrocher trois toiles abstraites de Clédia Fourniau (130 rouille, 2024 ; 2419 green, 2021-2024 et 130 jaune, 2024), réalisées avec des peintures industrielles utilisées dans la construction navale. Une troisième sculpture d’Erwan Sene (Amaranthine Grey Brown Datacombe Kiosk Cabinet, 2023) cloture cette première galerie.

Clédia Fourniau130 rouille, 2024 ; 2419 green, 2021-2024 ; Clédia Fourniau130 jaune, 2024. Préparation polymérique, encre et peinture acrylique, colorant, mica, peinture vinylique et résine sur tissu – Revenir du présent à la Collection Lambert

Entre les fenêtres du côté cour, plusieurs petites mise en scène saugrenues et surréalistes de Pascal Hachem (Enjoy #1, 2013 ; Held by a thread, 2013 et Just Democracy, 2013) jouent avec des objets du quotidien et conduisent les visiteur·euses vers la seconde galerie du « L ».

Pascal HachemEnjoy #1, 2013. Fourchette, couteau, acier, verre ; Held by a thread, 2013. Couteau, bobine de fil blanc, acier, verre ; Just Democracy, 2013. Casserole, acier, verre – Revenir du présent à la Collection Lambert

Posé au sol, un ensemble d’outils, emmanchés avec humour et sans doute un peu de causticité par Pascal Hachem (Blue Collar/White Collar, 2013), interpelle et interroge… Puis, ils finissent par provoquer un éclat de rire ou au moins un sourire.

Pascal Hachem - Blue Collar/White Collar, 2013 Outils en fer et en bois
Pascal Hachem – Blue Collar/White Collar, 2013 Outils en fer et en bois – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Sagement alignés, ces outils détournés orientent les regards vers des étagères métalliques semblables à celles utilisées dans les réserves alimentaires…

Pascal Hachem - Blue Collar/White Collar, 2013
Outils en fer et en bois
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

En s’en approchant, on reconnaît, un pack de bouteille d’eau, un carton de produits asiatiques, deux emballages en plastique, une boite de mozzarella…

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Luca Resta – Monuments – Revenir du présent à la Collection Lambert

Avec un peu d’attention, on remarque que ces objets paraissent avoir une étrange texture… avant de découvrir qu’ils sont tous en marbre. On comprend alors pourquoi Luca Resta a choisi de titrer cette installation Monuments ! La lecture des étiquettes réservent quelques surprises…

Sur la gauche, une autre étagère regroupe les éléments d’une armure bricolés à partir de bouteilles en plastique… Luca Resta joue à nouveau sur l’aspect de la matière. Ces protections réalisées en résine époxy et en mousse expansée donnent le sentiment d’être en céramique et d’en avoir la fragilité… Intitulée Ciao mamma, io esco/Salut maman, je sors, cette installation rappelle l’équipement de celles et ceux qui se sont affrontés aux forces de l’ordre lors des manifestations qui ont tourné à l’émeute pendant le contre-sommet anti-G8 à Gênes en juillet 2001…

Luca Resta - Ciao mamma, io esco Armatura II, 2012 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Luca Resta – Ciao mamma, io esco Armatura II, 2012 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Au milieu de ces Armatura, Luca Resta expose Golden Gods, une collection de touillettes réalisées à partir de la fonte de pièces de 10 centimes d’euro…

Luca Resta - Obelix Souvenir #1, 2022 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Luca Resta – Obelix Souvenir #1, 2022 – Revenir du présent – Revenir du présent à la Collection Lambert

En face, entre deux fenêtres, Bud Brancusi (2023), taillé dans un marbre de Naxos en reproduisant des packs de bière, évoque la célèbre colonne sans fin…

Luca Resta - Bud Brancusi, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Luca Resta – Bud Brancusi, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Enfin, sur le mur du fond, une fourchette en plastique édentée, sculptée dans un bloc de marbre blanc de Carrare (Tools #3, 2020) semble nous faire un doigt d’honneur !

Luca Resta - Tools #3, 2020
Marbre blanc de Carrare, acier
Luca Resta – Tools #3, 2020 Marbre blanc de Carrare, acier – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Devant les fenêtres, côté « jardin », Célia Gondol, danseuse et artiste plasticienne, a installé sur un socle en bois clair trois aquariums de verre remplis d’eau déminéralisée dans lesquels elle a placé trois fascinantes sculptures en verre soufflé d’une série intitulée Ice Memories (2022-2023). Ses mémoires de glace évoquent les reliefs du désert de Platé, un des plus grands lapiaz d’Europe situé en Haute-Savoie. Les roches calcaires de ce site, issues des sédiments déposés au fond de l’océan Téthys, se sont élevées en surface lors de la formation des Alpes, il y a environ 25 millions d’années…

Célia GondolIce Memories, 2022-2023. Verre soufflé, trois aquariums de verre extra clair, eau déminéralisée, bois, lumière – Revenir du présent à la Collection Lambert

En descendant l’escalier de l’atrium, on suit les trajets d’une petite cabine d’ascenseur (Cabins, 2024 et Lift taker, 2024) imaginée par Hugo Avigo avec l’intention, parait-il, d’exorciser sa phobie des ascenseurs et sans doute d’interroger notre perception du lieu…

Certains ne manqueront pas de songer à l’elevator qui se déplaçait avec peine dans Eraserhead, le premier film de David Lynch… Pour conjurer ses démons, Hugo Avigo a déménagé et collé au mur une paroi de la cabine de l’ascenseur du bâtiment (Untitled, 2024).

Si ce monde vous déplaît…

La quatrième et dernière séquence de « Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle » se développe au sous sol de l’hôtel de Montfaucon. Elle emprunte son titre à Si ce monde vous déplaît… et autres écrits, un recueil de quatre essais et conférences de Philip K. Dick publié en 1998. Celles et ceux qui connaissent Stéphane Ibars et/ou qui ont suivi avec attention les diverses expositions qu’il a imaginées pour la Collection Lambert ne seront pas surpris par cette référence à l’auteur américain.

« Dans un contexte particulier fait d’incertitudes sur un avenir possiblement voué à la catastrophe et d’injonctions faites aux individus de s’adapter en permanence, la figure de Philip K. Dick apparaît comme le fil conducteur des dernières salles de l’exposition.
En 1998, les éditions de l’éclat publient la traduction d’un recueil de conférences données par l’auteur de science-fiction intitulé Si ce monde vous déplait. Il y raconte son rapport à l’espace et au temps, dégagé de la linéarité qui nous est enseignée par la science. Il questionne le devenir même de la nature humaine dans des sociétés embarquées de force dans la course au progrès technologique. Il redit la nécessité de résister pour que le monde qui se répète, scenario après scenario, offre à l’individu la possibilité d’une vie libérée de toute contrainte, de tout état de tutelle.
Ainsi se déploient dans les salles de la Collection Lambert autant de gestes de résistance, de tactiques critiques, de détournements et d’appropriations, de combinaisons créoles qui invitent au mélange des êtres, des genres et des espaces. Ils racontent et amenuisent, œuvre après œuvre, l’inéluctable domination technologique »
. (Texte de salle)

Pol Taburet - Fork Melody, 2023
Pol Taburet – Fork Melody, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert

Dans l’alcôve, en regard au texte d’introduction, une sculpture de Pol Taburet (Fork Melody, 2023) donne le ton… À lire le cartel, ses « clous rouillés, mais toujours acérés, refléteraient nos traumatismes et notre force intérieure face au temps »…

La première salle est dominée par un remarquable ensemble d’œuvres de Gaëlle Choisne dont la plusieurs avaient été présentées à l’Acacias Art Center durant Paris + par Art Basel, suite à l’invitation par Lorna Simpson pour former le duo « Mentor et Jeune Talent » 2023 de Reiffers Art Initiatives.

Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert - Photo : David Giancatarina
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

La récente sélection de Gaëlle Choisne pour le prix Marcel Duchamps 2024 confirme la place essentielle qu’elle a prise dans le paysage de l’art contemporain.

Gaëlle ChoisneCorps étherique, 2023. Laiton – Revenir du présent à la Collection Lambert

Trois œuvres de sa série Anathem (Anathem – polydactylie, 2022 ; Anathem – magician, 2022 et Anathem – unity, 2022) et deux panneaux de Safe space for a passing History sont accrochés autour de Corps étherique (2023), un captivant tissage en fil de laiton.

Gaëlle ChoisneAnathem – magician, 2022. Bois de pin, tissu imprimé, tissu indigo Shibori fait main, céramique émaillée, chaînes plaquées or, pierres précieuses trouvées, moules, coquillages, pièces de monnaie ; Anathem – polydactylie, 2022. Chêne, tissu imprimé, tissu indigo Shibori, céramique émaillée, chaînes plaquées or, coquillages, casiers, téléphone portable, préservatifs aromatisés à la fraise, viagra Black Panthers ; Anathem – unity, 2022. Bois de pin, tissu imprimé, tissu indigo Shibori fait main, céramique, chaînes plaquées or, pierres trouvées, dés et magie, clé en or – Revenir du présent à la Collection Lambert

Le cartel résume avec élégance le travail qu’elle présente à la Collection Lambert : « Gaëlle Choisne explore ici des histoires enchâssées dans l’histoire officielle, autour des thèmes liés à la décolonisation ou à la stigmatisation persistante du peuple noir, s’appuyant sur une pratique propre qu’elle nomme le scrap-painting (en écho au scrap-booking) ».

Gaëlle ChoisneSafe space for a passing History_1111, 2023 et Safe space for a passing History_222, 2023. Contreplaqué, céramique émaillée, côte de maille, pierres précieuses, tatouages éphémères, monnaie, cauri, impression UV, collage, peinture, pastel à l’huile – Revenir du présent à la Collection Lambert

Son travail est précédé par deux œuvres de Salomé Chatriot, une peinture sur aluminium (Hony Time 2, 2023) et une installation murale où elle a transformé du lait en plastique pour en faire des fouets (Don’t Ignore That I Am Constituted of Many Small Pieces That Don’t Interconnect with Each Other (The Matriarch, 1, 2 et 3), 2022).

Salomé ChatriotHony Time 2, 2023. Peinture à l’huile et émail à froid sur aluminium découpé et Don’t Ignore That I Am Constituted of Many Small Pieces That Don’t Interconnect with Each Other (The Matriarch, 1, 2 et 3), 2022. Fouets, galalithe synthétisée par l’artiste à partir de protéines de lait, aluminium, cuir – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

On peut souligné que Salomé Chatriot, comme Pol Taburet sont aussi soutenus par Paul-Emmanuel Reiffers et que tous les deux avaient participé à la première exposition collective de Reiffers Art Initiatives, intitulée « DES CORPS LIBRES – Une jeune scène française »…

Une sculpture d’Erwan Sene (Hunter Balancing Park 2, 2023) semblable à celle vue dans « Les choses de la vie » fait le lien entre les œuvres de Salomé Chatriot et celles de Gaëlle Choisne.

Sculptures de Margot Pietri et Grégory ChatonskyThe White Cube in Black Box Ideology, 2023 – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

La salle suivante est partagée par Margot Pietri et Grégory Chatonsky. La première présente six sculptures qui parodient avec une pointe de cynisme et de mépris quelques objets que le capitalisme a imposé dans notre quotidien urbain. Le second expose The White Cube in Black Box Ideology , une installation nourrie par une IA avec des documents trouvés sur l’internet pour suggérer quelques souvenirs de ce qui aurait pu être vu à la Collection Lambert… Une proposition qui peine à convaincre.

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Ittah Yoda Revenir du présent à la Collection Lambert

Une toile et un ensemble de sculptures du duo Ittah Yoda dont deux œuvres olfactives occupent en grande partie la troisième salle occupée. À bien des égards, le travail d’Ittah Yoda surprend et ne laisse pas indifférent. Leur pratique mérite aussi d’être soulignée, ce que le cartel résume ainsi : « L’œuvre d’Ittah Yoda est autogénératrice, se citant elle-même tout en s’étendant peu à peu vers de nouveaux domaines à chaque collaboration, que ce soit avec un artisan, un technicien, un auteur, une intelligence artificielle, un glitch, des conditions environnementales ou encore une vie non-humaine »…

Ittah YodaL’objet de tes nuits blanches, 2022. Pâte de verre, structure en acier nickelé ; Entre deux soleils, 2023 et Lascaux, 2022. Cèdre de Merano, cire, ocres, mica et roches collectés et transformés par les artistes à Al-’Ula (Arabie Saoudite), dans le Lubéron, sur l’île de Vassivière (France) et dans le Massachusetts (USA). Cristal de verre soufflé, chêne de l’île de Vassivière collecté par les artistes, œuvre olfactive Lascaux (collaboration avec David Chieze pour Mark Buxton perfumes et Luzi) ; Allan, 2023. Chêne de l’île de Vassivière collecté par les artistes, laiton brossé et au fond Alejandro I-III, 2022. Encre lithographique – Revenir du présent à la Collection Lambert

Dans un coin, une des figures léthargiques de Julian Farade (I was cold now I’m not, 2021) ne sait plus si elle à froid, ou non…

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Julian Farade – I was cold now I’m not, 2021. Velours et mousse – Revenir du présent à la Collection Lambert

Félix Touzalin a laissé l’installation (Châsse, a drooling lap, 2023) activée par une performance lors du vernissage et qui devrait être rejouée à plusieurs occasions pendant la durée de l’exposition…

Félix Touzalin - Châsse, a drooling lap, 2023
Félix Touzalin – Châsse, a drooling lap, 2023. Plaques d’acier, laiton argenté, étain, eau, traitement hydrophobe, écran, enceintes. Chorégraphie et interprétation : Félix Touzalin ; composition
musicale : Dahlia Rebecca, Jérôme Combier et Félix Touzalin ; accompagnement dramaturgique : Juliette Peres ; conseils costumes : Caroline Delhom et Dael.le Anselme ; fabrication sculptures et costumes : Félix Touzalin
Durée 25 min – Revenir du présent à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Avec le sens aigu des espaces qu’on leur connaît, Gerard & Kelly ont réaménagé une salle aveugle utilisée comme réserve en discothèque minimaliste. Deux boules à facettes suspendues par des chaînes (Disss-co, 2023) jouent avec la lumière que reflètent deux superbes sérigraphies monotypes à la feuille d’argent et d’or sur papier métallique (Glyphs IV et V, 2022). Une boucle sonore extraite d’une composition de Julius Eastman (Femenine, 1974) accompagne cette magistrale installation.

Gerard & KellyDisss-co, 2023. Deux boules à facettes, chaînes de suspension, moteurs, sol en miroir ; Glyphs IV et V, 2022. Sérigraphie monotype, feuilles d’argent et d’or sur papier métallique – Revenir du présent à la Collection Lambert

L’auditorium accueille la projection de la vidéo Ça te colle à la peau (2023) de Carla Adra que l’on avait découverte chez les Mécènes du Sud Montpellier-Sète, l’an dernier…

Carla Adra - Ça te colle à la peau, 2023
Carla Adra – Ça te colle à la peau, 2023. Deux vidéos : Face A et Face B 9 min 13 sec et 8 min – Revenir du présent à la Collection Lambert

En remontant le couloir, on découvre six impressions photographiques sur marbre de Dune Varela. Cette série (Météorite, 2023) a été réalisée dans les carrières de Carrare. L’artiste y a photographié des blocs et des plaques de marbre avant de les imprimer sur des morceaux de marbre qu’elle y a récolté, proposant ainsi une curieuse mise en abîme…

Dune Varela – Météorite, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Dune Varela – Météorite, 2023. Impression photographique sur marbre – Revenir du présent à la Collection Lambert

« Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle » : Les artistes :

Carla Adra

Les récits de soi et l’expérience de la réciprocité sont au coeur de la pratique de Carla Adra. À travers des expériences performatives collectives, elle organise des moments de rencontre où elle fait entendre les voix des autres et tente de rendre audible des discours disqualifiés. Dans l’espace public ou au sein de structures, elle récolte des paroles en échange d’une histoire vécue, puis déplace l’énonciation pour que témoignages individuels et expériences partagées entrent en résonance. Parallèlement, elle développe une pratique sculpturale qui met en dialogue discours intérieur et formes souterraines. L’artiste se fait porte-voix des voix et des messages des autres, non sans humour, utilisant divers médiums, de la vidéo avec sa pièce Ça te colle à la peau, à la performance dans Je suis ta FM.

Site de l’artiste : https://carlaadra.com/
https://www.instagram.com/carlaadraa/

Mathilde Albouy

Jouant de paradoxes formels et conceptuels, Mathilde Albouy nous invite à un jeu dont les règles ne sont pas clairement définies. Nourrie de science-fiction féministe, l’artiste utilise les fictions générées par ses pièces comme des outils politiques pour remettre en question une réalité établie et binaire. En détournant les échelles et les matériaux, les objets parfois coupants ou toxiques deviennent des individus à part entière, oscillant entre un rapport de séduction et de prédation. Ses oeuvres révèlent la manière dont la beauté des objets, notamment féminins, véhicule des schémas d’oppression, comme c’est le cas avec les quatre sculptures présentées ici.

Site de l’artiste : https://mathildealbouy.com/
Mathilde Albouy sur le site de la galerie Derouillon : https://derouillon.com/artists/mathilde-albouy
https://www.instagram.com/mathildealbouy/

Mathilde Albouy - The liar, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Mathilde Albouy – The liar, 2023 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Estèla Alliaud

Les processus d’Estèla Alliaud s’articulent essentiellement autour de l’observation intuitive d’un lieu et de son expérience. Son travail relève par ailleurs toujours d’une dimension sculpturale qui a trait à la valeur intrinsèque des objets et de leur matérialité. Les formes qu’elle pose dans l’espace, principalement sculptures et installations, se donnent à voir à la suite d’actions simples mais fondatrices, qui incitent le visiteur à une expérience phénoménologique du lieu. À la suite d’un temps d’immersion à la Collection Lambert, l’artiste y opère un geste qui modifie notre perception du lieu. Les formes produites réactivent différentes strates temporelles propres à ses espaces et concentrent l’attention du visiteur sur ce qui échappe habituellement au regard.

Site de l’artiste : https://www.estela-alliaud.com/
https://www.instagram.com/estela_alliaud/

Estèla Alliaud - Sans titre (huis clos), 2024
Estèla Alliaud – Sans titre (huis clos), 2024

Hugo Avigo

Hugo Avigo développe une pratique audacieuse jouant sur une exagération maîtrisée des codes de la sculpture, de la peinture et de l’installation. À travers ces différents médiums, sa pratique artistique explore les domaines de l’espace public, de la fiction spéculative et de l’auto-guérison. Habitant l’espace de manière inattendue, ses oeuvres, de formes extravagantes et d’échelles souvent démesurées, bousculent nos idées préconçues sur les corps et leur pesanteur, les lieux et leurs fonctions, afin de déstabiliser notre perception du quotidien. Investissant l’espace de l’atrium de la Collection Lambert, l’artiste exorcise son ascensumophobie (phobie des ascenseurs) et étudie la figure de l’ascenseur comme métaphore des défis et des possibilités individuelles et collectives.

Hugo Avigo sur le site de la Galerie Chloe Salgado : https://galeriechloesalgado.com/hugo-avigo-cv/
https://www.instagram.com/hugoavigo/

Hugo Avigo - Cabins, 2024 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Hugo Avigo – Cabins, 2024 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Marlon de Azambuja

Artiste pluridisciplinaire, Marlon de Azambuja travaille la sculpture, l’installation, la photographie et le dessin. Son travail explore l’architecture et l’urbanisme ainsi que les structures de pouvoir et les normes qui émanent des choix de conception de l’espace public. Il s’intéresse particulièrement à l’histoire de l’architecture moderniste au Brésil et à la manière dont celle-ci a affecté la conscience collective et la vie des habitants. Utilisant fréquemment des matériaux trouvés, son travail, créé in situ, est fortement lié à l’endroit où il intervient physiquement. L’artiste présente ici une nouvelle itération de sa série Brutalismo avec une installation composée de matériaux de construction sourcés localement, portrait architectural qui révèle la matérialité de chaque ville à partir de sa structure interne.

Site de l’artiste : https://www.marlondeazambuja.com/
https://www.instagram.com/marlondeazambuja/

Marlon de Azambuja - Brutalismo, 2024 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Marlon de Azambuja – Brutalismo, 2024 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Abdelhak Benallou

Le travail réaliste d’Abdelhak Benallou n’est pas uniquement porté sur la maîtrise technique du geste et de la composition, mais cherche également à retranscrire une narration picturale forte. Souvent présentées en série, ses peintures lui permettent de développer une réflexion sur les comportements et les relations sociales qui s’opèrent au sein de la société contemporaine. L’évolution entre les générations l’interpelle particulièrement, tant au niveau humain que technologique. Les éléments de son quotidien, ses amis et amies, son environnement proche, sont ses premières sources d’inspiration. Au travers de compositions minutieuses aux inspirations classiques, les natures mortes d’Abdelhak Benallou mettent en exergue le pouvoir de la lumière et sa fascinante capacité de transformation des objets, donnant vie aux scènes de nature morte.

Abdelhak Benallou sur le site Art Paris : https://www.artparis.com/fr/artist/113145
https://www.instagram.com/abdelhakbenallou/

Abdelhak Benallou - Sans titre, 2023
Abdelhak Benallou – Sans titre, 2023

Djabril Boukhenaïssi

Le travail de Djabril Boukhenaïssi est essentiellement nourri par la littérature et s’articule autour de la notion de disparition. Si la peinture qu’il présente semble indécise, comme à mi-chemin entre l’esquisse et la représentation aboutie, c’est qu’elle cherche à évoquer des événements qui sont eux-mêmes évanescents, fragiles, mal dessinés et mal inscrits dans sa propre intériorité : un souvenir d’enfance, un paysage entraperçu, une rêverie induite par un morceau de musique ou le visage d’un ami disparu.
L’artiste fait l’hypothèse que la peinture, travaillée à travers des motifs « troués », poreux, eux-mêmes traversés par d’autres motifs, est peut-être en mesure d’évoquer la manière dont ces images intérieures nous reviennent dans une temporalité qui nous est propre. Liant technique et propos, Djabril Boukhenaissi utilise ici des pastels sur un glacis de peinture à l’huile, pour évoquer dans ses « bouquets » la disparition et l’effacement du souvenir.

Site de l’artiste : https://www.djabrilboukhenaissi.com/
https://www.instagram.com/djabril.boukhenaissi/

Djabril Boukhenaïssi - Bouquet, 2022
Djabril Boukhenaïssi – Bouquet, 2022

Apollinaria Broche

Apollinaria Broche est une artiste pluridisciplinaire qui travaille à partir de divers matériaux, combinant harmonieusement la fragilité de la céramique et la solidité du bronze, à travers des œuvres prenant autant la forme d’objets inanimés que d’animaux anthropomorphes ou de filles zoomorphes à l’allure kawaii. L’artiste cherche à construire différents univers, des « lieux d’évasion », espaces uniques et alternatifs, afin d’incarner la multiplicité des hétérotopies des regardeurs. Son exploration artistique se penche sur le conflit entre les forces internes et externes – entre le soi et le monde environnant – mais aussi sur l’autoréflexion, plongeant dans des pensées introspectives et analysant les conflits qui existent à l’intérieur de l’individu. Apollinaria Broche présente ici des fleurs qui, inspirées du folklore et d’une certaine esthétique pop, forment des paysages oniriques et surréalistes.

Apollinaria Broche sur le site de la Marianne Boesky Gallery : https://marianneboeskygallery.com/about/
https://www.instagram.com/apobroche/

Apollinaria Broche - I’ll Be So Lonely I Could Die, 2023
Apollinaria Broche – I’ll Be So Lonely I Could Die, 2023

Grégory Chatonsky

Pionnier de l’IA, Grégory Chatonsky fonde Incident.net, collectif dédié au Netart, en 1994. Ses œuvres évoquent la finitude de l’espèce humaine où l’hypermnésie du Web et de l’IA apparaissent comme une tentative pour préserver la possibilité d’un avenir. Son travail constitue une exploration des relations ambiguës entre les technologies et l’existence. Recourant à une multitude de médiums, aussi bien numériques que traditionnels, l’artiste a développé un corpus où le langage, le corps, la ville, l’extinction, le réseau, le paysage ou la mémoire tissent une fiction sans narration. Chaque nouvelle œuvre est une itération qui prend matériellement place dans une structure modulaire qui décompose le monde. L’artiste présente ici The White Cube in Black Box Ideology : la machine, nourrie par des milliards de documents déposés sur le réseau, se souvient de ce que nous avons été, créant une version alternative de souvenirs qui auraient pu être ceux de la Collection Lambert, espace de monstration blanc et immaculé.

Site de l’artiste : https://chatonsky.net/
https://www.instagram.com/chatonsky_/

Grégory Chatonsky - The White Cube in Black Box Ideology, 2023 02
Grégory Chatonsky – The White Cube in Black Box Ideology, 2023 02

Salomé Chatriot

Le travail de Salomé Chatriot s’articule autour d’une vision émancipatrice de l’hybridation entre femme et machine à travers la création d’espaces physiques, virtuels et performatifs. La respiration active ses oeuvres, donnant lieu à une symbiose générée par ses processus de fabrication, entre éléments organiques et composants technologiques, corps humains et appareils électroniques. Cherchant des occasions d’élargir nos relations intimes avec les machines, elle explore les questions d’identité et de sexualité hors des récits dominants. Grâce à son langage artistique à la fois dérangeant et harmonieux, Salomé Chatriot est capable de générer des approches non conventionnelles liées aux outils technologiques. Dans l’ensemble des oeuvres qu’elle présente ici, l’artiste utilise la matière organique comme matériau plastique : elle retranscrit son souffle avec de la peinture à huile dans Hony Time 2 et transforme du lait en plastique pour en faire des fouets dans Don’t Ignore That I Am Constituted of Many Small Pieces That Don’t Interconnect with Each 0ther (The Matriarch).

Site de l’artiste : https://salomechatriot.net/
https://www.instagram.com/salomechatriot/

Salomé Chatriot - Hony Time 2, 2023
Salomé Chatriot – Hony Time 2, 2023

Gaëlle Choisne

Sculptrice et vidéaste, Gaëlle Choisne se saisit des enjeux contemporains de la catastrophe, de l’exploitation des ressources et des vestiges du colonialisme dans des installations opulentes qui mêlent mythes et cultures populaires – plus spécifiquement, traditions ésotériques créoles. Elle tire de ses voyages les matériaux qui composent ses installations et ses films. Exotisme mercantile, imaginaires littéraires et croyances constituent les thèmes d’une oeuvre dynamique, généreuse et sociale. Elle conçoit ses expositions comme des plateformes ouvertes et inclusives, véritables espaces de sociabilité et de travail en commun, durant lesquelles elle invite citoyens, chercheurs, musiciens et artistes à collaborer à l’occasion de workshops, d’ateliers pratiques, de cours de cuisine ou de concerts improvisés. Gaëlle Choisne explore ici des histoires enchâssées dans l’histoire officielle, autour des thèmes liés à la décolonisation ou à la stigmatisation persistante du peuple noir, s’appuyant sur une pratique propre qu’elle nomme le scrap-painting (en écho au scrap-booking).

Site de l’artiste : https://gaellechoisne.com/
https://www.instagram.com/gaellechoisne/
https://www.reiffersartinitiatives.com/artistes/gaelle-choisne/

Gaëlle Choisne - Corps étherique, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Gaëlle Choisne – Corps étherique, 2023 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Max Coulon

La pratique sculpturale de Max Coulon s’articule autour de la question de la statuaire et des jeux de représentation. Décalages formels, jeux d’enfants avec des matériaux de construction lourds, allusion au grotesque et à l’histoire de la sculpture, équilibre précaire de personnages ambigus – les sculptures de Max Coulon déconcertent. La question de la figuration et de la narration y est utilisée tantôt comme un prétexte, tantôt comme une fin en soi.

De l’assemblage brutal de formes douces apparaissent des personnages en béton ou en bois qui semblent sortir d’un conte étrange. Les cadavres exquis Square, Joseph, Strange Priest et Prey peuplent la Collection Lambert. Construites en remplissant des objets du quotidien de béton, les sculptures de Max Coulon provoquent une tension entre le terrible et le comique, le résistant et le fragile, la puissance et la douceur.

Sur le site d’Arterritoires : https://www.arterritoires.com/blogs/artistes/max-coulon
https://www.instagram.com/max.coulon/

- Revenir du présent à la Collection Lambert
Revenir du présent, Regards croisés sur la scène actuelle à la Collection Lambert – Photo : David Giancatarina

Morgan Courtois

Sculpteur, photographe et créateur de parfum, son travail défend un retour à un esthétisme inspiré du craft, du camp et du baroque. Il défend l’idée que l’univers est fondamentalement créatif et qu’il produit un « débordement » de phénomènes sensoriels inutiles mais esthétiquement plaisants. Les animaux et les plantes communiquent au moyen de couleurs, de sons et d’odeurs qui semblent n’avoir d’autre but que de séduire, d’attirer et parfois de repousser. Ces manifestations de désir et d’excès constituent le fondement du travail de Morgan Courtois qui rend palpables les forces esthétiques et affectives qui traversent, voire dépassent, le monde matériel. À la Collection Lambert, l’artiste présente Devouring Fantasy, une installation où coupes et seaux de champagne en porcelaine s’empilent autour de fleurs séchées évoquant tout le potentiel de l’excès.

Morgan Courtois sur le site de la Galerie Balice Hertling : https://www.balicehertling.com/artists/morgan-courtois/
https://www.instagram.com/morgan__courtois/

Morgan Courtois - Devoring Fantasy, 2023
Morgan Courtois – Devoring Fantasy, 2023

Cyril Debon

Cyril Debon est peintre sentimentaliste et céramiste animalier, fondateur de l’agence de mannequin Mannequin Madelaine. Son oeuvre est un exercice d’éclectisme, en quête des meilleures manières d’évoquer des émotions universelles comme l’amour ou la mélancolie. Il élabore sa propre imagerie d’Épinal où se réconcilient l’histoire de l’art, les livres pour enfants et les archétypes de série B. Sa production traverse le registre des genres artistiques comme un pion sur un plateau de jeu de l’oie, en passant nécessairement par quelques traquenards. Les espaces d’exposition de la Collection Lambert sont habités par deux séries de Cyril Debon : un ensemble de portraits de légumes à l’huile sur bois encadrés de céramique et une série de chauve-souris en céramique émaillée.

Site de l’artiste : https://cyrildebon.com/
https://www.instagram.com/cyrildebon/

Cyril Debon - All you can eat, 2023
Cyril Debon – All you can eat, 2023

Julian Farade

Julian Farade explore les émotions humaines à travers des compositions denses et colorées où les figures semblent émerger les unes des autres. Oscillant entre abstraction et figuration, il souhaite s’extraire de cette dichotomie pour développer les possibilités offertes par cette zone d’incertitude et d’instabilité, là où une silhouette est encore un signe, un dessin un graphème, une couleur une émotion pure. Il compose ainsi un vocabulaire de figures récurrentes – une maison, un crocodile, une échelle, etc. – qu’il dispose dans tous ses tableaux et qui disparaissent au premier regard pour laisser lire une composition d’ensemble très expressionniste. Le bestiaire vibrant de Julian Farade habite une large variété de médiums utilisés par l’artiste pour confronter la peur et l’inconnu : peinture, sculpture, gravure. Des tableaux sur velours et des figures nouées content ici ces combats intérieurs.

Julian Farade sur le site de la galerie Mathilde Le Coz : https://www.mathildelecoz.com/julian-farade
Julian Farade sur le site de la galerie Derouillon : https://derouillon.com/artists/julian-farade
https://www.instagram.com/horsmilieux/

Julian Farade - Abyssal Memories, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Julian Farade – Abyssal Memories, 2023 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Clédia Fourniau

Les tableaux de Clédia Fourniau sont réalisés à l’aide de peinture acrylique, de mica et de résine sur toile ou textile apprêtés, pour former une surface brillante produisant un dialogue introspectif entre l’image reflétée et la réalité. L’acte de peindre est fondamentalement dépendant du processus et du matériau lui-même, enraciné dans une pratique du corps en action qui se construit à l’atelier jour après jour et couche après couche, dans une temporalité distendue et imprévisible. Oscillant entre une pratique à la fois formelle, protocolaire et de l’accident, l’artiste travaille ainsi sur la dimension sérielle et gestuelle de la peinture abstraite en interrogeant la représentation, les conditions de création, de perception et de réception d’une double image.
L’artiste explore la dimension sérielle et gestuelle de la peinture abstraite, à travers trois toiles exposées à la Collection Lambert, réalisées à partir de peinture acrylique, de mica et de résine sur toile.

Clédia Fourniau - 130 jaune, 2024 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Clédia Fourniau – 130 jaune, 2024 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Laura Garcia Karras

Laura Garcia-Karras utilise des couleurs profondes et saturées qui sont le résultat de sortie de tube et du jus sale de ses peintures précédentes, ce qui confère une richesse particulière à sa palette. La composition de ses œuvres est marquée par des formes organiques qui évoquent des éléments naturels, l’artiste jouant avec les contrastes de lumière et d’ombre pour donner vie à ces formes. Les textures sont soigneusement travaillées et la finesse des détails observe un processus de peinture lent et réfléchi. Les éléments, qui rappellent des motifs de jardins ou des références à la nature morte, sont représentés avec une telle intensité qu’ils semblent vibrer d’une vie intérieure, malgré leur état stationnaire. Cette tension entre le dynamisme de la vie et le silence de la mort se fait sentir à travers l’interaction des formes et des nuances. Dans cette dernière série de toiles présentées ici, Laura Garcia Karras fait éclore des formes aiguisées, sur le jus brumeux de ses pinceaux sales, encore riches des pigments de ses toiles précédentes.

Laura Garcia-Karras sur le site de la galerie Paris B : https://www.paris-b.com/fr/artiste/laura-garcia-karras/
https://www.instagram.com/lauragarciakarras/

Laura Garcia Karras - Gaze, 2024
Laura Garcia Karras – Gaze, 2024

Gerard & Kelly

Gerard & Kelly collaborent depuis près de deux décennies sur des performances, des chorégraphies, des vidéos et des installations. Ayant étudié la danse classique et contemporaine, les arts visuels, la littérature et les théories du genre, Gerard & Kelly utilisent des stratégies conceptuelles dans l’art et la danse pour examiner des thèmes plus larges tels que la mémoire et l’histoire, la sexualité et la subjectivité.
À la Collection Lambert, le duo réagence une salle noire du sous-sol en discothèque minimaliste dans laquelle se manifestent leurs recherches sur la musique et l’héritage du compositeur africain-américain queer Julius Eastman.

Gerard & Kelly sur le site de la Galerie Marian Goodman : https://www.mariangoodman.com/artists/372-gerard-%26-kelly/
https://www.instagram.com/gerardandkelly/

Gerard & Kelly - Disss-co, 2023
Gerard & Kelly – Disss-co, 2023

Célia Gondol

Célia Gondol, danseuse et artiste plasticienne, inscrit son travail autant dans les domaines du champ chorégraphique et musical que dans ceux de l’astrophysique et de la physique fondamentale. Par le geste, l’artiste questionne les vitesses, les mouvements et les dimensions qui échappent à nos échelles. De sa pratique de la danse, naît une forme d’orchestration chorégraphique empruntant au principe de formation de convergence des individus. Elle s’entoure de collaborateurs dont elle investit les spécialités comme les véhicules de performances communes. Présentés à la Collection Lambert, les Ice Memories de Célia Gondol reprennent dans le verre soufflé les reliefs, les fossiles et les traces du désert de Platé, un site témoin d’une histoire géologique de plus de 250 millions d’années, celle de l’Océan Thétys.

Site de l’artiste : http://celiagondol.com/
https://www.instagram.com/celiagondol/

Célia Gondol - Ice Memories, 2022-2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Célia Gondol – Ice Memories, 2022-2023 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Pascal Hachem

Le travail de Pascal Hachem est intrinsèquement lié à la ville et plus particulièrement à celle qui l’a vu naître, Beyrouth, où l’instabilité du quotidien ne permet pas d’anticiper le lendemain. Cette incertitude quotidienne nourrit la perception qu’a l’artiste de l’avenir et explique la nature transitoire de son travail. Dans cette logique, la pratique de Pascal Hachem implique le plus souvent des actions de déplacement : celles de l’artiste lui-même ou des objets et formes de la vie quotidienne, omniprésents dans son travail. Les mises en scène ainsi élaborées par l’artiste placent le spectateur dans des positions aussi inconfortables que familières. À partir d’outils du quotidien, notamment des ustensiles de cuisine, qu’il destitue de leur fonction initiale, Pascal Hachem dépeint avec cynisme l’humanité.

Site de l’artiste : https://pascalhachem.net/
https://www.instagram.com/pascal_hachem/

Pascal Hachem - Spoonism, 2013
Pascal Hachem – Spoonism, 2013

Arash Hanaei

Arash Hanaei développe une pratique qui combine divers médiums – photographie, installation, vidéo – et technologies numériques. Fasciné par le langage universel de l’architecture et de l’urbanisme modernes, il tente de reconstruire et de déconstruire cette universalité pour révéler des espaces indéchiffrables dans l’espace bâti. Dans sa récente série de « dessins numériques », Arash Hanaei explore l’impasse que constitue l’architecture utopique en reproduisant des paysages de la banlieue parisienne des années 1960 à 1980, questionnant les absences d’idéaux exprimées dans le post-urbanisme. Les scènes qu’il crée sont à la fois fascinantes, oniriques et solitaires. Avec son installation Foggy Memo, l’artiste se penche sur l’esthétique des périphéries et invite les spectateurs à interpréter les utopies dans le paysage des villes inachevées.

Site de l’artsite : http://www.arashhanaei.com/cv.html
https://www.instagram.com/arashhanaei/

Arash Hanaei - Foggy Memo, 2023 Installation multimédia. Musique de Nima Aghiani. Images extraites de A Wash for Intimate Brain Parts, d’Arash Hanaei. Producteurs : Ag Galerie et Arash Hanei
Arash Hanaei – Foggy Memo, 2023 Installation multimédia. Musique de Nima Aghiani. Images extraites de A Wash for Intimate Brain Parts, d’Arash Hanaei. Producteurs : Ag Galerie et Arash Hanei

Ittah Yoda

Les artistes du duo Ittah Yoda s’inspirent de leur expérience multi-culturelle pour construire des mondes virtuels. Leur vaste recherche plastique vise une production d’installations multi-sensorielles. L’oeuvre d’Ittah Yoda est auto-génératrice, se citant elle-même tout en s’étendant peu à peu vers de nouveaux domaines à chaque collaboration, que ce soit avec un artisan, un technicien, un auteur, une intelligence artificielle, un glitch, des conditions environnementales ou encore une vie non-humaine. Ittah Yoda cherche à engendrer des expériences à la fois esthétiques et thérapeutiques qui restructureraient les modes de communication entre les êtres humains et non-humains, en favorisant le modèle symbiotique plutôt que hiérarchique. Pour cette exposition, le duo présente un ensemble de pièces portées par une même vitalité organique. Que ce soit en travaillant avec des pigments qu’il réalise, avec du bois de leur lieu de résidence ou avec les odeurs des grottes de Lascaux, il cherche à produire un espace de liberté pour une perpétuelle réinterprétation de l’identité et des relations entre les êtres et les espèces.

Site des artistes : https://ittahyoda.com/
https://www.instagram.com/ittahyoda/

Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Michel Jocaille

Michel Jocaille travaille à partir de sculptures et d’installations aux échelles diverses, pour la plupart composées d’assemblages de matériaux. Inspiré par l’esthétique camp, il la détourne pour mettre en avant son artificialité et son exagération, incarnées dans son travail par une forme d’extravagance théâtrale. C’est ainsi que se déploie au sein de la démarche de l’artiste une réflexion sur les systèmes référentiels et autoritaires qui fondent les constructions identitaires, en intégrant des références au culte du corps, aux notions de fluidité et d’hybridation. Les oeuvres de Michel Jocaille témoignent d’une recherche formelle et théorique visant à brouiller les hiérarchies entre les discours, à renverser les nomenclatures et les représentations imaginaires. Les cinq tableaux de Michel Jocaille présentés dans l’exposition sont vêtus d’une esthétique kitsch qui revendique avec une extravagance théâtrale une écologie queer égalitaire.

Site de l’artiste : https://jocaillemichel.com/
https://www.instagram.com/johnnyracaille/

Michel Jocaille - Exotic sweetness a magical time, 2024
Michel Jocaille – Exotic sweetness a magical time, 2024

Nika Kutateladze

À l’origine des projets de Nika Kutateladze se trouve une réflexion sur l’espace habitable et sa capacité à rendre compte de mémoires intimes et collectives, avec pour terrain d’études privilégié son pays natal. Décontextualisant et confrontant matériellement des espaces issus de réalités distinctes, il pose notamment un regard sur les transformations en cours en Géorgie, qui a connu d’importants mouvements de population depuis le début des années 1990 en raison, entre autres, de l’exode rural. Prenant souvent la forme d’installations et de sculptures, les oeuvres de Nika Kutateladze se font reflets du consumérisme quotidien et des questions environnementales qui en découlent. Ses derniers travaux artistiques remettent en question le processus de transformation des espaces architecturaux et de l’environnement urbain en général. Investissant la totalité du grand couloir de l’hôtel de Montfaucon, l’artiste propose une intervention totale et quasi scénographique qui évoque la protection de l’intimité, s’inspirant de celle des maisons de sa Géorgie natale.

Nika Kutateladze sur le site de Artbeat Gallery : https://www.galleryartbeat.com/en/artist/20/nika-kutateladze
https://www.instagram.com/n_kutateladze/

Nika Kutateladze - To protect my house while I’m away, 2018 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Nika Kutateladze – To protect my house while I’m away, 2018 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Anne Le Troter

Anne Le Troter mêle installation sonore, performance, théâtre, littérature et poésie pour travailler la plasticité du langage et la façon dont nos mots sont pétris d’injonctions capitalistes de rendement. Elle s’est notamment intéressée aux discours procéduriers des enquêteurs téléphoniques, à la litanie normée des sondeurs politiques ou aux autoportraits calibrés des donneurs de sperme. Pour cette exposition, Anne Le Troter s’est inspirée d’un spectacle de 1958 de Merce Cunningham dans lequel il danse, équipé d’un costume-chaise. Anne Le Troter explore, elle, ici, la notion de corps-enceinte, caisse de résonance autant que forteresse assiégée, de corps contraint, comme Merce Cunningham l’a été, couplé avec un objet inanimé. Elle raconte l’épuisement du corps individuel et du corps collectif – espaces forcément politiques –, leurs assignations, comme autant de roleplays empruntant encore au vocabulaire pornographique. L’artiste investit une salle de la Collection Lambert avec Le corps living room, une installation sonore dans laquelle les parlants cherchent à s’extraire de la société et choisissent l’immobilisation comme acte de résistance.

Sur le site de la galerie frank elbaz : https://www.galeriefrankelbaz.com/665/artists-le-troter-overview
https://www.instagram.com/anneletroter/
À lire cette critique de Camille Velluet dans Zérodeux à propso de Le Corps Living Room à la galerie frank elbaz : https://www.zerodeux.fr/guests/anne-le-troter-5/

Anne Le Troter - Le corps living room, 2023
Anne Le Troter – Le corps living room, 2023

Matisse Mesnil

Matisse Mesnil se distingue par son utilisation unique et quasi exclusive du métal. Sa méthode, brute et intense, contraste fortement avec la délicatesse des oeuvres qu’il crée. Par l’usage de l’arc électrique, il inscrit dans la matière rigide des scènes douces voire naïves : natures mortes, bouquets de fleurs, chaises de jardin en plastique. Cette juxtaposition produit une tension visuelle surprenante, mêlant la dureté industrielle du métal à la finesse de ses dessins. Dans chaque pièce de Matisse Mesnil, la technique rigoureuse rencontre une expressivité poétique, offrant un regard neuf sur les potentialités du métal en tant que toile. Dans cette exposition, l’artiste se joue de l’opposition entre le dessin figuratif presque naïf et un support arte povera radical quasi industriel, pour créer un grand quadriptyque évoquant un paysage et des natures mortes, ainsi qu’un autel accueillant le visiteur au coeur de la cour de Montfaucon.

Matisse Mesnil sur le site pal project : https://pal-project.com/expositions/sopravvivo/
https://www.instagram.com/matissemesnil/

Matisse Mesnil - Le Marais, 2023
Matisse Mesnil – Le Marais, 2023

Daniel Otero Torres

La pratique de Daniel Otero Torres se distingue par sa technique unique, à la frontière entre le dessin et la sculpture, marquée par un trait photoréaliste appliqué à des structures monumentales en métal découpé. La plupart de ses œuvres représente un collage visuel et historique créé à partir de différentes sources : archives, livres anciens, journaux contemporains ou ressources en ligne. L’artiste s’intéresse aux notions de résistance et de révolution, à travers l’étude de communautés marginalisées, mais aussi de manifestation, de célébration et de réconciliation en tant que moteurs du changement social. Plus récemment, les préoccupations écologiques ont également trouvé leur place dans son travail en tant qu’élément indissociable de l’activisme contemporain dont il fait son objet d’étude. Dans les deux pièces qu’il présente à la Collection Lambert, Daniel Otero Torres questionne à la fois l’avenir de la biodiversité alors que l’agriculture intensive prolifère ainsi que notre rapport à la révolution à travers une installation qui revient sur les violences des forces armées lors de manifestations.

Daniel Otero Torres - La Révolución del maíz, 2021 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Daniel Otero Torres – La Révolución del maíz, 2021 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Margot Pietri

Margot Pietri explore les relations et les affects que l’humain entretient avec la technique. Elle produit des récits de science-fiction dans lesquels les modalités de nos relations – aux objets, à la machine, à l’environnement, aux images ou aux autres – sont renégociées et imagine de nouvelles manières de vivre dans une société sans hiérarchie, où les rythmes de vie et de travail ne sont pas calés sur un utilitarisme présupposé. De ces récits naissent des sculptures et peintures aux fonctionnalités altérées qui évoquent des paysages artificiels.
Au sous-sol de la Collection Lambert, les sculptures de Margot Pietri, objets d’un mode de vie capitaliste (panneaux publicitaires, distributeurs automatiques, etc.) dont les fonctions sont souvent détournées, posent un regard poétique et cynique sur notre société moderne d’hyperconsommation, de performance et de productivité.

Site de l’artiste : http://margotpietri.com/
https://www.instagram.com/margot.pietri/

Margot Pietri - plan d’évasion, 2023
Margot Pietri – plan d’évasion, 2023

Luca Resta

Le travail de Luca Resta prend sa source dans les objets. Comme une sorte d’archéologie contemporaine, il explore le vertige de la série à travers des collections infinies de formes quotidiennes (couverts jetables, emballages de supermarché, boîtes en carton, etc.) qui deviennent la source de ses créations, prenant souvent la forme d’installations. Son vocabulaire artistique – série et homologation, réplication et standardisation, accumulation industrielle et itération mécanique – entre en dialogue avec ses dispositifs et son habileté manuelle, lorsqu’il cache la sculpture derrière l’idée de forme « commune ». Devant les oeuvres de Luca Resta, le spectateur fait ainsi l’expérience de la puissance esthétique des techniques sculpturales de l’artiste qui transforme les objets du quotidien, proposant une expérience du « presque invisible ». Dans son installation Monuments, faite de blocs de marbre taillés et camouflés comme des produits de grande consommation qu’il agence sur des étagères métalliques à la manière des lieux de stockage, Luca Resta crée de nouveaux contextes narratifs où notre quotidien se voit transformé et réinterprété.

Site de l’artiste : https://www.lucaresta.com/
https://www.instagram.com/_lucaresta_/

Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Edgar Sarin

Le travail d’Edgar Sarin témoigne de la recherche formelle d’une harmonie politique et environnementale, dont l’homme serait le catalyseur. Il a notamment été remarqué pour son travail sur la ruine génératrice et pour sa remise en question de l’espace d’exposition et de la place de la réception. Considérant qu’il s’agit de prendre en compte le spectateur à partir du moment où il arrête d’en être un, Edgar Sarin s’inscrit ainsi dans une lignée « méditerranéenne » de la conception de l’oeuvre d’art, qui s’élabore par porosité avec le milieu. Il défend une approche qui favorise l’apprentissage du monde et du matériau – une forme raisonnée du geste créateur – qu’il développe dans un corpus sculptural pluriel et précis. Dans un ensemble réalisé in situ, sans plan préalable, l’artiste propose deux oeuvres en dialogue : une sculpture effigie d’architecture et une grande toile aux inspirations musicales.

Site de l’artiste : https://lamediterranee.eu/
https://www.instagram.com/lamediterranee666/

Edgar Sarin - Post Razzle-Dazzle, 2024 et monument, 2024
Edgar Sarin – Post Razzle-Dazzle, 2024 et monument, 2024

Ugo Schildge

Les travaux d’Ugo Schildge nous invitent à examiner plus en détail l’impact de l’homme sur la nature. À travers le motif de l’engrenage, symbole de la révolution industrielle, l’artiste s’est d’abord intéressé à l’articulation entre image et mouvement, mettant en avant le pouvoir de la mécanique tout en lui permettant de réinventer la perception que nous avons de l’image. Par ses œuvres, sorte de poèmes terrestres et matériels, Ugo Schildge nous incite à jeter un autre regard sur le processus de pollinisation – à la base même de notre écosystème – exprimant sa conscience des liens qui nous relient les uns aux autres et de la place que nous nous devons de prendre au sein de la nature qui nous donne vie. La représentation des motifs de végétation, fruits et fleurs, permet à l’artiste de mettre en avant leur finesse et leur délicatesse, tout en les enveloppant dans le béton, comme une armure incassable, questionnant ainsi notre rapport au temps et la permanente dualité entre le vivant et l’immortel.

Site de l’artiste : https://www.ugoschildge.com/
https://www.instagram.com/ugoschildge/

Ugo Schildge - Nature morte mécanique, 2023
Ugo Schildge – Nature morte mécanique, 2023

Laura Sellies

Laura Sellies définit sa pratique comme étant collaborative, installative et dramaturgique. Collaborative car, selon elle, l’art est un processus collectif, que l’on réfléchit et met en oeuvre à plusieurs, un espace où les différences s’affirment en s’accordant. « Installative », car elle place des sculptures, des personnes, des images, des sons dans l’espace et dans le temps, les mettant en relation de manière à constituer entre elles un commun durable et relativement autonome dont elle observe ensuite les développements potentiels. « Dramaturgique », car ses installations racontent des histoires sans les dire, font de ces sculptures, corps, mouvements et sons, les éléments d’un langage muet où s’incarnent récits oubliés et mythes à venir. L’installation de Laura Sellies présentée à la Collection Lambert est le point de départ d’un projet plus large prenant la forme d’un long métrage. Trois petites filles y racontent la création d’un jeu, d’un monde, dans une forêt devenue machine sonore.

Site de l’artiste : https://laurasellies.com/informations/biographie
https://www.instagram.com/laurasellies/

Laura Sellies - Soit je suis morte soit je deviens oiseau, 2022 - Revenir du présent - La Collection Lambert
Laura Sellies – Soit je suis morte soit je deviens oiseau, 2022 – Revenir du présent – La Collection Lambert

Erwan Sene

Artiste plasticien et musicien, le travail d’Erwan Sene s’appuie sur une oeuvre sculpturale qui se déploie sur plusieurs niveaux et s’écrit au futur antérieur. Se laissant entraîner sur la pente d’un quotidien multiple qu’il réimagine comme autant d’histoires énigmatiques, sa pratique reconsidère sa propre façon de vivre et de digérer les objets qui l’entourent. Il crée des mises en scène avec une multitude de matériaux, entre rémanence baroque et surréalisme quotidien, et aborde les thèmes de la contamination, de l’idiopathie et de la science-fiction. Au sous-sol de la Collection Lambert, l’artiste développe un étrange écosystème, ensemble de mobilier urbain dystopique et interconnecté, vibrant et dialoguant à l’aide d’un langage qu’il a conçu.

Erwan Sene sur le site de la Galerie Balice Hertling : https://www.balicehertling.com/artists/erwan-sene/
https://www.instagram.com/erwansene/

Erwan Sene - Hunter Balancing Park 3, 2023
Erwan Sene – Hunter Balancing Park 3, 2023

Pol Taburet

L’œuvre de Pol Taburet est un mélange iconoclaste de références liées aux origines caribéennes de l’artiste, aux traditions vaudoues syncrétiques de la région, à la culture contemporaine au sens large, ainsi qu’à la peinture classique. Son style de peinture se fonde autant sur l’usage de l’aérographe que de la peinture acrylique tandis que ses influences, plurielles, appartiennent clairement aux canons traditionnels de l’histoire de l’art. De Francis Bacon au baroque en passant par l’art sacré, l’impressionnisme et le symbolisme, ces influences sont visibles sans pour autant dominer l’œuvre. Artiste instinctif, les thèmes, les formes, les compositions et les significations de Pol Taburet se révèlent généralement à lui au fur et à mesure qu’il peint.
Fork Melody montre des clous rouillés mais toujours acérés, reflétant nos traumatismes et notre force intérieure face au temps.

Pol Taburet sur le site de la galerie Mendes Wood DM : https://mendeswooddm.com/artists/293-pol-taburet/
https://www.instagram.com/yves_ciroc/

Pol Taburet - Fork Melody, 2023
Pol Taburet – Fork Melody, 2023

Dune Varela

Dune Varela explore la photographie argentique, jouant tant de sa dimension d’héritage que de son caractère fragile et temporaire. À travers l’image, qu’elle travaille comme une ruine, elle interroge l’enchevêtrement des temps et des époques, pour imaginer une archéologie du futur. Délaissant l’impression classique sur surface plane, elle apporte à l’image une dimension sculpturale à travers des matériaux tels que la céramique, le marbre ou le béton, donnant ainsi un corps inédit à la photographie, à la fois fragile et durable. Sa recherche se déploie désormais dans les champs de la vidéo et du cinéma.
Pour cet ensemble de pièces réalisées en 2023, l’artiste s’est rendue en Italie dans les carrières de Carrare pour photographier des blocs et des plaques de marbre extraits de la roche, ensuite imprimées sur des fragments de marbre. À travers ce processus de mise en abîme, tant géologique que géographique, l’artiste fait ressurgir en trompe l’oeil une vision de la ruine ancrée dans le temps présent et donne naissance à une archéologie en devenir.

Site de l’artiste : http://www.dunevarela.com/
https://www.instagram.com/dunevarela/

Dune Varela – Météorite, 2023 - Revenir du présent - La Collection Lambert en Avignon invite POUSH
Dune Varela – Météorite, 2023 – Revenir du présent – La Collection Lambert en Avignon invite POUSH

Marie de Villepin

Sur papier ou sur toile, les œuvres de Marie de Villepin, profondément marquées par ses rencontres avec de nombreux artistes, tels que Zao Wou-Ki, Roberto Matta et Anselm Kiefer, se déroulent comme un long carnet de voyages. Art de combat et de survie, entre figuration et abstraction, ses peintures transcrivent doutes, solitude, rêves éveillés qui assaillent l’artiste. Elle fait éclore, sur des rythmes anciens ou nouveaux, des paysages inconnus, tout un peuple de créatures et de machines imaginaires. À l’occasion de cette exposition, Marie de Villepin présente Venus Flowers et Pommes, deux natures mortes expressives à la frontière de l’abstraction.

Site de l’artiste : https://www.mariedevillepin.com/
https://www.instagram.com/mariedevillepin/

Marie de Villepin - Venus Flowers, 2023
Marie de Villepin – Venus Flowers, 2023

Félix Touzalin

Félix Touzalin associe ses savoir-faire de sculpteur et d’artisan du métal aux pratiques de la danse pour créer des installations et des performances. Par le biais de ces techniques mais également de la vidéo et de l’installation, il explore autant les possibilités physiques du corps que ses ressorts psychologiques. Il trouve son équilibre dans des gestes lents, des postures proches parfois du yoga, ainsi que dans tout un rapport au cadre, à l’espace, au territoire qui l’a conduit vers une recherche sur le « corps Atlas », inspiré du Titan, au corps athlétique et « cartographique ». Avec ses spectacles à la poésie souvent minimaliste, il nous entraîne dans un état des lieux intime pour découvrir, à travers des métamorphoses, les étapes d’un long apprentissage artistique jusqu’à l’éclosion d’un artiste doublé d’un danseur. Félix Touzalin présente une installation activée à plusieurs occasions pendant la durée de l’exposition, explorant les enchâssements entre le corps et le métal, la coévolution du biologique et du minéral.

https://www.instagram.com/felixtouzalin/

Félix Touzalin - Châsse, a drooling lap, 2023
Félix Touzalin – Châsse, a drooling lap, 2023

Xolo Cuintle

Xolo Cuintle produit des oeuvres qui bousculent les frontières entre la sculpture, le mobilier et le décor. De ses quatre mains, le duo conçoit des sculptures en béton et transforme ce matériau solide et inerte en un terreau fertile où s’épanouit une ornementation d’inspiration organique. Les créations de Xolo Cuintle, minutieusement assemblées et disposées en fonction de chaque environnement, se jouent des objets qui constituent les topographies de notre quotidien, et construisent des espaces hétérotopiques, à la frontière du rêve et du simulacre. Au sein de ces scènes désertées et pétrifiées se dessine une nouvelle grammaire de formes qui, par strates, façonne une lecture du temps. L’ensemble des pièces présentées par Xolo Cuintle dans cette exposition reprend des motifs organiques sur des sculptures et bas-reliefs faits d’un béton sableux, presque mouvant. De cette matière minérale et inerte, le duo fait naître des formes animées par des lignes serpentines.

Xolo Cuintle sur le site de DS Gallerie : https://dsgalerie.com/fr/artistes/xolocuintle
https://www.instagram.com/xolo_cuintle/

Xolo Cuintle - Post Gebrüder Thonet N°7028 Rocking Chair, 2022
Xolo Cuintle – Post Gebrüder Thonet N°7028 Rocking Chair, 2022

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