« Après Babel, traduire » au MuCEM, Marseille

Avec « Après Babel, traduire », le MuCEM présente, jusqu’au 20 mars 2017, une exposition riche et éclairante qui nous interpelle sur la diversité des langues dans ce monde globalisé et chaotique.

Après Babel, traduire au MuCEM. Vue de l'exposition.  Babel, malédiction ou chance : politiques de la langue
Après Babel, traduire au MuCEM. Vue de l’exposition.  Babel, malédiction ou chance : politiques de la langue

Barbara Cassin, directrice de recherche au CNRS, philologue, philosophe et commissaire de l’exposition, souligne que ce projet s’est construit autour de deux idées principales:

  • « La traduction, comme passage d’une culture à l’autre, est ce qui a constitué “notre” civilisation en méditerranée ».
  • « La traduction, c’est un savoir-faire avec les différences, c’est stationner entre les langues, entre les cultures et les faire se croiser. Et c’est ce dont nous avons besoin aujourd’hui. »

Citant cette phrase de Umberto Eco : « La langue de l’Europe c’est la traduction », elle ajoute « ce savoir-faire avec les différences constitue un apprentissage de ce pourrait être un citoyen aujourd’hui, au XXIe siècle ».

« Après Babel, traduire » rassemble des objets du quotidien, comme des œuvres d’art ou des manuscrits de l’antiquité jusqu’à nos jours. Aux pièces issues des collections du MuCEM s’ajoutent de nombreux prêts d’institutions françaises et internationales (Centre Pompidou, BnF, Louvre, Prado, Musée d’art et d’histoire de Genève, Institut du Monde Arabe…), de galeries et de collections particulières.

Le parcours s’articule en trois grandes parties :

  • Babel, malédiction ou chance : politiques de la langue,
  • Les flux et les hommes et
  • Traduisibles/intraduisibles.

Un compte rendu de visite en résumera bientôt l’essentiel.

Il faut souligner la fluidité de ce parcours qui sert avec pertinence le propos de l’exposition. L’intelligence de l’accrochage construit des rapprochements qui éclairent le discours. Il enchaîne, avec à-propos, les moments d’émerveillements, les interrogations plus graves tout en laissant, çà et là, place à l’humour et à l’émotion. D’opportunes ruptures de rythme relancent avec subtilité l’intérêt du visiteur.

« Après Babel, traduire » bénéficie d’une scénographie particulièrement remarquable de Jacques Sbriglio. Avec discernement, il tire parti de cet espace en « U » assez compliqué. La différence de hauteur sous plafond entre les deux salles rectangulaires comme la longue et étroite « coursive » qui les réunit ont souvent créé des ruptures épineuses ou des tunnels un peu monotones.

Jacques Sbriglio réussit à faire oublier les contraintes de ce plateau. Les cimaises légèrement décalées éliminent la monotonie de l’espace central. Tout en offrant des perspectives qui rythment le parcours, elles donnent en même temps l’impression d’une continuité à ces salles disparates. Les vitrines s’intègrent avec équilibre et discrétion dans les cimaises. L’utilisation de verre antireflet et une lumière parfaitement maîtrisée assurent un excellent confort au spectateur.

Les textes de salle, en français, en anglais plus en une troisième langue différente à chaque fois, accompagnent avec efficacité le visiteur. Lorsque cela est nécessaire, des cartels développés permettent, en quelques phrases et moins de dix lignes, de comprendre l’essentiel de l’œuvre présentée.

Le catalogue, coédité avec Actes Sud, rassemble sous la direction de Barbara Cassin des contributions souvent très éclairantes de Souleymane Bachir-Diagne, Jean-Marie Borzeix, Xiaoquan Chu, Patricia Falguières, Yasmina Foehr-Janssen, Thierry Grillet, Jacques Leenhardt, Alain de Libera, Jean-Luc Marion, Marie-José Mondzain, Xavier North, Gisèle Sapiro, Roland Schaer, Olivier-Thomas Venard et Anthony Vidler.
Une grande partie des œuvres exposées illustrent ces articles. La liste complète est renvoyée en fin d’ouvrage. On regrette l’absence d’une bibliographie et l’on aurait apprécié des reproductions de meilleure qualité.

« Après Babel, traduire » est accompagnée, comme toujours au MuCEM, d’une importante et très riche programmation culturelle et scientifique, à découvrir sur le site du musée.

Un dossier pédagogique permet aux enseignants et aux autres de préparer ou compléter son expérience de visite. Il est disponible en téléchargement sur le site du MuCEM.

Barbara Cassin a été assistée par Sophie Bernillon, conservateur des bibliothèques au MuCEM pour le commissariat exécutif et par un conseil scientifique composé de Annie Berthier, Jean-Marie Borzeix, Patricia Falguières, Thierry Grillet, Alain de Libera, Jacques Leenhardt, Charles Malamoud, Charles Mela, Xavier North, Carlo Ossola, Roland Schaer et Danièle Wozny.

Il ne faut pas manquer cette remarquable exposition scientifique, mais aussi très politique !

En savoir plus :
Sur le site du MuCEM
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Sur le site du labex TransferS (ENS, Collège de France, CNRS et PSL)

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