Quelques impressions sur Art-o-rama 2024


Depuis 2007, Art-o-rama 2024 s’est imposé comme l’événement incontournable qui marque la rentrée de l’art contemporain à Marseille. Pour cette 18édition, 42 galeries et 18 éditeurs en art et en design et un espace indépendant étaient invités à occuper du 30 août au 1er septembre les espaces de La Cartonnerie et le plateau du 3° étage de La Tour à la Friche la Belle de Mai.

Depuis le mémorable « By The Sea » dans le hangar du J1 en 2018, chaque année on a souligné un assagissement progressif du salon, des accrochages plus conventionnels, des scénographies de moins en moins audacieuses et radicales.
Art-o-rama 2024 confirme hélas cette tendance. L’an dernier, on se demandait s’il faudrait bientôt faire le deuil des propositions intrépides, singulières, parfois provocatrices, qui illustraient la ligne artistique de certaines galeries. Après cette édition, on peut s’interroger sur ce qui reste dans Art-o-rama de l’esprit d’Art Dealers, l’atypique foire d’art contemporain imaginée par Roger Pailhas, à part le prix qui porte son nom…

Art-o-rama 2024 - Photo Friche la Belle de Mai
Art-o-rama 2024 – Photo Friche la Belle de Mai

Malgré tout, Art-o-rama 2024 continue à mettre en avant la jeune création, en conservant une large diversité dans les multiples propositions exposées.
On renouvèlera donc nos félicitations à l’équipe de Fræme, productrice d’Art-o-rama, pour son organisation sans faille et son accueil très professionnel en direction des exposants, des artistes, des collectionneurs et des visiteurs.

Art-o-rama 2024 : Du côté des galeries

Avec 15 pays représentés, Art-o-rama 2024 confirme une programmation internationale avec près des trois quarts de ses participants. Le salon renouvelle en grande partie sa sélection de galeries avec l’arrivée de 243 Luz (Margate), Afternoon (Vancouver), BLOOM (Düsseldorf), Brigitte Mulholland (Paris), Chiquita Room (Barcelona), Bleu Satellite Coreau, (Bordeaux), BDES BAINS (Londres), Dvir (Tel Aviv/Paris/Brussels), Suzanne Tarasieve (Paris), Georges-Philippe et Nathalie Vallois (Paris), house of spouse (Vienne), Isabel Hurley (Malaga), Longtermhandstand (Budapest), MICKEY (Chicago), Sherbet Green (Londres), SET ESPAI D’ART (Valence), Tache Art Gallery (Barcelone), Triangolo (Crémone), WVK (Zug) et Zyrland Zoiropa (Berlin).

Peu de coups de cœur pour cette édition, à l’exception toutefois de « Télescope – Lancer le regard », une très intéressante proposition de Bleu Satellite – Coreaú qui a fait l’objet d’une précédente chronique.

Télescope - Lancer le regard, une proposition de Bleu Satellite - Coreaú pour Art-o-rama 2024
Télescope – Lancer le regard, une proposition de Bleu Satellite – Coreaú pour Art-o-rama 2024

Parmi les projets que nous avons remarqués, on peut citer le solo show de Sara Favriau présenté par la Galerie Maubert. Sa présentation s’organisait autour de la sculpture-projet Le brin d’une herbe jaillit à qui la vie déborde, que l’on avait découvert lors de sa sortie d’une résidence voyons voir au Parc forestier de la Poudrerie (Miramas) et qui avait été un des événements marquants du PAC 2024. Les crins (2022), une installation composée de copeaux de bois « recyclés » provenant d’œuvres sculptées précédemment, occupaient une fissure dans le mur du fond. Ces deux pièces étaient complétées par un ensemble d’œuvres fonctionnelles entre art et design créées avec l’association COLAAB.

Sara Favriau – Galerie Maubert – Art-o-rama 2024

Dans un curieux stand qui s’enroulait sur lui-même, In Situ fabienne leclerc exposait un ensemble très remarqué d’œuvres de l’artiste argentine Marina De Caro.

Marina De Caro - In Situ fabienne leclerc - Art-o-rama 2024
Marina De Caro – In Situ fabienne leclerc – Art-o-rama 2024

Elles étaient accompagnées par celles de Ramin et Rokni Haerizadeh & Hesam Rahmanian. Le travail de ce trio iranien est lauréat du prix Prix Pébéo pour la peinture dont le jury était composé d’Éric et Patricia Chaveau, Kathy Alliou et Isabelle Reiher.

Ramin Haerizadeh, Rokni Haerizadeh & Hesam Rahmanian - In Situ fabienne leclerc - Art-o-rama 2024
Ramin Haerizadeh, Rokni Haerizadeh & Hesam Rahmanian – In Situ fabienne leclerc – Art-o-rama 2024

Pour sa première participation à Art-o-Rama, BLOOM présentait une exposition personnelle de l’artiste française Elsa Wreth dans un des rares accrochages radicaux.

Art-o-rama 2024
Elsa WrethBLOOM– Art-o-rama 2024

Chez Dvir, nouvelle galerie arrivée cette année sur le salon, on pouvait remarquer les grands dessins à l’encre sur toile de Oshay Green dont l’approche improvisée aurait été influencée par des musiciens de jazz comme Pharaoh Sanders et Sun Ra…

Art-o-rama 2024
Oshay Green – Dvir – Art-o-rama 2024

La galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois offrait à Julien Berthier une exposition personnelle. Son empilement de cailloux en résine en forme de siège avec vue sur un soleil couchant (Raggio Verde) attirait particulièrement l’attention des visiteurs…

Art-o-rama 2024
Julien Berthier – galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois – Art-o-rama 2024. Photo : galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois

sans titre (Paris) partageait son espace avec Union Pacific (Londres) pour un duo assez étrange qui réunissait deux très belles œuvres de Caroline Mesquita et un curieux ensemble de sculptures de Wei Libo parfois associées à du mobilier de récupération.

Caroline Mesquita et Wei Libo – sans titre et Union Pacific – Art-o-rama 2024

Les galeries aurichiennes Sophie Tappeiner et City Galerie Wien exposaient avec sobriété le travail deux deux femmes : Anna Zemánková, née en 1908 en Moravie et Xenia Bond, née à Londres en 1992.

Art-o-rama 2024
Anna Zemánková et Xenia Bond – Sophie Tappeiner et City Galerie Wien – Art-o-rama 2024

Autre association, celle de Editorial et Drifts, venus de Vilnius avec un projet de deux jeunes artistes qui combinait les peintures de l’autrichienne Vika Prokopaviciute et les sculptures textiles de la lituanienne Morta Jonynaité. Cette proposition bénéficiait du soutien de la saison de la Lituanie en France.

Art-o-rama 2024
Vika Prokopaviciute et Morta Jonynaité – Editorial et Drifts – Art-o-rama 2024

Chez Brigitte Mulholland on pouvait voir d’étranges et belles céramiques d’Emily Orta dont le travail mérite sans doute d’être suivi.

Emily Orta – Brigitte Mulholland – Art-o-rama 2024

On a retrouvé avec intérêt le travail de Basile Ghosn parmi les multiples artistes exposés dans un accrochage intitulé Administrations of Relationships proposé par Terzo Fronte, un espace indépendant invité par Art-o-rama 2024. Sa programmation se déploie entre Rome et Athènes avec un mode de fonctionnement qui emprunte à la littérature et qui est « construite autour de chapitres conçus comme une expérience narrative, à la manière d’un livre vivant ». Sans doute un des projets les plus curieux de cette édition…

Administrations of Relationships proposé par Terzo Fronte – Art-o-rama 2024

Le solo show de Samir Laghouati-Rashwan proposé par SISSI club (Marseille) attirait particulièrement l’attention du public. On pouvait y découvrir une nouvelle série de sculptures en résine (Only good vibes). Elle semble avoir quelques rapports avec le purple drank (ou lean), un cocktail à visée psychotrope composé de sirop contre la toux à base de codéine, d’antihistaminiques, d’anxiolytiques populaire dans la communauté hip-hop du sud des États-Unis depuis les années 1990, mais pas que… Une manière sans doute pour l’artiste de poursuivre ses recherches et expérimentations autour de la quinine et de la résine.

Samir Laghouati-Rashwan – SISSI club – Art-o-rama 2024

Art-o-rama 2024 : Du côté des éditeurs

Comme les deux dernières années, les éditeurs d’art et de design occupaient l’intégralité du plateau au 3° étage de La Tour en compagnie de plusieurs projets associés et du Show Room. Dans une ambiance étouffante, où la découverte d’un éventail est un réel bonheur, on retrouvait la sensation d’un trop-plein et les difficultés à apprécier et parfois même à voir les pièces exposées malgré les efforts des éditeurs.

Les quatre artistes sélectionné·es par Ghassan Salameh pour le Prix Région Sud Design occupait un espace à l’entrée du plateau. Celles et ceux choisis par Francesco Tenaglia pour le Prix Région Sud Art étaient confiné·es dans au fond du 3° étage de La Tour. On ne peut que regretter cette improbable association avec la section Edxition du salon. Elle ne donnait vraiment pas la possibilité d’apprécier correctement leur travail, notamment celui de Théo Combaluzier, de Noria Kaouadji, de Cassandra Naigre et de Marie Perraud

Le Prix Région Sud Design a été attribué par Zoé Saudrais grâce au vote des galeries et éditeurs exposants sur le salon. Le Prix Région Sud Art a été décerné à Cassandra Naigre par un jury composé de Stanislas Colodiet, Caroline Pelletti Victor et Stephanie Airaud.

Du coté des projets associés, coincés parmi les éditeurs, on pouvait découvrir le travail de Glam Gargoyle, Yadanar Win, Artyom Go et Şener Yılmaz Aslan présenté par l’atelier des artistes en exil. A l’autre extrémité du plateau, le Fonds de Dotation Maison Mode Méditerranée exposait deux des Sirènides de Amaury Darras, lauréat de la bourse Heritage & Culture.

Parmi les éditeurs, on retiendra la très belle installation de Tchikebe qui occupait le même mur qu’en 2023 avec entre autres une sérigraphie de Lieven De Boeck (The First Task of Art, 2024), couronné par le Prix Coco Beach de l’Artothèque de Villeurbanne.

Art-o-rama 2024 - Edition & Design
Tchikebe – Art-o-rama 2024 – Edition & Design. Photo : Tchikebe

La peau de l’ours présentait « Antique Bauhaus » une exposition personnelle très réussie du céramiste François Bauer.

Art-o-rama 2024 - Edition & Design
François Bauer – La peau de l’ours – Art-o-rama 2024 – Edition & Design

Modulab (Prix Rendez-vous du design) montrait un bel ensemble de l’artiste français Charles Kalt.

Art-o-rama 2024 - Edition & Design
Charles Kalt – Modulab – Art-o-rama 2024 – Edition & Design

Nathalie Dewez et La Traverse proposaient RE-USE, l’amorce d’une exposition qui aura lieu à la galerie La Traverse à Marseille en novembre prochain avec entre autres des pièces de Rikkert Paauw, Rotor, Paul Emilieu, Nathalie Dewez.

Art-o-rama 2024 - Edition & Design
Nathalie Dewez et La Traverse RE-USE – Art-o-rama 2024 – Edition & Design

Dans la confusion du salon, on a failli ne pas voir les superbes objets de Samy Rio qu’exposait la Fondation Thalie.

Art-o-rama 2024 - Edition & Design
Samy Rio – Fondation Thalie – Art-o-rama 2024 – Edition & Design. Photo Fondation Thalie

Comme l’an dernier et au même endroit, Moly-Sabata avait réinstallé son Moly shop, boutique de céramique utilitaire. Celles et ceux qui avaient apprécié par le passé les remarquables expositions imaginées par Joël Riff apprécieront à sa mesure l’éventuelle pérennisation de cette boutique…

Art-o-rama 2024 - Edition & Design
Moly-Sabata – Art-o-rama 2024 – Edition & Design. Photo : Moly-Sabata

On a eu plus de sympathie pour La Saison du T-shirt imaginée par Cédric Aurelle et son invitation faite à plusieurs artistes d’envisager le T-shirt comme un espace d’exposition. Du Printemps de l’Art Contemporain jusqu’à Art-o-rama, Estel Fonseca, Basile Ghosn, Katia Kameli, Katharina Schmidt, Ursula Döbereiner, Yoan Sorin, Camille Soualem et Loreto Martínez Troncoso ont créés en 30 exemplaires de superbes T-shirts, lors de sept rendez-vous au TWALI à Belsunce. Avant de quitter Marseille pour le Bénin, Cédric Aurelle tenait la boutique dans une intense réflexion sur les rôles du critique, du curateur et du marchand…

La Saison du T-shirt à Art-o-rama 2024

Avant de terminer ce compte rendu quelques mots sur les prix attribués à des projets qui n’ont par attiré mon attention (sans doute à tort)…

Le Prix Roger Pailhas pour le stand le plus audacieux a été remis à Zyrland Zoiropa (Berlin) par un jury composé de François Culioli, Benoit Doche de Laquintane, Josée et Marc Gensollen, Edgar F. Grima, Joseph Kouli et Hervé Lebrun.

Le Prix François Bret a été remis à Charles-David Gnangoran en art et à Océane Pilette en design. Le jury était composé de Jean-Noël Bret, Inge Linder-Gaillard, Salma Mochtari, Jérôme Pantalacci, Catherine Soria et Vincent Tuset-Anres.

Le Prix Coco Beach par l’Artothèque de Villeurbanne a été remise à Anri Sala, représenté par Keijiban, Kanazawa par un jury composé de artothèque de Villeurbanne, Valérie Sandoz and Isabelle Reiher.

Le prix BECAUSE OF MANY SUNS a été décerné hier à l’artiste Max Guy, représenté par la galerie Good Weather, Chicago/Little Rock/North Little Rock, par un jury composé de la directrice du musée Madre, Eva Fabbris, de la commissaire d’exposition Giulia Pollicita et du collectionneur Francesco Taurisano.

Le Prix Marval a été remis à Stefania Batoeva, représenté par Public Galery (Londres) par un jury composé de Valeria et Marco Curina.

Le Prix Benoît Doche de Laquintane a été attribué à Lara Smithson, représenté par DES BAINS (Londres).

Le Prix Rendez-vous de l’art contemporain à été remis à Théophylle Dcx pour soutenir l’édition de son premier catalogue monographique en tant que lauréat du Prix Région Sud Art en 2023.

En savoir plus :
Sur le site d’Art-o-rama 2024
Suivre l’actualité d’Art-o-rama 2023 sur Facebook et Instagram

Articles récents

Partagez
Tweetez
Enregistrer