Leonor Antunes – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Pour l’été 2025, le Crac Occitanie propose une exposition remarquable de Leonor Antunes qui impose un passage à Sète avant la fin du mois d’août. « les inégalités constantes des jours de leonor* » est une adaptation du projet « da desigualdade constante dos dias de leonor* » que l’artiste portugaise a imaginé pour CAM – Centre d’Art Moderne de la Fondation Gulbenkian à Lisbonne où il était présenté l’hiver dernier.

Celles et ceux qui connaissent le travail de Leonor Antunes retrouveront ses suspensions sculpturales, qui interrogent à la fois les lieux qu’elles investissent, les matériaux et les techniques qu’elles mobilisent, tout en tissant des références multiples et des questionnements sur la place des femmes dans l’histoire de l’art, de l’architecture et du design. Pour les autres, cette découverte sera très certainement passionnante.

L’exposition trouve son origine dans l’architecture du CAM, inauguré en 1983 et conçu par l’architecte britannique Leslie Martin. Bien que sa femme et collaboratrice, Sadie Speight, ait contribué à ce projet, son nom est resté dans l’ombre. Pour Leonor Antunes, « le travail de Sadie Speight, qui était très présente dans le projet du CAM, n’a jamais reçu la reconnaissance qui lui revenait ». Pour « da desigualdade constante dos dias de leonor* », l’artiste s’est appuyée sur une importante recherche autour de figures féminines marginalisées de l’histoire de l’art et du design. À partir de plusieurs archives « ouvertes », elle a conçu une quarantaine de sculptures et un programme scénographique autour d’artistes femmes, parmi lesquelles Lina Bo Bardi, Ana Hatherly, Franca Helg, Marian Pepler, Charlotte Perriand, Mira Schendel et Sophie Taeuber. Par les citations de leur travail à travers des formes, des techniques, ou encore l’usage de leurs prénoms ou de leurs initiales dans les titres des sculptures, Leonor Antunes nous invite à reconsidérer ces artistes parfois méconnues.

Le titre de l’exposition est suivi d’un astérisque, marquant qu’il s’agit d’une citation. Leonor Antunes reprend en effet le titre d’un dessin d’Ana Hatherly (da desigualdade constante dos dias de Leonor, 1972), conservé dans la collection Gulbenkian. Réalisé l’année de naissance de Leonor Antunes, le nom de l’œuvre contient en outre son prénom, que l’on retrouve peut-être dans l’enchevêtrement de mots à peine lisibles du dessin de Hatherly, extraits d’un « vilancete », forme poético-musicale propre à la littérature portugaise.

Ana Hatherly, da desigualdade constante dos dias de leonor*, 1972
Ana Hatherly – da desigualdade constante dos dias de leonor*, 1972. CAM – Centro de Arte Moderna Gulbenkian, inv. 04DP2004.
Photo : Bruno Lopes © Poet and plastic artist

« les inégalités constantes des jours de leonor* »se présente comme une installation sculpturale qui transforme en profondeur les six salles du rez-de-chaussée du Crac Occitanie.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

La scénographie est puissamment marquée par forty five (2024), une grande sculpture au sol en liège incrustée de motifs en laiton et linoléum qui couvre l’ensemble des espaces du centre d’art.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – au sol : forty five, 2024. Liège, linoleum, cuivre – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Leonor Antunesforty five, 2024. Liège, linoleum, cuivre – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Elle modifie la perception kinesthésique et sonore du lieu, structurant et unifiant les salles et les reliant entre elles, les formes se prolongeant à travers les murs. Le motif de forty five reprend et agrandit celui d’un dessin original pour un tapis noué de Marian Pepler, une designeuse britannique proche de Sadie Speight. Pepler a conçu plus de quatre-vingt-dix modèles de tapis pour l’entreprise de son beau-frère, Gordon Russell Ltd, et a été consultante sur des projets architecturaux aux côtés de son mari, Dick Russell.

Marian Pepler - Forty-five, vers 1930
Marian Pepler – Forty-five, vers 1930. Tapis de laine nouée. Reproduction par Christopher Farr Cloth

Si l’exposition à Lisbonne bénéficiait en partie de la lumière naturelle, son adaptation au Crac est éclairée uniquement par une chaude lumière diffusée par des rampes verticales suspendues, comme les sculptures. En aluminium peint et en laiton, ces œuvres intitulées discrepâncias com M.P. (2024) tracent des lignes verticales et des cercles (globes d’ampoules) dans l’espace, citant d’une autre manière le dessin de Marian Pepler et renforçant la perception sensorielle et domestique de l’espace d’exposition.

Leonor Antunesdiscrepâncias com M.P., 2024. Aluminium thermolaqué, câbles électriques, laiton, câbles en acier inoxydable et ampoules électriques – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Toutes les œuvres sont suspendues au plafond de chaque salle à un maillage constitué d’une seule et même corde.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Les visiteur·euses sont invité·es à déambuler dans une forêt de sculptures où Leonor Antunes multiplie références, citations, motifs, techniques et savoir-faire. Comme à Lisbonne, aucun parcours n’est imposé : chacun·e est libre de suivre son regard et de s’engager dans une relation directe et instinctive avec l’espace et les œuvres.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Franca e Sophie #1, 2024. Perles de verre, fil en nylon et acier inoxidable thermolaqué au fond, discrepancies with S.S. #1, 2024. Cuir et fil de nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Les sculptures laissent passer le regard et dialoguent entre elles dans un labyrinthe de relations en perpétuelle recomposition. Filets, mailles, nœuds, résilles témoignent du soin apporté par Leonor Antunes à relier les figures artistiques et à tisser de nouvelles complicités. Les formes révèlent son intérêt pour le design textile, le tissage et les arts dits mineurs. Les œuvres en cuir, en osier ou en perles de verre affirment son attachement à des techniques, souvent dévalorisées, issues de l’artisanat, qu’elle défend avec force.

Plusieurs œuvres font référence à Sadie Speight, personnage central du projet.
Dans la grande salle située à gauche du centre d’art, une installation composée de trois sculptures attire immédiatement le regard. Elle résume de manière synthétique les enjeux de l’exposition.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Voilette, 2024. Bois de kambala, corde de chanvre et acier galvanisé ; caipiras, capiau, pau a pique, 2019. aluminium, aluminium thermolaqué, cable en acier inoxydable Courtesy galerie Luisa Strina et Sadie, 2024. Soie, perles de verre, fil nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Accrochée au plafond, Voilette (2024), une plateforme en bois de kambala, sert de socle inversé à deux œuvres suspendues.
Le rouge intense de Sadie (2024) renvoie à Sadie Speight, figure peu connue du modernisme britannique, ayant participé, comme on l’a souligné plus haut, à la conception architecturale du bâtiment du CAM, sans que cette contribution ne lui ait été attribuée. Réalisée en perles de verre et fils de soie teints avec des pigments naturels rouges, cette sculpture transpose à une échelle réduite un motif géométrique imaginé par Speight pour les tapisseries acoustiques de l’auditorium du Royal Festival Hall de Londres.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Sadie, 2024. Soie, perles de verre, fil nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Elle voisine avec à caipiras, capiau, pau a pique (2019), une colonne constituée de plaques en aluminium thermolaqué noir et blanc, qui reprend une sculpture en bois peint dans une exposition du même nom organisée en 1980 par l’architecte anglo-brésilienne Lina Bo Bardi. L’œuvre a été produite à l’occasion d’une exposition de Leonor Antunes au MASP – Museu de Arte de São Paulo, bâtiment emblématique conçu par Bo Bardi.

Leonor Antunescaipiras, capiau, pau a pique, 2019. aluminium, aluminium thermolaqué, cable en acier inoxydable Courtesy galerie Luisa Strina – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Voilette reprend la forme des six panneaux verticaux qu’Antunes a utilisés au CAM pour présenter des œuvres d’artistes femmes issues de la collection Gulbenkian, une installation encore visible à Lisbonne jusqu’à la fin de l’année.

Vue de l'exposition 'Leonor Antunes' au CAM - Photo © Nick Ash
Vue de l’exposition ‘Leonor Antunes’ au CAM – Photo © Nick Ash

Ces panneaux réinterprètent des éléments réticulés conçus par Charlotte Perriand pour la résidence de l’ambassadeur du Japon à Paris dans les années 1960.
Dans un angle de cette grande salle, deux œuvres (a toiture couronnant le tout #1 et #2, 2024) évoquent l’exceptionnel canapé monolithique en séquoia et cannage de plus de sept mètres de long que Charlotte Perriand a dessiné pour la grande salle de réception d’un hôtel particulier du Faubourg Saint-Honoré. Deux autres déclinaisons de cette sculpture sont visibles dans la salle suivante.

Leonor Antunesa toiture couronnant le tout (#1 et #2), 2024. Bois de kambala, rotin et corde de
coton – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Au centre de cette deuxième salle, discrepancies with S.S. (2023) reprend de manière désarticulée en cuir, mousse, aluminium et corde de chanvre une rampe d’escalier dessinée par Sadie Speight.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – discrepancies with S.S., 2023. Cuir, mousse, aluminium, fil de nylon et corde en chanvre -« les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Deux autres œuvres intitulées discrepancies with S.S. #1 (2024) sont suspendues dans un angle de la troisième salle. Ces « filets » en cuir fauve semblent être des versions déployées d’un assemblage d’éléments de brides et de filets d’équitation dont le titre (Ana #3, 2024) est probablement liée à la figue d’Ana Hatherly, poétesse, écrivaine, cinéaste et artiste portugaise…

Dans la première salle, un autre filet en laiton (discrepâncias com A.H. #4, 2024) présente des articulations similaires à celles que l’on retrouve dans discrepancies with S.S. #1 et Ana #3 (2024).

Ces discrepancies ou discrepâncias avec Sadie Speight et Ana Hatherly gardent un peu de leur part de mystère… Le terme lui-même n’est pas simple à traduire. Faut-il l’interpréter littéralement avec le mot rare de « discrépance » qui exprimerait un conflit ou un manque d’harmonie résultant de la coexistence simultanée de sons, sensations, ou opinions divergents ? Doit-on prendre en considération le sens figuré du mot (divergence, dissemblance) ou son sens mathématique d’écart par rapport à une distribution régulière dans un ensemble donné et de mesure du déséquilibre dans la répartition ?

Leonor Antunesdiscrepancies with M.S. #3, 2020. Cuir, coton et fil de nylon ciré. Courtesy Marian Goodman Gallery -« les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Dans le couloir, au pied de l’escalier, est suspendue discrepancies with M.S. #3 (2020), une œuvre magnifique en cuir blanc évoquant clairement la série des Droguinhas de Mira Schendel. Réalisées en papier de riz japonais noué, tressé et entortillé, les Droguinhas sont des objets souples et sculpturaux ayant la forme de paquets de nœuds…

Leonor AntunesAna #4, 2024. Cuir, corde de coton, fil de nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Cette œuvre entre en résonance avec Ana #4 (2024), en cuir noir, placée à l’entrée de la grande salle. Bien qu’elles diffèrent par la couleur, ces deux pièces partagent la même matière et des affinités formelles. Elles rappellent que Mira Schendel et Ana Hatherly ont exploré des territoires communs entre les arts visuels et la poésie, entre texte et image. Dans un essai universitaire (Ana et Mira : fils d’écriture entre Ana Hatherly et Mira Schendel), Alice Varginha Monteiro da Palma écrit : « Elles ont partagé un désir commun d’entre-deux, entre l’image et l’écriture ; une pensée poético-visuelle où peindre et écrire – penser avec ses mains – est analogue au travail de Pénélope, Ariane et Arachné, donc de filer et de tisser, de donner forme – manuellement – à l’existence ».

Dans quatre superbes sculptures intitulées Franca e Sophie #1, #2, #3 et #4 (2024) rendent hommage à Franca Helg et Sophie Taeuber, dont les parcours ont souvent été éclipsés par Franco Albini et Jean Arp.

Leonor AntunesFranca e Sophie #1, #2, #3 et #4, 2024. Perles de verre, fil en nylon et acier inoxydable thermolaqué – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

À Franca Helg, Antunes emprunte un élément de la rampe d’escalier qu’elle a dessinée pour le métro de Milan, un projet primé en 1964 par le Compasso d’Oro, conjointement avec Franco Albini et le graphiste Bob Noorda. Ces structures en acier thermolaqué noir soutiennent de larges broderies en perles de verre inspirées des compositions abstraites de Sophie Taeuber, qui a longtemps pratiqué la broderie, notamment pour des sacs de bal ou ses têtes Dada.

Dans l’avant-dernière salle, où subsistent les portes d’anciens entrepôts frigorifiques, trois sculptures en rotin (Franca #1, #3 et #5, 2018) font écho aux créations de mobilier de Franca Helg, en notamment aux célébrissimes fauteuil et au guéridon en osier tressé Primavera, édités par Bonacina en 1967.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Leonor AntunesFranca #1, #3 et #5, 2018. rotin, corde en chanvre. Courtesy de l’artiste et galerie Luisa Strina et de Marian Goodman Gallery – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

L’exposition s’ouvre sur Franco (2017), un filet en laiton, et se clôt dans la dernière salle par deux œuvres en cuir (Franco I et Franco II, 2017), évoquant directement Franco Albini.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor AntunesFranco I et Franco II, 2017. Cuir. Courtesy kurimanzutto Mexico / New York – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Le parcours réunit également plusieurs séries, dont les nuages (2024), dans la première salle, et random intersections (2016, 2024), qui traduisent l’intérêt constant de Leonor Antunes pour les techniques artisanales, notamment celles liées au travail du cuir.
Initiée en 2007, la série random intersections se compose d’éléments en cuir dont les formes s’inspirent des brides de chevaux. Elle ferait référence aux collages préparatoires de l’architecte italien Carlo Mollino pour son projet du club hippique de Turin, bâtiment des années 1930 aujourd’hui disparu.

Leonor Antunesrandom intersections, 2016 – 2024. 2018. Cuir et fil de nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Ces harnais forment des structures suspendues, fluides et légères, introduisant une présence spectrale dans l’espace, en tension avec l’architecture environnante qui résume assez bien le travail de Leonor Antunes et les incontournables « inégalités constantes des jours de leonor* » qu’elle présente au Crac Occitanie.

À lire ci-dessous les biographies des artistes cité·es dans « les inégalités constantes des jours de leonor* ». Ces textes sont extraits du guide de visite mis à la disposition des visiteurs. On reproduit également les éléments biographiques concernant Leonor Antunes.

L’exposition est accompagnée par une importante programmation culturelle et par les quatre propositions de « Canal Royal » qui se succéderont pendant l’été à l’étage du centre d’art.

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes et Marie Cozette – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Commissariat de Leonor Antunes, Marie Cozette et Rita Fabiana

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« da desigualdade constante dos dias de leonor* » sur le site du CAM (Centro de Arte Moderna)
Leonor Antunes sur le site des galeries Marianne Goodman à Paris, Air de Paris à Romainville, Luisa Strina à São Paulo, Kurimanzutto à Mexico et New York et Taka Ishii à Tokyo

Leonor Antunes – Repères biographiques

Leonor Antunes est née en 1972 à Lisbonne, elle vit et travaille entre Berlin et Lisbonne.

De nombreuses expositions personnelles lui ont été dédiées, notamment à La Fruitmarket Gallery à Édimbourg en Écosse (2023), à la Fondation Serralves à Porto au Portugal (2022), au Mudam au Luxembourg (2020), au MASP à São Paulo au Brésil (2019), au Museo Tamayo à Mexico (2018), au Hangar Bicocca à Milan en Italie (2018), à la Whitechapel Gallery à Londres (2017), au San Francisco Museum of Modern Art aux USA (2016), au Capc à Bordeaux (2015), au New Museum à New York aux USA (2015), à la Kunsthalle de Bâle en Suisse (2013) et au Museo Reina Sofia de Madrid en Espagne (2011).
Leonor Antunes a par ailleurs représenté le Pavillon portugais à la Biennale de Venise en 2019. Elle a également participé à la Biennale de Venise en 2017, à la Biennale de Sharjah en 2015 et à la Biennale de Berlin en 2015.
Elle est représentée par la galerie Marianne Goodman à Paris, la galerie Air de Paris à Romainville, la galerie Luisa Strina à São Paulo, la galerie Kurimanzutto à Mexico et New York et la galerie Taka Ishii à Tokyo.

Biographie des artistes cité·e·s

Franco Albini

1905, Robiatte (Italie) -1977, Milan (Italie)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor AntunesFranco I et Franco II, 2017. Cuir. Courtesy kurimanzutto Mexico / New York – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Architecte, designer et urbaniste italien, représentant du courant Rationaliste, Franco Albini prône une architecture sobre, fonctionnelle, tournée vers les besoins réels des individus.
Diplômé d’architecture à l’École polytechnique de Milan, il fonde son propre studio en 1931 aux côtés de Renato Camus et Giancarlo Palanti. Il participe à la conception de logements sociaux à Milan, notamment les immeubles résidentiels Fabio Filzi et Ettore Ponti, réalisés entre 1935 et 1941.
Dès les années 1940, il travaille sur du mobilier muséographique modulaire, constitué notamment de tiges métalliques fixées du sol au plafond, en vue du réaménagement de grands musées italiens.
Après la Seconde Guerre Mondiale, en 1945, il fonde le Mouvement d’Études Architecturales (MSA), qui restera actif jusqu’en 1961. Le groupe a pour ambition de proposer des solutions concrètes pour la reconstruction des villes et de faire évoluer la pensée architecturale vers une approche plus humaniste, collective et fonctionnelle. Dans les années 1950, il crée des fauteuils en rotin devenus iconiques, telles que les fauteuils Margherita (1950) et Gala (1951). Ces créations unissent les savoir-faire artisanaux traditionnels italiens à une esthétique moderne épurée, fondée sur la logique et la simplicité.
À partir de 1952, Franco Albini travaille avec l’architecte et designeuse Franca Helg pour des projets de mobilier, de design industriel et d’architecture.

Lina Bo Bardi

1914, Rome (Italie) -1992, São Paulo (Brésil)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunescaipiras, capiau, pau a pique, 2019. aluminium, aluminium thermolaqué, cable en acier inoxydable Courtesy galerie Luisa Strina – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Lina Bo Bardi est une architecte et designeuse majeure du Mouvement Moderne.
Après des études d’architecture à l’Université de Rome, elle travaille à Milan au sein de l’agence de l’architecte Gio Ponti comme rédactrice et dessinatrice dans divers magazines, dont la revue Domus. En 1946, elle épouse le journaliste et critique d’art Pietro Maria Bardi. Après-guerre, le couple émigre au Brésil. Elle y signe l’une de ses œuvres les plus emblématiques, le Musée d’Art de São Paulo (MASP), une structure audacieuse en béton et en verre achevée en 1968. Elle conçoit également un dispositif révolutionnaire de scénographie d’exposition : des « chevalets en cristal » dans lesquels les œuvres de la collection sont installées dans une feuille de verre verticale calée dans un cube en béton. Ce système permet au spectateur de déambuler autour des œuvres agencées de manière labyrinthique.
Parmi ses autres réalisations majeures, se trouvent la Casa de Vidro (1951) et la Casa Chame-Chame (1964), des projets où elle fusionne les principes du rationalisme européen avec la culture vernaculaire brésilienne, intégrant des matériaux locaux et des techniques artisanales. Dans les années 1950, elle cofonde la société d’ameublement Studio d’Arte Palma à São Paulo, où elle crée plusieurs pièces aujourd’hui iconiques, telles que la chaise Bowl (1951), la chaise en bois et cuir Fresa (1950) et la chaise Três Pés (1957), qui allient simplicité, fonctionnalité et esthétique. Lina Bo Bardi présente ses idées dans des dessins poétiques et ludiques, illustrant sa conception de l’architecture participant à la création d’une œuvre d’art totale.

Ana Hatherly

1929, Porto (Portugal) – 2015, Lisbonne (Portugal)

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Leonor AntunesAna #4, 2024. Cuir, corde de coton, fil de nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Poétesse, écrivaine, cinéaste et artiste portugaise, Ana Hartherly est une pionnière du mouvement de la littérature expérimentale au Portugal.
Sa production variée (dessins, peintures, collages, films, poèmes, romans, essais) transcende les frontières entre les disciplines. Dans son travail, elle explore les possibilités visuelles des mots, de la calligraphie et des collages textuels.
Après des études musicales en Allemagne, elle obtient un diplôme en philologie germanique à l’Université de Lisbonne. Entre 1971 et 1974, elle se rend à Londres où elle poursuit des études à la London International Film School, puis à l’Université de Californie à Berkeley, où elle obtient un doctorat en littérature hispanique.
Entre 1975 et 1976, elle enseigne au Centre d’Art et de Communication Visuelle (AR.CO) à Lisbonne, avant de rejoindre, de 1976 à 1978, l’École Supérieure de Cinéma du Conservatoire National de Lisbonne. En 1984, elle intègre le département de portugais de l’Université Nouvelle de Lisbonne (NOVA), où elle fonde l’Institut d’études portugaises en 1994.
Au fil des années, elle a occupé de multiples fonctions au sein d’associations littéraires, de revues et d’autres institutions liées à la littérature. Elle a été membre de l’Association portugaise des écrivains (APE) et l’une des cofondatrices du PEN Club portugais, qu’elle a présidé de 1992 à 1994.

Franca Helg

1920, Milan – 1989, Milan (Italie)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Franca #3 et #5, 2018. rotin, corde en chanvre – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Architecte et designeuse, Franca Helg est une figure centrale de l’architecture italienne du XXè siècle.
Diplômée de l’École polytechnique de Milan en 1945, elle débute sa carrière au sein de l’agence d’architecture B.B.P.R., avant d’entamer une collaboration avec Franco Albini. Ensemble, ils fondent en 1952 le studio Albini-Helg, et réalisent différents projets : de la restauration de bâtiments historiques et de l’urbanisme, à la conception d’expositions et de meubles.
Parmi leurs projets emblématiques se trouvent le grand magasin La Rinascente à Rome (1957-1962) et la conception des stations de la ligne 1 du métro de Milan, qui leur valut le prix Compas d’Or en 1964. Dans le domaine du design, Franca Helg conçoit des meubles et objets pour des marques comme Poggi, Bonacina et San Lorenzo. Sa chaise Primavera (fabriquée en osier tressé), conçue pour Bonacina, est notamment appréciée pour réunir le savoir-faire artisanal traditionnel et le design moderne épuré.
Elle enseigne l’architecture à l’École polytechnique de Milan, mais également à l’Université Technique de Munich et à l’Université Catholique de Córdoba, en Argentine. La renommée artistique de Franca Helg reste partiellement occultée par celle de Franco Albini.

Marian Pepler

1904, Sanderstead (Angleterre), 1997, Eynsham (Angleterre)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Au sol : forty five, 2024. Liège, linoleum, cuivre – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Architecte et designeuse textile anglaise, Marian Pepler est une figure du renouveau de l’artisanat textile moderne britannique, connue pour ses élégants tapis designés pour les intérieurs modernistes.
Après des études à la Croydon School of Art, elle fait partie des rares femmes admises à l’Architectural Association School en 1924 (accessible aux femmes seulement depuis 1917). Elle y rencontre son futur mari l’architecte et designer Richard Drex Russell avec qui elle se marie en 1933. En 40 ans de carrière elle a conçu de nombreux tapis et moquettes pour l’entreprise Gordon Russel Ltd dirigé par son beau frère. Elle est mentionnée dans le manuel de design domestique intitulé The Flat Book (1939), de Sadie Speight et Leslie Martin, qui proposaient une nouvelle manière d’habiter la maison, plus fonctionnelle, organique et modulaire.

Charlotte Perriand

1903, Paris – 1999, Paris

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – a toiture couronnant le tout (#1 et #2), 2024. Bois de kambala, rotin et corde de coton – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Architecte, designer et photographe française, Charlotte Perriand est une figure majeure de l’histoire de la modernité. Son œuvre est à la fois avant-gardiste et humaniste, industrielle et proche de la nature.
Charlotte Perriand a étudié à l’École de l’union centrale des arts décoratifs de Paris entre 1920 et 1925. Durant 10 ans elle invente un mobilier moderne dans l’atelier Le Corbusier-Pierre Jeanneret, qui s’approprie un certain nombre de ses créations (dont la chaise longue LC4 en acier tubulaire). Elle participe en 1929 à la création de l’Union des Artistes Modernes (UAM) qui défend un art moderne véritablement social.
Dans les années 1930, Charlotte Perriand s’engage pour une production de masse et un art industriel et progressiste. Elle collabore avec le gouvernement du Front Populaire de Léon Blum, pour qui elle réalise de grandes fresques en photomontages. Elle conçoit plusieurs projets architecturaux en tant qu’œuvres préfabriquées pour garantir qu’ils restent accessibles au grand-public.
Entre 1940 et 1946, elle vit au Japon et en Indochine. Le Japon, vers lequel elle est retournée plusieurs fois, a laissé une empreinte indélébile sur son travail particulièrement dans l’usage des matériaux naturels (bois, bambou), la réhabilitation des connaissances artisanales, ainsi que l’utilisation de la transparence et de la lumière. De 1966 à 1969 elle réalise les aménagements intérieurs de la résidence de l’ambassadeur du Japon à Paris.
Entre 1967 et 1986, Charlotte Perriand cumule une fois de plus les fonctions d’architecte et de designeuse en créant des bâtiments et leurs aménagements d’intérieur pour la station de ski Les Arcs.

Mira Schendel

1919, Zurich (Suisse) – 1988, São Paulo (Brésil)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – discrepancies with M.S. #3, 2020. Cuir, coton et fil de nylon ciré Courtesy Marian Goodman Gallery – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Mira Schendel est une artiste et poétesse brésilienne d’origine suisse.

Fille d’un père juif tchèque germanophone et d’une mère italienne judéo-chrétienne, elle grandit à Milan. Durant les années 1940, elle entame des études de philosophie à l’Université catholique mais elle est contrainte de les abandonner en raison des lois raciales fascistes. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, elle fuit le nazisme, perd sa citoyenneté, traverse la Suisse, l’Autriche et la Yougoslavie. En 1949, elle émigre au Brésil et s’installe à São Paulo. Autodidacte, Mira Schendel développe une pratique artistique variée, incluant la peinture, le dessin, la sculpture, ou encore la poésie et l’écriture. Le dualisme, récurrent dans son travail, peut être interprété comme le reflet d’un héritage familial complexe et d’une identité marquée par l’exil.
La série Droguinhas (1964-1966) figure parmi ses œuvres les plus emblématiques. Elles sont réalisées en papier de riz japonais, noué, tressé et entortillé pour devenir des objets sculpturaux souples, qui adoptent tantôt la forme de paquets de nœuds, tantôt celle de motifs rappelant la dentelle ou le filet.
Au cours de sa carrière, elle participe notamment à la première édition de la Biennale de São Paulo en 1951 et à la Biennale de Venise en 1968.

Sadie Speight

1906, Wigan (Angleterre) -1992, Creat Shelford (Angleterre)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Sadie, 2024. Soie, perles de verre, fil nylon – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Architecte, designeuse et écrivaine britannique, Sadie Speight est une figure majeure du Mouvement Moderne en Grande-Bretagne.
Diplômée de l’École d’architecture de l’Université de Manchester en 1929, elle reçoit en 1930 la médaille d’argent du Royal Institute of British Architects (RIBA) pour ses dessins architecturaux et en devient l’une des associées. En 1932, elle obtient une bourse Faulkner, ce qui lui permet de poursuivre ses recherches et d’obtenir une maîtrise en 1933.
Après ses études, elle travaille comme assistante-architecte chez Halliday & Associates à Manchester de 1930 à 1934, puis se voit offrir une bourse Neale du RIBA pour mener des recherches en Espagne.
En 1935, elle épouse l’architecte Leslie Martin. Ils travaillent ensemble sur plusieurs projets architecturaux et participent à la rédaction du guide d’ameublement et d’aménagement de la maison The Flat Book, publié en 1939.
Au début des années 1940, Sadie Speight co-fonde le Design Research Unit, un studio de design industriel basé à Londres. C’est dans ce cadre qu’elle conçoit des appareils électroménagers et des textiles destinés à la production de masse.
Dans les années 1950 et 1960, elle se distingue par plusieurs projets d’architecture intérieure. Parmi ses réalisations notables, on peut citer la conception du café The Rosie Lee, en collaboration avec Leonard Manasseh, pour l’exposition Festival of Britain Live Architecture à Londres en 1951. Elle travaille également sur des intérieurs pour plusieurs universités.
En parallèle de sa pratique architecturale, Sadie Speight joue un rôle clé dans le journalisme architectural britannique. De 1944 à 1946, elle rédige la rubrique Design Review pour le magazine The Architectural Review, où elle met en lumière les tendances du design contemporain.

Sophie Taeuber

1889- Davos (Suisse) – 1943 Zürich (Suisse)

Leonor Antunes - « les inégalités constantes des jours de leonor_ » au Crac Occitanie, Sète
Leonor Antunes – Franca e Sophie #4, 2024. Perles de verre, fil en nylon et acier inoxydable thermolaqué – « les inégalités constantes des jours de leonor* » au Crac Occitanie, Sète

Artiste pluridisciplinaire, Sophie Taeuber a participé aux avants- gardes du début du XXè siècle notamment le mouvement Dada. Artiste majeure de l’abstraction, elle est connue pour ses larges compositions picturales géométriques et colorées.
Moins connues sont les créations textiles de ses débuts. Les broderies de colliers ou de sacs en perles de verre, de tapis ou de coussins en laine, témoignent du savoir-faire acquis lors de sa formation dans les écoles d’arts appliqués de Saint-Gall en Suisse et de Münich puis enseignée à Zürich, entre 1916 et 1930.
Influencée par le mouvement anglais Arts & Crafts et habitée par l’idée de perpétuer des techniques traditionnelles, elle crée des objets décoratifs ornés de formes géométriques complexes et colorées.
Ses connaissances techniques dans de nombreux domaines lui permettent de réaliser à la fois des costumes, des marionnettes, du mobilier, des éclairages. Sa pratique participe au décloisonnement entre les arts et contribue à une œuvre d’art totale mêlant techniques artisanales et beaux-arts. Sa reconnaissance artistique a été tardive du fait de l’ombrage porté sur son travail par la notoriété artistique de son mari Jean Arp.

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