Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre


Jusqu’au 17 septembre 2023, le Musée Fabre rend hommage à la céramiste et sculptrice Valentine Schlegel au deuxième étage de l’hôtel Sabatier d’Espeyran, département des arts décoratifs du musée. Intitulée « Valentine Schlegel, l’art pour quotidien », l’exposition présente « les grands jalons du parcours de cette artiste, tour à tour céramiste et sculptrice, solitaire et entourée, qui a conjugué ses talents et son goût pour la liberté au profit d’un véritable art de vivre ».

Au moment de sa disparition en 2021, Roxana Azimi évoquait Valentine Schlegel dans Le Monde comme une artiste à contrecourant, « femme affranchie, qui mena sa barque à rebours de son époque »…

Nombreux sont celles et ceux qui se souviennent de la (re)découverte de la richesse de son travail et de son étonnante personnalité avec l’exposition « Tu m’accompagneras à la plage ? » que le Crac Occitanie lui avait consacrée à l’été 2019 avec un commissariat très engagé d’Hélène Bertin.

Valentine Schlegel - « Tu m’accompagneras à la plage  » au Crac Occitanie à Sète en 2019 - Photo Marc Domage
Valentine Schlegel – « Tu m’accompagneras à la plage  » au Crac Occitanie à Sète en 2019 – Photo Marc Domage

Ce projet faisait suite à un important travail de recherche autour de la vie et de l’œuvre de Valentine Schlegel mené par Hélène Bertin. Il avait donné lieu à une première exposition, « Cette femme pourrait dormir dans l’eau » au Centre d’Art Contemporain de Brétigny-sur-Orge en 2017 et à une remarquable publication, Valentine Schlegel : je dors, je travaille, présentée comme un catalogue « bio-monographique ».

On attendait avec curiosité et intérêt les regards renouvelés qu’apportera « Valentine Schlegel, l’art pour quotidien »… L’exposition propose une approche plus marquée par une analyse rigoureuse et les techniques de l’histoire de l’art sur le parcours de cette artiste.

Le parcours s’articule « autour d’une sélection d’objets remarquables, céramiques, maquettes de cheminées qui ont fait son succès, témoignant de la diversité de sa production, mises en perspective avec sa relation poétique au quotidien ainsi que les photographies réalisées par son amie la réalisatrice Agnès Varda qui la montrent à l’œuvre ».

On (re)découvre l’ensemble des douze maquettes de cheminées en plâtre achetées à l’artiste par le Cnap (Centre national des arts plastiques) en 2019 et que l’on avait vu à Sète dans une présentation plus libre.

Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre
Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre

On retrouve aussi parmi les céramiques, celles que la Galerie Nathalie Obadia avait mises en dialogue avec les photographies de Valentine Schlegel par Agnès Varda en 2020 dans ses locaux de la rue du Cloître Saint-Merri à Paris.

« Valentine Schlegel, l’art pour quotidien » fait naturellement écho à l’importante rétrospective dédiée à Germaine Richier qui débutera le 12 juillet après avoir été présentée au Centre Pompidou. En effet, les deux femmes, figures majeures de la sculpture en France, ont été formées à l’École des Beaux-Arts de Montpellier.

Exception faite de quelques documents d’archives, « Valentine Schlegel, l’art pour quotidien » n’apportera que peu d’éléments nouveaux à celles et ceux qui ont suivi le travail d’Hélène Bertin et ses expositions au CAC de Brétigny et/ou au Crac Occitanie à Sète surtout s’ils/elles ont eu l’occasion en plus de voir la proposition de la Galerie Nathalie Obadia. Parc contre, elle permettra à celles et ceux qui méconnaissent son travail de découvrir une artiste exceptionnelle et une femme à la forte personnalité.

Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre
Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre

Toutefois, les espaces au deuxième étage de l’hôtel Sabatier d’Espeyran ne sont peut-être pas les plus adaptés à la présentation de son travail. Les couleurs des murs et les quelques pièces de mobilier restées en place ne s’accordent pas toujours avec les œuvres exposées. La lumière extérieure qui baigne les salles provoque quelquefois des effets de miroirs désagréables sur les cloches qui protègent les céramiques, comme sur certaines photographies… De manière assez paradoxale, les propositions antérieures qui se développaient dans la muséographie en place et qui la perturbait nous laissent de meilleurs souvenirs. On pense en particulier à « Pharmacopées » de Jeanne Susplugas en 2020/2021 et à « Perturbations : parcours céramique et verre contemporain » en 2012…

Michel Hilaire, directeur du musée Fabre, est le commissaire général de l’exposition dont le commissariat scientifique est assuré par Florence Hudowicz, conservatrice Arts graphiques et Arts décoratifs au musée Fabre.

Un catalogue coédité par le Musée Fabre et Snoeck Editions accompagne l’exposition. Les essais sont signés par Sandra Cattini, responsable de la collection design et arts décoratifs du Cnap, Michel Hilaire, conservateur général du patrimoine, directeur, musée Fabre, Florence Hudowicz, conservatrice en chef du patrimoine, musée Fabre et Karine Lacquemant, attachée de conservation, musée des Arts décoratifs de Paris.

À lire, ci-dessous, une présentation du parcours de l’exposition extraite du dossier de presse.

En savoir plus :
Sur le site du Musée Fabre
Suivre l’actualité du Musée Fabre sur Facebook et Instagram

« Valentine Schlegel, l’art pour quotidien »

« J’avais vendu un très beau pot à des amis. Ils voulaient le poser sur leur cheminée : mais la cheminée, une grande cheminée de marbre, et le pot n’allaient pas ensemble. Ils ont décidé de changer leur cheminée. “Qui fait des cheminées ?” J’ai répondu : Moi. »

Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre
Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre

Designeuse avant la lettre, céramiste et sculptrice, Valentine Schlegel, disparue en 2021, n’a cessé toute sa vie d’inventer des formes pour embellir le quotidien, depuis la finition d’une poignée de porte à la sculpture de l’ensemble de la pièce afin qu’il y fasse bon et beau vivre. Résolument indépendante, l’artiste, grâce à son talent pluriel et son sens aigu de l’observation, a modelé et façonné une œuvre devenue aujourd’hui, tant par son originalité que par son air familier, une des incarnations majeures du renouveau des arts céramiques d’après-guerre ainsi que l’expression de la modernité des années 70. Eprise de liberté, dans son expression comme dans la vie, elle s’est également investie dans des enjeux qui lui tenaient à cœur, les droits des femmes et la transmission des savoirs manuels aux jeunes générations.

Aujourd’hui ses grands vases qui semblent surgis de terre et les maquettes de ses cheminées aux lignes blanches pures, venues des collections publiques et privées, disent l’élan vital de sa créativité. Les photographies d’Agnès Varda, cinéaste et amie de toujours, ainsi que celles de Suzanne Fournier, l’une de ses deux sœurs, rappellent, parmi d’autres, les nombreuses « artisanes solitaires » et plus généralement toutes les amitiés qui ont accompagné et portent encore aujourd’hui l’œuvre de Valentine Schlegel.

Valentine Schlegel avec un vase en terre façonnée au colombin, faïence chamottée, émail, vers 1955, Photographie d’Agnès Varda © Succession Agnès Varda – Fonds Agnès Varda déposé à l’institut pour la photographie Courtesy Galerie Nathalie Obadia © ADAGP, Paris, 2023

De Sète à Montpellier : L’envie résolue d’être artiste

« Née sur la plage, comme disent tous les Sétois. »

Née à Sète en 1925, benjamine de trois sœurs, Valentine Schlegel, surnommée affectueusement Linou, grandit au sein d’une famille de négociants établis dans le commerce de meubles. Elle bénéficie d’une éducation complète et sportive, et son père, curieux des arts, demande, comme il l’avait fait pour sa sœur aînée Andrée, son inscription à l’école des Beaux-Arts de Montpellier, en 1942. Elle y reçoit, pour la peinture et le dessin, l’enseignement de Françoise Bizette, jeune professeure de dessin qu’elle retrouvera plus tard à Sèvres, et part dès 1945 s’installer à Paris, dotée d’un solide appétit de vivre dans la liberté d’expression que symbolise la capitale pour les artistes.

Elle ne quitte pas pour autant Sète, son port d’attache qui demeure pour elle, à travers tous ses horizons, maritime et terrien, une source principale d’inspiration : rien ne remplace pour la rêverie ou la pratique de la voile et de la pêche, « la mer, la mer toujours recommencée ». C’est de sa ville natale qu’elle part rejoindre, à l’été 1947, le comédien metteur en scène Jean Vilar, mari de sa sœur Andrée et sétois comme elles, en train d’inventer ce qui deviendra le célèbre festival d’Avignon, alors Semaine d’art qui se déroulait en septembre. De 1947 à 1951, elle y assiste le peintre et décorateur Léon Gischia, y apprend l’émulation collective et s’y constitue un réseau d’amitiés durables, parmi lesquelles Gérard Philipe, Jeanne Moreau, Sylvia Montfort qui vont soutenir son devenir d’« artisane solitaire. »

Valentine Schlegel sur la plage. Sculpture en bois et ses couverts en bois. Sète, 1958
Valentine Schlegel sur la plage. Sculpture en bois et ses couverts en bois. Sète, 1958, Photographie d’Agnès Varda © ADAGP, Paris, 2023 © Succession Agnès Varda – Fonds Agnès Varda déposé à l’institut pour la photographie Courtesy Galerie Nathalie Obadia

Le renouveau des arts céramiques dans les années 50

« Les plus beaux pots étaient peints sur les tableaux, par Braque par exemple, avec une liberté nouvelle… Pour avoir une vie propre, un pot doit être aussi une sculpture. »

Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre
Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre

Dotée d’un sens aigu de l’observation, les mains promptes à exercer leur habileté technique, Valentine Schlegel choisit la terre comme matériau d’élection, dans le contexte du renouveau des arts céramiques dans les années 50, impulsé notamment par l’atelier Madoura à Vallauris, et l’intérêt de Picasso pour cette pratique artistique. Travaillant dans une solitude très entourée, auprès d’autres femmes céramistes, Frédérique Bourguet, Elisabeth Joulia ou encore sa sœur Andrée Vilar, elle révèle une invention formelle dont elle ne se croyait elle-même pas capable dans de grands vases aux formes organiques.

Valentine Schlegel, Vase en grès, 1957
Valentine Schlegel, Vase en grès, 1957, Collection personnelle de Rosalie Varda © Julien Maeda – Courtesy Éditions Sébastien Moreu © ADAGP, Paris, 2023

Exposées en 1955 et 1957 dans des galeries d’art parisiennes, ses pièces biomorphiques lui confèrent une notoriété rapide et internationale, mais c’est avec une autre activité qu’elle assure son art de vivre résolument indépendant : à la demande de François Mathey et Yvonne Amic, conservateurs alors au musée des Arts décoratifs, elle crée un atelier pour les moins de quinze ans, plébiscité pour la nouvelle pédagogie qu’elle y déploie.

Valentine Schlegel, Vase, 1958
Valentine Schlegel, Vase, 1958, terre chamottée, montée au colombin, émaillée gris clair mat, Collection Blaise et Vincent Fournier Photo B.F © ADAGP, Paris, 2023

Une personne joue déjà un rôle à part dans la vie et le parcours de l’artiste : il s’agit de la photographe et cinéaste Agnès Varda, sa cadette de trois ans, venue depuis sa Belgique natale avec sa famille se réfugier à Sète durant la Seconde Guerre mondiale. Amie d’enfance et de toute une vie, Agnès Varda l’héberge un temps rue Daguerre et la photographie tout comme ses céramiques, constituant ainsi un corpus exceptionnel sur une artiste femme au sein de sa production.

Valentine Schlegel, Arbre à coupes, 1958
Valentine Schlegel, Arbre à coupes, 1958, Photographie d’Agnès Varda © Succession Agnès Varda – Fonds Agnès Varda déposé à l’institut pour la photographie Courtesy Galerie Nathalie Obadia © ADAGP, Paris, 2023

Après s’être employée à maîtriser le savoir-faire de potier, Valentine Schlegel privilégie le modelage et le montage de ses pièces au colombin. Grâce au talent de ses mains, elle laisse place à toute son invention pour donner corps à des formes bulbeuses et puissantes, comme si elle les faisait germer de la terre même.

Valentine Schlegel dans son atelier rue Daguerre, 1955, Photographie d’Agnès Varda © Succession Agnès Varda – Fonds Agnès Varda déposé à l’institut pour la photographie Courtesy Galerie Nathalie Obadia © ADAGP, Paris, 2023

Elle a ainsi exécuté une quarantaine de pièces biomorphiques qui renouvellent profondément l’esthétique du vase sans lui faire perdre sa fonction usuelle à laquelle elle reste attachée.

Valentine Schlegel, Vase Les trois ours, 1955, céramique, Centre national des arts plastiques inv. FNAC 1021 -  l’art pour quotidien au Musée Fabre 07
Valentine Schlegel, Vase Les trois ours, 1955, céramique, Centre national des arts plastiques inv. FNAC 1021 – l’art pour quotidien au Musée Fabre 07

Les cheminées : L’incarnation du design des années 70

« Mes sculptures cherchent des besoins utilitaires. Ici, comme des aimants, attirés par la place qui leur revient, elles ont soupçonné les nécessités pour intervenir. »

Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre
Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre

Valentine Schlegel s’est installée définitivement en 1953 dans une ancienne fabrique de roues, sise 25, rue Bezout, dans le 14ème arrondissement de Paris. Elle s’y façonne au fil des jours un atelier et un lieu de vie parfaitement adaptés à sa façon de vivre, conjuguant simplicité et raffinement. Devenue experte dans le travail du plâtre, elle exporte son modèle chez ses amis et clients, renouvelant leurs intérieurs avec ses « sculptures à vivre ». Partant de la cheminée, propice au rêve, elle développe des formes dynamiques, d’un blanc épuré qui, au gré des voiles et du vent de son imaginaire, investissent l’espace tout en devenant consoles, étagères, banquettes…

Son inventivité se satisfait du caractère fonctionnel de ses créations. Elle produit jusqu’en 2002 une centaine de cheminées, toutes uniques, qu’elle cosigne avec certains de ses assistants. Cette production à la fois nombreuse et discrète est essentiellement connue à travers l’objectif de Suzanne Fournier, également sœur de l’artiste et photographe, à qui on doit aujourd’hui de pouvoir la découvrir, incarnation de la modernité et l’émancipation des années 70, sans son caractère industriel.

Elle délaisse alors la céramique qu’elle reprendra plus tard sous d’autres formes, plus anthropomorphiques. Elle est également désignée en 1985 pour réaliser un hommage à Jean Vilar, disparu brutalement en 1974. Elle exécute une statue en bronze du metteur en scène assis à califourchon sur sa chaise d’après un instantané connu d’Agnès Varda. Cette sculpture est toujours visible dans le hall du Palais de Chaillot.

Valentine Schlegel, Maquette pour une cheminée à la Varenne-Saint-Hilaire, 1976_1
Valentine Schlegel, Maquette pour une cheminée à la Varenne-Saint-Hilaire, 1976, maquette 1/10ème d’une cheminée, plâtre, Centre national des arts plastiques inv. FNAC 2019-0517 © ADAGP, Paris, 2023 / Cnap Photo Fabrice Lindo

Valentine Schlegel n’a cessé tout au long de son existence de conjuguer utilité et beauté, habitat et humanité. Pour mieux répondre à ses commanditaires, elle devait d’abord comprendre l’âme de l’espace à vivre et celle de ses occupants. Sans dessiner, elle réalisait ensuite une première maquette, à l’échelle 1/10ème, en terre pour la plasticité subtile de ce matériau, avant de passer à la maquette en plâtre, plus solide. Elle a toujours privilégié le travail collectif, par nécessité et par goût, et commencé à cosigner, fait peu fréquent, avec Frédéric Sichel-Dulong, son principal assistant, à partir de 1975.

Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre
Valentine Schlegel, l’art pour quotidien au Musée Fabre

Femme libre et artiste : Tout un art de vivre

« Je ne serai pas là, toujours, mais les visiteurs passeront un moment comme l’on part se tremper les pieds dans l’eau ou lire contre un arbre. Mes sculptures seront là pour les accueillir. »

Solitaire aimant la compagnie, artiste et artisane, céramiste cherchant son inspiration dans la peinture, ne choisissant surtout pas entre arts populaires et beaux-arts, ne concevant pas le beau sans l’utile et inversement, Valentine Schlegel n’aura cessé de tracer sa voie avec pour seule règle : assumer sa liberté d’expression sans contrainte, ni économique, ni sociétale.

Dotée d’une personnalité solide, et d’un talent sûr, elle a pu également compter dès l’enfance sur un environnement propice, son entourage familial en premier lieu, qui a stimulé son intérêt pour les pratiques artisanales et artistiques, sportives et collectives. Pouvant s’appuyer sur ses assises locales et s’en émanciper, elle a su tisser des liens avec de nombreuses personnalités et s’entourer de soutiens fidèles, souvent féminins, qui ont contribué à son parcours singulier, notamment dans le monde des galeries et des musées, telles que Guy Resse, Denise Majorel, ainsi que Marie-Odile Briot et Yvonne Brunhammer, conservatrice et directrice du musée des Arts décoratifs, avec laquelle elle a cohabité jusqu’à leur disparition récente, à trois mois d’intervalle.

Disparue en 2021, sans se soucier de « faire oeuvre » selon ses propres termes, elle doit à ses créations, indissociables de son art de vivre, sa persistance contemporaine, grâce au goût des collectionneurs et du monde de l’art et du design. Ses cheminées ont ainsi inspiré le décor somptueux du défilé haute couture du printemps été pour la maison Dior en 2014. Plus récemment Hélène Bertin, artiste contemporaine, a fait de son travail sur la production de Valentine Schlegel, une oeuvre hybride, savante et artistique.

Valentine Schlegel, séance de modelage dans l’atelier de la rue Vavin. Paris, vers 1951, Photographie d’Agnès Varda © Succession Agnès Varda – Fonds Agnès Varda déposé à l’institut pour la photographie Courtesy Galerie Nathalie Obadia

Articles récents

Partagez
Tweetez
Enregistrer