Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à la Grande Halle, Luma Arles


Jusqu’au 2 novembre prochain, Wael Shawky présente « Je suis les hymnes des nouveaux temples » dans une mise en scène exceptionnelle qui en fait indiscutablement une proposition majeure de l’été 2025 à Luma Arles et plus largement dans le Midi.

Au cœur de cette exposition, on retrouve le film I Am Hymns of The New Temples – أنا تراتیل المعابد الجدیدة (Je suis les hymnes des nouveaux temples), tourné par l’artiste égyptien au cours de l’été 2022 dans les ruines de Pompéi. Ce projet répondait à une commande du Parc Archéologique de Pompéi dans le cadre de Pompeii Commitment. Archaeological Matters.

Comme souvent dans le travail de Shawky, le syncrétisme religieux et culturel occupe une place centrale. Il s’intéresse ici au culte d’Isis, déesse égyptienne également vénérée dans le monde romain. La ville antique est le théâtre d’une épopée qui remonte aux mythes fondateurs. Le film se développe dans plusieurs lieux emblématiques (temple d’Isis, maison de Giulia Felice, basilique, Odéon, amphithéâtre). Il raconte l’histoire d’Io, prêtresse condamnée à fuir en Égypte pour échapper à la jalousie d’Héra, qui la transforme en génisse pour se venger de Zeus.

Wael Shawky - « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles
Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles

Du royaume des Titans à celui des dieux de l’Olympe, le film entremêle mythes grecs, romains et égyptiens dans une fable à la fois poétique et merveilleuse. On suit les déambulations de Gaïa, déesse primordiale de la Terre, Io et un panthéon de divinités (Argos, Hermès, Prométhée…).
Le temple d’Isis, édifice romain dédié à la déesse égyptienne apparaît comme un creuset où s’hybrident les anciennes croyances méditerranéennes, où Io fusionne avec Isis…

Wael Shawky - « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles
Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles

Shawky s’inspire des fresques, mosaïques, architectures et sculptures de Pompéi pour créer costumes, décors, accessoires et masques en céramique et papier mâché. Les interprètes, portant ces masques – inspirés de la tragédie grecque et des farces populaires de Campanie – incarnent des dieux, donnent un visage à des mythes, rejouant des récits anciens avant de les réduire à nouveau à la fiction.

Wael Shawky - « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles
Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles

Dans une chorégraphie mystérieuse, ces figures de dieux et de déesses, d’hommes et de femmes, ainsi que d’animaux rejouent la quête d’équilibre d’un monde traversé par les guerres, conflits et catastrophes. Un cycle infini de mort et de renaissance, à l’image de Pompéi, redécouverte après avoir été ensevelie par les cendres du Vésuve en 79… sans doute, en écho au monde actuel.

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Pour Shawky, l’écran est « un espace où la fiction se transforme en réalité », permettant d’explorer le divin et le terrestre comme une fable. Il nous invite à naviguer dans un poème épique imaginaire, entre vérités, mythes et stéréotypes, au-delà d’un espace et d’un temps définis.
Il révèle ainsi la multiplicité des récits et l’enchevêtrement des cultes, transformant Io en Isis et soulignant le caractère mouvant des histoires.
Présente depuis Cabaret Crusades, cette approche chez Wael Shawky met en regard l’Orient et l’Occident, faisant apparaître des frontières culturelles perméables, à l’encontre de toute logique de séparation.

Wael Shawky - « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles
Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles

Dans la Grande Halle, face à l’écran, un imposant Vésuve rose aux accents cezanniens domine un ensemble d’échoppes aux formes géométriques couvertes de sable coloré et aux apparences instables. Elles évoquent une rue de Pompéi, dans un théâtre de nouvelles ruines imaginées par l’artiste. On y découvre une collection d’objets semblant tout droit sortis du film. Ces sculptures, à la fois reliques et inventions, portent la mémoire du feu, tout comme Pompéi conserve celle de la catastrophe, suspendue entre vie et au-delà.

Masques-sculptures en verre, en bronze ou en céramique, amphores anthropomorphes semblent prêtes à poursuivre ce récit dans un autre cadre mystique et prophétique, où se mêlent références historiques, mythologiques et littéraires. Il semble que l’équipe de Luma Arles ait envisagé un temps de présenter une nouvelle version de « Je suis les hymnes des nouveaux temples » dans le cadre des Alyscamps. La disparition de nombreux éléments, en particulier des costumes réalisés à partir des soies anciennes de San Leucio et de tissus provenant de manufactures textiles italiennes historiques, a toutefois conduit à renoncer à ce projet.

À l’entrée et à la sortie de la Grande Halle, une série de dessins et de peintures révèle le travail de recherche de Wael Shawky, donnant à voir son processus de création et les sources qui nourrissent son imaginaire.

Le film a été présenté pour la première fois au théâtre « Odeion » de Pompéi en mai 2023, puis au LaM à Villeneuve d’Ascq, partenaire du projet.
La galerie Lia Rumma, qui a également soutenu la production, a accompagné la projection par une première exposition des masques réalisés Pierre Architta, les ateliers du théâtre San Carlo, l’Académie des beaux-arts de Naples et l’Istituto Caselli Real Fabbrica di Capodimonte. L’exposition présentait également des sculptures en verre de Murano fabriquées par Berengo Studio à Venise. À l’occasion de la Biennale de Venise 2024 et de la présentation de Drama 1882, l’exposition « Je suis les hymnes des nouveaux temples » était proposée dans une autre configuration au Palazzo Grimani pour un projet organisé par la Lisson Gallery, avec Barakat Contemporary et les galeries Lia Rumma et Sfeir-Semler.

À Arles, l’exposition est enrichie par des sculptures en bronze et des œuvres en verre produites par la Fondation Luma en partenariat avec le Cirva à Marseille.

Pièces réalisées au Cirva Marseille pour l’exposition de Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles. Equipe technique du Cirva (David Veis Fernando Torres Cyrille Rocherieux et Thomas Payne) et Rafa Abdon, sculpteur de verre soufflé invité.

« Je suis les hymnes des nouveaux temples » apparaît comme l’un des projets les plus aboutis de Wael Shawky, aux côtés de Drama 1882. On garde toutefois un souvenir intense de la découverte de The Horror Show File (2010), premier volet de Cabaret Crusades à la Collection Lambert en 2013 dans l’inoubliable « Mirages d’Orient, grenades & figues de barbarie». On se rappelle également du second chapitre de cette trilogie (The Path to Cairo, 2012), montré dans « Ici, Ailleurs » à la Friche de la Belle de Mai. Cet épisode avait été réalisé à Aubagne aux Pénitents Noirs pour Marseille-Provence 2013.

Souhaitons que les écoles et les collèges d’Arles et de la région sachent s’emparer de cette incontournable exposition…

À lire ci-dessous le texte d’introduction de « Je suis les hymnes des nouveaux temples » et les repères biographiques extraits du dossier de presse.

L’exposition est accompagnée d’un ouvrage publié par Atelier EXB (non lu). Il présente l’ensemble des séquences de l’œuvre de Wael Shawky. Des cahiers thématiques y dévoilent le processus de création du film : sources d’inspiration, dessins préparatoires des masques et costumes, maquettes des décors, making-of du tournage. L’ouvrage est enrichi par trois essais signés Giuliana Bruno, Sébastien Delot et Andrea Viliani.

Wael Shawky - « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles
Maja Hoffman, Wael Shawky, Martin Guinard et Vassilis Oikonomopoulos lor de la visite de presse de « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles

Commissariat de Vassilis Oikonomopoulos, Tom Eccles et Martin Guinard.

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Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples »

Wael Shawky est un artiste contemporain égyptien majeur qui explore les multiples facettes de récits historiques et mythologiques à travers des médiums tels que le dessin, la peinture, la performance, la musique et le cinéma. Pour l’exposition Je suis les hymnes des nouveaux temples, La Grande Halle de LUMA Arles est entièrement transformée en expérience immersive qui brouille les frontières entre réel et métaphysique.

Au cœur de l’exposition se trouve la ville légendaire de Pompéi, ensevelie sous les cendres et les débris volcaniques pendant des siècles. Son état de conservation exceptionnel offre aujourd’hui un témoignage fascinant de la diversité des cultures ayant façonné son identité, au carrefour des routes commerciales et des civilisations. Entremêlant histoire, récits légendaires et narrations contemporaines, Shawky réinterprète le mythe de la création dans l’Antiquité grecque à travers une chorégraphie spectaculaire de mouvements, d’images, de sons, et d’éléments sculpturaux et picturaux. En revisitant les traditions théâtrales, Shawky explore des formes intemporelles de narration, de symbolisme et de rituel.
Ce dialogue avec le passé offre une expérience cinématographique riche, renforçant la portée émotionnelle et philosophique de son œuvre tout en se connectant à une mémoire culturelle commune.

Le film, qui est central dans l’installation, raconte les errances de Gaïa, déesse primordiale de la Terre et mère des Titans selon la mythologie grecque.
Dans l’interprétation de Shawky, elle arpente Pompéi, où des personnages masqués, des créatures divines et des prêtres l’honorent par des offrandes et des rituels.
Au cours de son voyage, Gaïa rencontre un panthéon de divinités et dispose ainsi d’un cadre riche pour explorer une palette d’émotions et de conflits moraux. Le temple d’Isis, édifice romain dédié à la déesse égyptienne de la magie, de la maternité et de la guérison, apparaît comme un fil conducteur entre les anciennes croyances méditerranéennes.
À la croisée des échanges, la religiosité égyptienne interagit avec la vie spirituelle romaine. Ainsi, Isis fusionne avec Io, une nymphe grecque transformée en vache. Shawky montre comment les mythes s’adaptent à travers les civilisations et met en lumière leur syncrétisme et leur fluidité, soulignant ainsi la perméabilité de ces cultures, la continuité historique et le pouvoir des mythologies anciennes dans la formation d’héritages partagés et de cosmologies.

Dans La Grande Halle, sous l’imposant Vésuve, une rue du site antique abrite des sculptures en verre et en bronze qui deviennent de puissants symboles de fragilité, de transformation et de suspension du temps. Le verre évoque ici une frontière délicate entre destruction et préservation. Ces sculptures sont à la fois des reliques et des inventions. Elles portent la mémoire du feu, tout comme Pompéi porte la mémoire de la catastrophe, prise entre la vie et l’au-delà.

Une série de dessins et de peintures invite les spectateur·ices à poursuivre la réflexion sur l’entrelacement des histoires et la production continue de récits. Inspirée par un riche éventail de traditions théâtrales, Je suis les hymnes des nouveaux temples propose une méditation dense sur la culture et sa survie à travers ses cycles de destruction et de renouvellement.

Wael Shawky – Repères biographiques :

Wael Shawky (1971, Alexandrie) est une figure incontournable de l’art contemporain, reconnu pour son habileté à entremêler réalité et fiction à travers une diversité de médiums : dessin, peinture, performance, installation, et surtout film et vidéo. Par ses images empreintes de lyrisme et ses recherches minutieuses sur l’histoire et la mythologie, il réinterprète les récits du Moyen-Orient, tout en remettant en question les conceptions occidentales figées. Ses films épiques interrogent les identités artistiques, religieuses et transnationales, articulant un dialogue nuancé et pluriel qui relie les cultures plutôt que de privilégier une perspective au détriment d’une autre.

Wael Shawky - « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles
Wael Shawky – « Je suis les hymnes des nouveaux temples » à La Grande Halle de Luma Arles

Shawky est particulièrement reconnu pour des œuvres majeures telles que la trilogie Cabaret Crusades (2010-2015), qui fait appel à des marionnettes pour reconstituer l’histoire des croisades médiévales à partir d’un point de vue arabe ; la trilogie Al Araba Al Madfuna (2012-2016), qui ré imagine les mythes à travers des interprétations réalisées par des enfants ; et Drama 1882 (2024), présentée au pavillon égyptien de la Biennale de Venise de 2024.

Résidant et travaillant entre Alexandrie (Égypte) et Philadelphie (États-Unis), Shawky a présenté de nombreuses expositions individuelles importantes, notamment au Daegu Art Museum (2024), pour le pavillon de l’Égypte à la Biennale de Venise (2024), au M Leuven (Belgique) (2022), au Modern Art Museum of Fort Worth, Texas (2021), au Castello di Rivoli Museo d’Arte Contemporanea et à la Fondazione Merz à Turin (2016), au MoMA PS1 à New York (2015), aux Serpentine Galleries à Londres (2013-14), et au KW Institute for Contemporary Art à Berlin (2012). Il a également participé à d’importantes expositions collectives, entre autres à la Sharjah Biennial (2025, 2019, 2013), à l’Istanbul Biennial (2015, 2005), à la documenta de Kassel (2012), à la Gwangju Biennale (2012) et à la Biennale de Venise (2003).

Parallèlement à sa pratique artistique, Shawky a fondé MASS Alexandria en 2015, une école d’art indépendante à Alexandrie qui soutient les artistes de la scène émergente locale.

Ses œuvres font partie des principales collections de musées internationaux, comme le Museum of Modern Art de New York, la Tate Modern de Londres, le Mathaf: Arab Museum of Modern Art à Doha, Sharjah Art Foundation, National Museum of Modern and Contemporary Art (MMCA), Korea, Guggenheim Abu Dhabi, MACBA à Barcelone, et le Musée des beaux-arts du Canada.

Shawky a été récompensé à de nombreuses reprises pour son travail, notamment par la citoyenneté d’honneur de la ville de Palerme (2017), le prix de la Sharjah Biennial (2013), le prix de l’œuvre cinématographique créé par Louis Vuitton, Kino der Kunst, Munich (2013), Abraaj Capital Art Prize, Dubaï, (co-lauréat,2012), Schering Stiftung Art Award, Berlin (2011), Grand Prix, 25e Alexandria Biennale (2009). En 2011, il a été artiste en résidence au Center for Possible Studies, Serpentine Gallery, Londres.

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